▪ Les Secrets de la CNESST dévoilés : . C'est ICI tout savoir . Atteinte permanente . Limitation fonctionnelle . Consolidation . Comment contrecarrer les attaques . Bureau d'évaluation médicale
. Voir la mise en garde en haut de page - Ce n'est pas une liste exhaustive - Mise à jour : 14 septembre 2015
Critères :
1. Une maladie professionnelle
2. Le travail exercé chez chacun des employeurs est de nature à engendrer la maladie.
Si oui, il faut tenir compte :
- La durée de travail de nature à causer la maladie chez chacun des employeurs par rapport à l’ensemble.
- L’importance du danger (niveau de danger) retrouvé chez chacun d’eux.
Calcul de la durée :
- Il faut seulement tenir compte de la durée de travail, si c’est impossible de déterminer l’importance du danger.
- Ne pas compter les journées d’absence, ex : une maladie personnelle, une mise à pied, du chômage, des congés annuels, les périodes dans laquelle le travailleur a travaillé pour sa propre entreprise, une journée dans laquelle le travailleur n’est pas exposé directement au danger ou risque…
- Prendre, si c’est possible, les heures de travail, sinon les jours ou années pour déterminer la durée.
- Il faut prendre en compte le nombre de jours effectivement travaillés, étant les jours d’exposition réelle, et non le nombre de jours où le travailleur avait un lien d’emploi.
- La durée se mesure en fonction du temps d’exercice du travail de nature à engendrer la maladie.
(…)
Erreurs courantes de la CNESST / CSST - Vérifier :
- De nombreuses journées ou heures sont ajoutées en trop pour la durée du travail.
- Impute la totalité des coûts à l’employeur du travailleur au jour de la date du début de l’apparition des symptômes.
- Ne tient pas compte des employeurs antérieurs ou fait seulement un simple survol.
- Ne vérifie pas si les tâches de travail sur les anciens employeurs ont été des facteurs de risque.
- Se contente de considérer le nombre de jours où le travailleur avait un lien d’emploi au lieu de prendre en compte le nombre de jours effectivement travaillés, étant les jours d’exposition réelle.
(…)
Élément à considérer - exemple :
- Démontrer que le travailleur n’a pas exercé, alors qu’il était à l’emploi de l’employeur, un travail de nature à engendrer la maladie professionnelle dont il est atteint.
- La période de latence pour la maladie.
- Les tâches réalisées de manière concrète par le travailleur chez les autres employeurs qui sont de nature à engendrer la maladie diagnostiquée.
- Le nombre d’heures (ou jours, années) exposées aux facteurs de risque.
- L’historique des heures de travail effectuées par le travailleur dans les fonctions responsable de la maladie professionnelle.
- Le nombre d’heures travaillées dans l’entreprise.
- L’équipement de protection du travailleur (utilisation ou non, les politiques de l'entreprise, l’efficacité).
- Distinguer l’importance du danger chez les différents employeurs pour qui le travailleur a donné sa prestation.
- Le niveau d’exposition au produit dangereux ou au risque.
- Démontrer en quoi l’exposition chez l’employeur comporte moins de risques que chez les employeurs identifiés.
- Les mouvements réels et précis requis du travail.
- Le degré de force.
- La cadence & les périodes de repos.
- Les outils utilisés.
(…)
Emploi antérieur :
- Un affidavit (serment) du travailleur est insuffisant, la plus part du temps, son témoignage au tribunal est nécessaire .
- Démontrer que tout au long de sa carrière, le travailleur effectuait sensiblement les mêmes tâches, les mêmes mouvements, à des fréquences similaires, de façon régulière et significative et les mêmes méthodes de travail sur des matériaux certainement identiques et de même poids, et ce, avec les mêmes outils ou équipements, à la même cadence, les pauses allouées par les employeurs étaient plus ou moins fréquentes …
- La simple preuve d’emploi occupé antérieurement dont le titre est identique, similaire ou type d’emploi générique est insuffisante.
- Démontrer que les tâches réalisées de manière concrète par le travailleur chez les autres employeurs sont de nature à engendrer la maladie diagnostiquée
- Démontrer parmi le nombre d’heures travaillées, la proportion de ces heures consacrées à effectuer des mouvements de nature à causer la lésion diagnostiquée.
(…)
Importance du danger
- Les facteurs de risque associés au développement de la maladie en question, son absence ou sa similarité.
- Le degré d’exposition du travailleur aux facteurs de risques dans le cadre de son travail.
- Démontrer que les tâches exécutés par le travailleur, les outils, l’équipement, le matériel… sont similaires chez les autres les employeurs.
- Démontrer le port de l’équipement de protection individuelle par le travailleur pour le protéger de l’exposition et surtout son efficacité.
- Les mesures pris par l’employeur pour mesurer les risques ou les dangers (ex le niveau bruit dans l’entreprise).
(…)
Élément de preuve - exemple :
- Opinion médicale d’un expert.
- Témoignage du travailleur au tribunal (préférable, le juge peut l’interroger), l’affidavit (serment) est considéré insuffisant, la plus part du temps.
- Littérature scientifique.
- Licences et les qualifications requises.
- Formation particulière sur les précautions à prendre et sur les procédures à suivre qui ont été établies par la CNESST / CSST.
- Étude ergonomique.
- Taux d’exposition du travailleur pour distinguer les niveaux de danger.
(…)
Emploi antérieur :
- Relevés d’emploi du travailleur.
- Registre de la Commission de la construction du Québec.
- L’historique des employeurs de la RRQ.
- Le témoignage du travailleur, un affidavit (serment) n’est pas suffisant.
- Système REPÈRES
(…)
Élément de preuve insuffisant – exemple :
- De simples allégations ou hypothèses.
- La simple preuve d’emploi occupé antérieurement, dont le titre est identique ou similaire, un type d’emploi générique, du même genre de milieu de travail.
- Un affidavit d’un travailleur sur ses emplois antérieurs, son témoignage au tribunal est nécessaire.
- Le simple dépôt d’un curriculum vitae.
- D’alléguer seulement que le travailleur a exercé un travail exigent physiquement et impliquant les membres.
- Le fait que le travailleur estime être protégé adéquatement sans autre information.
- Invoquer seulement le matériel de protection sans démontrer son efficacité.
- Seulement les données fournies par des jugements de la TAT.
(…)
Curriculum vitæ du travailleur ou la description des tâches avec les emplois antérieurs doit contenir – exemple :
- Les emplois occupés
- Les responsabilités qu’il avait à chacun de ces postes.
- Durée de travail & année sur chacun des employeurs.
- Les tâches occupées.
- Les mouvements (de flexion, d’extension, de préhension, de pression, déviation, abduction …) et les gestes effectués, la cadence, la répétition.
- Quels sont les membres sollicités.
- Outil : le nom & la marque, leurs poids, la vibration, la percussion…
- Matériel ou équipement manipulé : nom, poids, nombre de fois, charges lourdes de façon manuelle, les mesures de protections prises…
- Matériel de protection (démontré l’efficacité).
- Le niveau de danger auquel le travailleur pouvait être exposé dans les tâches.
(…)
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Un extrait d’un jugement :
[22] Ainsi, dès que la preuve démontre qu’un travailleur a exercé un travail de nature à engendrer la maladie en cause pour plus d’un employeur, la CSST doit appliquer l’article 328.
- CHSLD Centre-Ville St-Charles-Borromée, 2012 QCCLP 462 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[22] Le tribunal est d’avis que la méthode d’analyse utilisée par la CSST et ses conditions d’application ne sont pas conformes au texte de l’article 328 de la loi.
[23] En effet, l’article 328 de la loi précise clairement que la CSST impute le coût des prestations à tous les employeurs pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle, et ce, proportionnellement à la durée de ce travail pour chacun de ces employeurs et selon l’importance du danger que présente ce travail pour chacun d’eux.[2]
[24] Dans son analyse, la CSST doit tenir compte de toute l’expérience de travail de la travailleuse en tant que plâtrière pour toute la période durant laquelle elle a exercé ce travail réputé et admis par la CSST comme étant de nature à engendrer sa maladie.
[25] La CSST applique sa politique d’orientation en vertu de laquelle elle impute l’ensemble des coûts de la maladie professionnelle due à des mouvements répétitifs chez l’employeur chez qui la symptomatologie s’est développée et pour laquelle un diagnostic a été objectivé.
[26] Or, la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles est claire que le tribunal n’est nullement lié aux politiques de la CSST. En outre, cette politique est contraire à l’article 328 de la loi[3].
[27] Le tribunal est d’avis que l’article 328 de la loi ne fait pas référence à la date de l’apparition de la symptomatologie comme étant le début de la période qui doit être retenue pour la répartition des coûts dans un dossier de maladie professionnelle et de l’octroi de l’imputation en découlant.
[28] Dans le présent dossier, il appert de l’historique des heures de la Commission de la construction du Québec que la travailleuse a toujours exercé un travail de plâtrière pour le compte de plusieurs employeurs distincts.
[29] Le présent tribunal réitère, conformément à sa jurisprudence constante sur cette question[4], que c’est l’ensemble de l’expérience professionnelle de la travailleuse qui doit servir de base de calcul pour déterminer la proportion devant être imputée à chaque employeur chez lequel la travailleuse a exercé l’emploi à l’origine de sa maladie professionnelle et dans des conditions similaires, le tout en fonction de la durée de ce travail chez chacun de ses employeurs.
- Marois & Fils, 2015 QCCLP 3538 (CanLII)
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Un extrait d’un jugement :
[43] Quant à l’alinéa 3 de l’article 328 de la loi, il vise la détermination de l’imputation lorsqu’un employeur est disparu ou lorsque l’imputation aurait pour effet d’obérer injustement un employeur.
[44] En l’espèce, la CSST a reconnu la maladie professionnelle du travailleur en raison du travail exercé chez l’employeur. La preuve ne révèle pas que le travailleur a occupé chez d’autres employeurs un travail de nature à engendrer sa maladie. L’employeur est le seul visé par l’imputation du coût des prestations.
[45] Malgré tout, sa représentante invoque l’alinéa 3 de l’article 328 de la loi. Elle prétend que l’imputation des coûts effectuée par la CSST aurait pour effet de l’obérer injustement parce que le travail exercé par le travailleur n’était pas de nature à engendrer sa maladie, le canal carpien bilatéral existant avant même son embauche, en septembre 2010.
[46] Cet argument de l’employeur est difficile à concilier avec le texte de la loi et vient en contradiction avec le premier alinéa de l’article 328, prérequis à l’application du troisième.
[47] En effet, vu les premiers mots utilisés par le législateur à l’alinéa 3 de l’article 328 de la loi, pour qu’un employeur puisse faire valoir qu’il est obéré injustement par une imputation et ainsi bénéficier d’un partage de coûts, il doit d’abord établir que le travailleur a exercé chez lui un travail de nature à engendrer sa maladie. Il s’agit là d’une condition d’ouverture à l’application de l’alinéa 3 de l’article 328 de la loi.
[48] Ce n’est que dans les cas où le travail engendre la maladie professionnelle que l’employeur pourra bénéficier des exceptions prévues à l’alinéa 3.
[49] Vu les conditions imposées par l’article 328 de la loi, l’employeur ne peut donc revendiquer un partage de coûts en faisant valoir qu’il est obéré injustement, tout en alléguant que le travail exercé chez lui n’était pas de nature à engendrer sa maladie.
- Acier AGF inc., 2014 QCCLP 3239 (CanLII)
Obérer injustement :
Un extrait d’un jugement :
[18] La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles a d’abord interprété la notion de « obérer injustement » prévue à l’article 326 de la loi, et ce, de façon large et libérale. Il s’agit de déterminer s’il y a injustice, inéquité pour l’employeur qui se voit imputer les coûts reliés à la maladie professionnelle. La jurisprudence précise que le troisième alinéa de l’article 328 de la loi, plus précisément la notion de « obérer injustement », doit être interprétée de la même façon qu’à l’article 326 de la loi.
[19] Dans l’affaire Olymel s.e.c.[2], la Commission des lésions professionnelles a écrit à ce sujet ce qui suit :
[43] Les propos de la commissaire Vallières sont livrés dans un contexte d’application du second alinéa 326. Cette distinction étant faite, le tribunal estime que ses propos demeurent très pertinents. D’une part, la notion d’obérer injustement mentionnée au troisième alinéa de l’article 328 doit avoir la même signification que celle mentionnée au second alinéa de l’article 326. D’autre part, le troisième alinéa de l’article 328 permet le transfert de l’imputation aux employeurs d’une de plusieurs ou de toutes les unités, tout comme le second alinéa de l’article 326. Le principe développé par la commissaire Vallières peut donc trouver application en l’espèce.
[20] Dans l’affaire Produits Forestiers Domtar[3], relativement à la notion d’obérer injustement de l’article 328, la commissaire écrit :
[23] Selon l’interprétation libérale donnée par la jurisprudence à l’expression « obérer injustement » il faut regarder non pas la situation financière de l’employeur mais plutôt le caractère inéquitable de l’imputation. Une imputation non justifiée serait donc considérée comme obérant injustement l’employeur. C’est manifestement cette interprétation que l’employeur souhaite voir appliquer au présent cas.
- Bell Canada, 2008 QCCLP 4108 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[23] La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il est, dans les circonstances du présent dossier, injuste et inéquitable d’imputer au dossier de l’employeur le coût des prestations reliées à la maladie professionnelle du travailleur, et ce, pour les motifs ci-après énoncés.
[24] D’abord, le travailleur a été à l’emploi de l’employeur de 1948 à 1991. La période d’exposition à l’amiante représente 1 % de son temps de travail pour l’employeur.
[25] Ensuite, l’employeur n’exploite pas une mine, mais bien une entreprise de télécommunication. Il ne s’agit pas d’une entreprise où il y a manipulation d’amiante et exposition à un tel produit.
[26] C’est durant quelques mois, alors qu’il travaillait pour deux clients de l’employeur, que le travailleur a été exposé à l’amiante, soit dans deux mines entre 1958 et 1962.
[27] Le risque auquel le travailleur a été exposé est donc totalement étranger à l’activité de l’employeur.
[28] Mais, ce qui est d’autant plus déterminant en l’espèce, c’est l’impossibilité pour l’employeur, à la période d’exposition en cause, d’agir sur le risque. À cette époque, le risque d’exposition à l’amiante causant une maladie pulmonaire professionnelle était inconnu pour un installateur technique en télécommunication. L’employeur ne pouvait éliminer un risque qui n’était pas scientifiquement connu.
[29] Le représentant de l’employeur a déposé à l’audience un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec publié en septembre 2003, intitulé Épidémiologie des maladies reliées à l’exposition à l’amiante au Québec.
[30] Ce rapport explique que le mésothéliome de la plèvre causé par l’exposition à l’amiante a été étudié dans les années ‘60 chez les mineurs.
[31] Or, le travailleur, qui a été exposé avant 1960, n’a jamais été mineur dans une mine d’amiante.
[32] Les risques n’étaient pas connus en 1958 ou en 1962 pour un travailleur occupant un poste d’installateur technique en télécommunication selon le rapport précité.
[33] L’employeur soumet que les études qui s’apparentent au cas du travailleur en l’espèce sont celles concernant les travailleurs de la construction et les premières études datent de 1981.
[34] De plus, les études sur la population en général des régions minières, toujours selon le rapport précité, datent de la fin des années ‘70. Nous sommes toujours à l’extérieur de la période d’exposition du travailleur.
[35] Au surplus, ce même rapport nous apprend que les études concernant les travailleurs québécois et les maladies reliées à l’exposition à l’amiante ont été effectuées à compter de 1980.
[36] L’employeur ne pouvait donc, en 1958, 1959 et 1962, éliminer ou contrôler le risque, à savoir l’exposition à l’amiante, car ce risque n’était pas connu à l’époque. Il serait injuste de faire supporter à l’employeur les conséquences d’un risque qui était scientifiquement inconnu à l’époque d’exposition du travailleur en cause. D’autant plus, que ce risque inconnu était présent, non pas chez l’employeur, mais chez des clients de ce dernier, et ce, en début de carrière du travailleur et pour une période qui ne représente que 1 % du travail pour l’employeur.
- Bell Canada, 2008 QCCLP 4108 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[34] En argumentation, la procureure convient que l’employeur n’est pas en mesure de prouver la nature du travail exercé pour ces 226 heures. Étant donné le temps écoulé, l’employeur n’a plus de données à ce sujet. Considérant cette situation injuste pour l’employeur, elle demande donc un transfert de l’imputation selon le troisième alinéa de l’article 328 de la loi.
[35] D’emblée, le tribunal indique qu’il ne peut souscrire à cette demande de transfert de l’imputation. Il ne voit pas en quoi la situation exposée peut s’avérer injuste pour l’employeur au sens développé par la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles. Surtout dans un contexte où il a pu faire témoigner monsieur Galichan, lequel est venu donner plusieurs détails sur le travail effectué à l’époque, bien avant 1986 ou 1988.
[36] Certes, l’employeur n’est pas en mesure de justifier la nature du travail effectué par le travailleur pour certaines périodes. Cette seule impossibilité à justifier la nature du travail ne peut se traduire en une injustice donnant ouverture à un transfert de l’imputation. Pour le tribunal, il s’agit d’un problème de preuve et non d’imputation injuste.
- Lambert Somec inc., 2015 QCCLP 250 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[65] Donc, il y a lieu de décider au départ si l’employeur a droit au transfert pour la période qui correspond au temps où la travailleuse n’a pu être opérée parce qu’elle consommait un médicament, le Coumadin, pour une pathologie étrangère à celle de la lésion professionnelle. Est-ce qu’il s’agit d’une situation où l’employeur est obéré injustement? La soussignée est d’avis que c’est le cas pour les raisons suivantes.
[66] À compter du 17 janvier 2008, la travailleuse n’a pu être opérée à cause d’une condition étrangère à celle résultant de la lésion professionnelle. La prise du Coumadin pour une embolie pulmonaire a en effet empêché l’intervention pour la trapézectomie du côté gauche. La CSST a donc dû verser l’indemnité de remplacement du revenu pour une pathologie sans lien avec celle-ci; et ce, pour une période qui n’est pas négligeable, soit environ sept mois.
[67] Ces faits permettent de conclure que l’employeur serait obéré injustement si son dossier était imputé des sommes déboursées pour le dossier de la travailleuse à compter du 17 janvier 2008. Toutefois, contrairement aux prétentions du représentant de l’employeur la soussignée est d’avis que l’absence d’imputation doit s’arrêter au 1er août 2008, soit le moment où il n’y avait plus d’empêchement à l’opération. Le fait que la travailleuse ait été sur une liste d’attente par la suite pour être opérée ne constitue pas une situation injuste compte tenu de la situation dans le réseau de santé au Québec.
- Olymel-Flamingo, 2012 QCCLP 5130 (CanLII)
Un 4e extrait d’un jugement :
[38] Si le rattachement du Pavillon Auclair avait été fait correctement lors de la création des CSSS du territoire de l’Île de Montréal, le CSSS du Sud-Ouest-Verdun n’aurait jamais été imputé d’une quelconque proportion du coût des prestations versées au travailleur en raison de sa maladie professionnelle.
[39] L’alinéa 3 de l’article 328 de la loi permet d’imputer aux employeurs de toutes les unités le coût imputé à un employeur lorsque l’imputation qui lui a été faite aurait pour effet de l’obérer injustement, conclusion à laquelle arrive le tribunal dans la présente affaire.
[40] Dans le contexte de cette erreur de rattachement du Pavillon Auclair au CSSS approprié, le tribunal estime que l’employeur est obéré injustement par cette imputation.
- CSSS du Sud-Ouest-Verdun, 2013 QCCLP 6922 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[8] La CSST n’a aucune discrétion quant à l’application de l’article 328 de la loi dans le cas où le travailleur a exercé un travail pour plus d’un employeur et que ce travail est de nature à engendrer la maladie.
[9] Ainsi, dans l’affaire Wal-Mart Canada (Commerce détail)[2], on énonçait :
[18] La Commission des lésions professionnelles a décidé à plusieurs reprises que la politique de la CSST de calculer le partage de l’imputation en partant du début de l’apparition des douleurs ou des symptômes de la maladie n’était pas conforme aux dispositions de l’article 328 de la loi.
[…]
[10] Le tribunal partage totalement cette position en rappelant que la durée d’exposition totale d’un individu à un risque professionnel fait partie intégrante de l’annexe 1, sous-section IV, paragraphe 2. Il en est de même des risques particuliers.
[11] Plus l’exposition est longue, en durée/année, plus le risque de développer la maladie est grand indépendamment de chez qui la maladie peut apparaître. En effet, c’est la charge totale de l’exposition aux risques qui doit être pris en considération et non pas la simple apparition des symptômes qui est en la résultante.
[…]
[20] Comme on l’a lu, la Commission des lésions professionnelles ne peut retenir une telle interprétation ou application de l’article 328 de la loi qui ne respecte pas les principes impartis par cet article. En effet, la CSST devait procéder à une ventilation de l’imputation du coût des prestations en tenant compte de l’ensemble des employeurs ainsi que de la période de travail effectué par le travailleur à l’extérieur du pays.
- Index Construction inc., 2015 QCCLP 4330 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[15] Comme le rappelle la Commission des lésions professionnelles dans l'affaire Entretien Paramex inc.[2], le calcul de l’imputation doit se faire en tenant compte de la durée de l'exposition et de l’importance du danger que représentait le travail chez l’employeur : […]
- Institut universitaire en santé mentale Douglas, 2015 QCCLP 4377 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[22] Cependant, le tribunal doit donner raison au procureur de l’employeur sur sa demande subsidiaire. Le procureur soutient que la CSST a erré en additionnant les heures effectuées chez l’employeur. Certes, la lecture des documents ayant servi à l’exercice d’imputation par la CSST établit clairement, avec une bonne calculatrice, que cette dernière a erré, à deux reprises, en calculant l’imputation de l’employeur, mais le tribunal relève également d’autres erreurs.
[23] D’abord, la preuve ne permet pas de distinguer l’importance du danger chez les différents employeurs pour qui le travailleur a donné sa prestation d’électricien. Tout ce que l’on connaît, c’est le total des heures qu’il a travaillées à titre d’électricien selon le dossier de la CCQ. Puisque la preuve ne permet pas de distinguer l’importance du danger entre les différents milieux d’exposition, il y a lieu de procéder au partage des coûts en fonction des données fournies quant à la durée de travail du travailleur chez ces employeurs où il aurait pu être exposé vu son travail.
- Cie électrique Britton ltée, 2013 QCCLP 3428 (CanLII)
Un 4e extrait d’un jugement :
[22] Il est raisonnable, sinon équitable, que chacun des employeurs pour qui un travailleur a exercé un travail susceptible de provoquer une maladie professionnelle soit imputé du coût des prestations. Comme il a été écrit avec justesse dans l’affaire Émondage St-Germain & Frères ltée et CSST[6], n’imputer que le dernier employeur va à l’encontre de l’article 328 de la Loi et de l’obligation qu’a la CSST de rendre ses décisions suivant l’équité, d’après le mérite réel et la justice du cas.
- Carrosserie Idéale Terrebonne inc. et DR Carrosserie, 2014 QCCLP 1175 (CanLII)
Un 5e extrait d’un jugement :
[54] Le présent tribunal réitère, conformément à sa jurisprudence constante sur cette question[9], que c’est l’ensemble de l’expérience professionnelle de la travailleuse qui doit servir de base de calcul pour déterminer la proportion devant être imputée à chaque employeur chez lequel la travailleuse a exercé l’emploi à l’origine de sa maladie professionnelle et dans des conditions similaires, le tout, en fonction de la durée de ce travail chez chacun de ces employeurs.
- Confection 2001 inc., 2012 QCCLP 3945 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[25] À la lecture de cet article, il est permis de constater qu’aucun délai n’a été fixé par le législateur concernant les demandes d’application pouvant être faites par un employeur en cette matière. Lorsque le législateur a voulu prévoir des délais et des conditions strictes, il l’a fait comme aux articles 326 et 329 de la Loi.
[26] Par sa lettre du 25 octobre 2004, l’employeur ne faisait que demander à la CSST d’appliquer pour la première fois les termes et les dispositions de l’article 328 en lui soumettant des informations pertinentes à cet effet.
[27] La CSST n’avait jamais rendu auparavant de décision concernant l’article 328 et l’avis d’imputation automatique, dont copie ne se trouve même pas au dossier par ailleurs, ne peut être considéré comme constituant une première décision à cet effet. Il s’agit plutôt d’un automatisme qui survient lors de l’ouverture de chaque dossier sans que la CSST ne procède à quelque analyse que ce soit. En l’absence d’une première décision ou d’une demande antérieure, il ne peut s’agir en l’occurence d’une demande de reconsidération d’une décision au sens du règlement précité[3].
[28] C’est donc à tort que la CSST en révision administrative a appliqué ce règlement puisque la demande de l’employeur ne requérait simplement que l’application de l’article 328 de la Loi pour la première fois.
[29] Cette façon de procéder de la CSST est un peu particulière quand on considère que lorsqu’un employeur conteste l’avis d’imputation initial en demandant un partage en vertu de l’article 329 de la Loi, on l’avise qu’il doit plutôt procéder à une demande nouvelle et spécifique à la suite de quoi une décision sera rendue. Pourquoi en irait-il autrement face à l’article 328?
[30] Lorsqu’elle émet un avis d’imputation peu de temps après l’ouverture d’un dossier, la CSST le fait dans l’ignorance complète de l’impact des conséquences réelles de cette lésion ou des éléments permettant l’ouverture à une demande de partage ou de transfert d’imputation[4].
[31] L’avis d’imputation initial, qui n’est rien d’autre qu’un relevé décrivant le coût des lésions professionnelles délivré automatiquement en application du principe général d’imputation, ne saurait constituer une décision rendue à la lumière de l’article 328 et de ses prescriptions. Un tel avis ne porte que sur la détermination de l’employeur qui devrait normalement supporter l’imputation, sans analyser les différentes possibilités de partage et de transfert contenues aux articles 326 et suivants. Il n’y a donc pas lieu d’avoir recours à la notion de reconsidération ou de faire appel au règlement précité en pareil cas[5].
[32] Dans l’affaire Allstom Canada Inc. (Transport Daviault)[6], la Commission des lésions professionnelles rappelait que l’article 328 de la Loi ne comporte aucun délai pour son application et prévoit des conditions différentes et moins exigeantes que le Règlement sur la nouvelle détermination de la classification, de la cotisation d’un employeur et de l'imputation du coût des prestations déjà cité. La CSST se doit donc en premier lieu de vérifier si les conditions prévues à l’article 328 sont remplies et ne peut pas, sans avoir déjà rendu une décision en application de cet article 328, justifier son refus d’analyser la demande de l’employeur sur la base du non-respect d’une des conditions prévues à ce règlement, ce dernier ne pouvant s’appliquer avant que soit rendue une première décision d’imputation en vertu de l’article 328. Ces principes s’appliquent parfaitement en l’espèce.
[33] Dans une autre affaire impliquant Mines d’or Kiena ltée et Tremblay[7], la Commission des lésions professionnelles rappelait une fois de plus qu’aucun délai particulier n’étant mentionné à l’article 328 de la Loi, la demande de transfert dont elle était saisie dans cette cause aurait dû être traitée au mérite par la CSST.
[34] Le tribunal estime donc que la CSST, autant en première ligne qu’en révision administrative, devait évaluer le mérite de la demande de partage formulée par l’employeur.
- Nettoyage Docknet inc. (Re), 2005 CanLII 74787 (QC CLP)
Un 2e extrait d’un jugement :
[8] Le 11 juin 2014, la CSST rend une décision informant l’employeur qu’il sera imputé du coût des prestations dues en raison de cette maladie professionnelle. Il s’agit d’une décision rendue automatiquement et sans aucune évaluation des critères prévus à l’article 328 de la loi, que la CSST a pourtant pour mission d’appliquer.
[9] Cette décision automatique de la CSST mène au constat que les dispositions de l’article 328 de la loi n’ont pas été évaluées à ce stade[3]. En conséquence, lorsqu’il a déposé une demande d’imputation en vertu de l’article 328 de la loi, l’employeur demandait à la CSST d’exercer sa juridiction pour la première fois à ce niveau.
[10] Il n’est donc pas question ici d’appliquer les dispositions législatives en matière de nouvelle détermination de l’imputation.
[11] Au surplus, aucun délai particulier n’est prévu à l’article 328 de la loi[4].
[12] Les situations visées à l’article 328 de la loi n’ont donc pas normalement à faire l’objet d’une demande particulière pour leur application. Le législateur considère que la CSST a en main les informations nécessaires quant à pareille situation et qu’elle est elle-même en mesure de procéder à l’imputation conformément à la loi.
[13] Le législateur emploie ici une forme impérative, à savoir « la Commission impute », de sorte que cet organisme n’a normalement d’autre choix que de se prononcer sur cette question. Il est manifeste cependant que la CSST ne l’a pas fait ici dans sa décision initiale et que l’employeur a été forcé de présenter une demande spécifique pour qu’elle applique les dispositions prévues à l’article 328 de la loi.
[14] Nul délai ne doit être opposé à l’employeur en pareil cas, puisque la CSST a fait défaut d’exercer sa compétence en temps opportun[5].
- Entreprises Régis Gagnon inc., 2015 QCCLP 4440 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[66] C’est donc dans ce contexte très particulier qu’il faut replacer la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles. Lorsque l’employeur est forcé de présenter une demande spécifique à la CSST pour appliquer l’imputation prévue aux articles 327 et 328 de la Loi, nul délai ne devrait lui être opposé si, à l’évidence, la CSST a fait défaut d’exercer sa compétence en temps opportun. Tel que prévu à l’article 377 de la Loi, devant une telle situation, la Commission des lésions professionnelles doit infirmer la décision de la CSST et rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu, soit de disposer du cas à son mérite.
- Roland Boulanger & Cie et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 2007 QCCLP 834 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[8] La CSST n’a aucune discrétion quant à l’application de l’article 328 de la loi dans le cas où le travailleur a exercé un travail pour plus d’un employeur et que ce travail est de nature à engendrer la maladie.
- Index Construction inc., 2015 QCCLP 4330 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[29] Dans l’affaire Abattoir Colbex inc.[5] , la Commission des lésions professionnelles mentionne que la CSST n’a aucune discrétion. Elle doit imputer le coût des prestations à tous les employeurs pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer la maladie professionnelle. L’imputation est proportionnelle à la durée de ce travail et à l’importance du danger que présente ce travail pour chacun des employeurs :
[41] Ainsi, lorsqu’un employeur formule une demande invoquant le second alinéa de l’article 328 de la Loi, le tribunal est d’avis que sa demande doit faire l’objet d’une analyse par la CSST au même titre qu’une demande faite en vertu du second alinéa de l’article 326 ou de l’article 329. Et si la preuve permet de conclure que le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer la maladie pour plus d’un employeur, la CSST n’a aucune discrétion et doit imputer le coût des prestations à tous les employeurs pour qui le travailleur a exercé ce travail et ce, proportionnellement à la durée de ce travail pour chacun des employeurs et à l’importance du danger que présentait ce travail chez chacun de ces employeurs.
- Hamel & Hamel inc., 2013 QCCLP 4828 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[10] La durée se mesure en fonction du temps d’exercice du travail de nature à engendrer la maladie alors que l’importance du danger que présente ce travail se mesure plutôt en fonctiondes facteurs de risque associés au développement de la maladie en question et au degré d’exposition du travailleur à de tels risques, dans le cadre de sontravail.
[…]
[12] À défaut d’une preuve prépondérante permettant d’évaluer adéquatement l’importance du danger, letribunal n’a d’autre choix que de s’en remettre au seul critère de la durée de l’exposition[2].
- Plomberie de la Capitale inc., 2010 QCCLP 2969 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[8] Dans le cas qui nous occupe, le dossier ne contient pas d’information quant au temps de travail réellement effectué chez chacun des employeurs impliqués. Nous n’avons pas non plus d’information à savoir si les différents employeurs sont toujoursactifs. Cette situation rend impossible l’analyse de partage des coûts, d’autant plus que le travailleur n’est pas présent à l’audience.
- Épicerie François Chouinard (Re), 2006 CanLII 65583 (QC CLP)
Un extrait d’un jugement :
[15] Selon la preuve déposée par l’employeur, qui consiste en son journal de paye pour le travailleur, ce dernier a effectué un total de 1 024,25 heures soit un total de 128 jours. La différence vient du fait que le travailleur n’a pas travaillé à temps plein pour l’employeur pour la période où il avait un lien d’emploi. La CSST s’est contentée de considérer le nombre de jours où le travailleur avait un lien d’emploi au lieu de prendre en compte le nombre de jours effectivement travaillés, étant les jours d’exposition réelle.
- Hydro-CRT, s.e.n.c. (HMI Construction inc.), 2014 QCCLP 6982 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[33] D’une part, il prétend que la durée d’exposition doit exclure les absences, que ce soit pour maladie, congés annuels ou autres.
[34] D’autre part, il prétend que, dans le cadre de ses activités à titre de délégué syndical, le travailleur n’était pas exposé à un bruit excessif puisqu’il travaillait majoritairement dans un bureau fermé situé dans l’usine. La soussignée entend traiter ces deux motifs de façon distincte.
[35] En ce qui a trait aux absences que ce soit pour maladie ou pour congés annuels, le tribunal considère que l’employeur a fait la démonstration, à l’aide d’une preuve prépondérante, d’une période importante au cours de laquelle le travailleur n’a pas été exposé au bruit, soit au cours des 235 jours de mises à pied et d’absences maladie de même qu’au cours des 265 jours de congés annuels. Le tribunal fait donc droit à la demande de l’employeur de retrancher cette portion de la durée d’exposition au bruit chez l’employeur.
[36] Par ailleurs, en ce qui a trait aux activités syndicales auxquelles le travailleur s’est adonné pour une période de 380 jours, le tribunal considère que celles-ci doivent être appréciées différemment des journées d’absence du travail. Il est vrai que monsieur Bouchard a prétendu que dans une proportion d’environ 90 % de son temps de libération à titre de délégué syndical, le travailleur était dans son bureau avec la porte close. Néanmoins, monsieur Bouchard a admis qu’il s’agissait là d’une estimation qui n’était basée sur aucune donnée précise et, au surplus, bien qu’il soutienne que dans ce contexte le travailleur n’était pas exposé au bruit, il n’a fourni aucune donnée objective permettant de corroborer son témoignage à cette fin.
- Ébénisterie Beaubois ltée, 2015 QCCLP 3102 (CanLII),
Un 3e extrait d’un jugement :
[46] Le tribunal estime par ailleurs que cette période durant laquelle le travailleur aurait été son propre patron peut, de toute façon, être prise en compte par le biais du troisième alinéa de l’article 328 de la loi.
[47] À ce sujet, le tribunal se réfère à l’affaire Bell Canada[8] :
[18] La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles a d’abord interprété la notion de « obérer injustement » prévue à l’article 326 de la loi, et ce, de façon large et libérale. Il s’agit de déterminer s’il y a injustice, inéquité pour l’employeur qui se voit imputer les coûts reliés à la maladie professionnelle. La jurisprudence précise que le troisième alinéa de l’article 328 de la loi, plus précisément la notion de « obérer injustement », doit être interprétée de la même façon qu’à l’article 326 de la loi.
[48] Ainsi, le tribunal considère qu’il serait injuste et inéquitable envers l’employeur de ne pas tenir compte, dans l’imputation du coût des prestations reliées à la maladie professionnelle du travailleur, des années où celui-ci a été son propre patron tout en exerçant le même travail comportant un danger d’engendrer cette maladie.
- Coffrage Fréchette & Frères, 2015 QCCLP 612 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[37] En effet, dans l’affaire Entreprises Michel Duchesneau[9], la Commission des lésions professionnelles indique que la simple preuve d’emploi occupé antérieurement, dont le titre est identique ou similaire, est insuffisante puisque, en vertu de l’article 328 de la loi, il doit être établi, de façon prépondérante, que le travail réellement exercé chez chacun des employeurs en était un de nature à engendrer la maladie professionnelle en cause :
[20] Il y a donc lieu d’identifier les employeurs chez qui le travailleur a exercé des tâches de nature à engendrer une tendinite du poignet droit. Cette preuve doit être concrète et non seulement théorique ou approximative.
[21] La preuve ne doit pas seulement se baser sur un type d’emploi générique. Elle doit plutôt démontrer les gestes requis qui, en pratique, chez les autres employeurs, seraient de nature à engendrer la maladie diagnostiquée3.
[22] L’employeur doit démontrer, parmi le nombre d’heures travaillées, la proportion de ces heures consacrées à effectuer des mouvements de nature à causer la lésion diagnostiquée4.
[23] En d’autres termes, il revient à l’employeur de prouver que les emplois antérieurs du travailleur étaient de nature à contribuer à sa maladie professionnelle5.
[24] L’employeur doit donc faire cette démonstration au moyen d’une preuve concrète des tâches exercées chez les autres employeurs et de simples allégations ou hypothèses ne sont pas suffisantes6.
[25] La simple preuve d’un titre d’emploi similaire ne suffit pas mais encore faut-il que la preuve démontre que les gestes requis pour effectuer les tâches chez les autres employeurs sont également de nature à engendrer la maladie diagnostiquée.
[26] Or, la preuve est totalement absente à cet effet. L’employeur et le travailleur décrivent les tâches effectuées par le travailleur chez l’employeur en cause. Cependant, aucune description de tâches n’existe au dossier concernant les employeurs antérieurs.
___________
3 W. Laframboise ltée, CLP 233609-71-0405, 25 janvier 2005, C. Racine; voir aussi Corne d’abondance Ancienne-Lorette, 121647-32-9908, 25 octobre 1999, M.-A. Jobidon;
4 Entretien Industriel Etchemin inc. et CSST, CLP 127818-03B-9912, 5 juillet 2000, M. Cusson révision rejetée 18 janvier 2001, G. Tardif.
5 Produits forestiers LMC inc. et CSST, CLP 89526-01-9708, 19 juin 1998, R. Ouellet
6 Thetford armature inc. et Moteurs électriques Gosselin inc., 185894-05-0206, 6 décembre 2002, M. Allard
- Soucy Belgen inc., 2015 QCCLP 708 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[25] La preuve démontre que l'employeur s'est déchargé de son fardeau. En effet, principalement à l'affidavit du travailleur, la preuve prépondérante révèle que ce dernier exerce son métier de tuyauteur-plombier dans les mêmes conditions tout au cours de sa carrière débutant en 1981. L’emploi exercé, bien que chez des employeurs différents, constitue le même travail. Pour le même type de tâches, il utilise les mêmes outils susceptibles d’engendrer la maladie professionnelle. Il y a démonstration que le travailleur a exercé, chez tous ses employeurs depuis 1981, un travail dont l’importance du danger est de nature à engendrer la maladie professionnelle reconnu en l’espèce.
- Groupe Ohméga — Division construction inc., 2015 QCCLP 4477 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[46] À cet égard, le tribunal estime que l’employeur n’a pas démontré, de façon prépondérante, que le travail de manoeuvre spécialisé, chez les employeurs autres que ceux identifiés par la CSST, était de nature à engendrer la maladie professionnelle reconnue. Il n’a pas non plus démontré l’importance du danger chez chacun de ces employeurs.
[47] En effet, l’employeur n’a pas présenté de preuve détaillée portant sur le travail du travailleur à titre de manœuvre spécialisé, au moment de sa réclamation, ou chez ses employeurs précédents. Il n’a pas non plus administré une preuve convaincante au niveau des gestes exécutés chez les autres employeurs, dans le cadre du travail de manœuvre spécialisé. Outre le nombre d’heures travaillées, il n’a pas prouvé la proportion des heures consacrées aux différentes tâches accomplies. Il n’a pas démontré la nature des mouvements effectués.
[48] L’employeur n’a pas non plus administré une preuve sur les conditions de travail dans lesquelles se sont réalisés les autres emplois du travailleur à titre de manœuvre spécialisé.
[49] Ainsi, le tribunal n’est pas en mesure de savoir s’il y avait variation dans les tâches; si les outils utilisés étaient similaires; si les gestes posés nécessitaient des manœuvres différentes ou similaires; si les pauses allouées par les employeurs étaient plus ou moins fréquentes; si les gestes effectués exigeaient des manœuvres de plus grandes amplitudes.
[50] Ces éléments sont déterminants puisque l’importance du danger se mesure en fonction des facteurs de risque associés au développement de la maladie et du degré d’exposition du travailleur à de tels risques. Or, le dossier est peu documenté à cet égard, le travailleur témoignant même que son travail sur la construction, ailleurs que chez les trois employeurs identifiés par la CSST, était moins exigeant que chez ces derniers.
[51] De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, l’application de l’article 328 de la loi n’est pas automatique. Pour qu’il satisfasse aux conditions imposées par le législateur, l’employeur ne doit pas seulement alléguer qu’un travailleur a eu un même titre d’emploi chez différents employeurs, pendant plusieurs années.
[52] Une allégation de cette nature ne signifie en effet pas que le travailleur effectuait notamment les mêmes mouvements, à des fréquences similaires, de façon régulière et significative, ni qu’il utilisait les mêmes outils ou équipements, à la même cadence.
[53] Comme l’indique notre collègue Clément dans l’affaire Les entreprises Michel Duchesneau[3], la simple preuve d’emploi occupé antérieurement dont le titre est identique ou similaire est insuffisante puisque, en vertu de l’article 328 de la loi, il doit être établi, de façon prépondérante, que le travail réellement exercé chez chacun des employeurs, en était un de nature à engendrer la maladie professionnelle en cause.
[…]
[58] Le tribunal retient que le travail de débroussailleur ne requérait pas les mêmes mouvements que celui de manœuvre spécialisé. De plus, le travail n’était pas effectué avec les mêmes outils, matériaux et équipements, à la même cadence.
[59] Toutefois, l’employeur n’a pas présenté de preuve sur les facteurs de risque liés à la tâche de débroussailleur. Ainsi, il est difficile de déterminer précisément dans quelle proportion le travail effectué par le travailleur à ce titre pouvait également être de nature à engendrer la maladie reconnue et présenter un danger.
[60] Malgré le silence de la preuve à cet égard, le tribunal estime cependant que les éléments présentés par l’employeur ne constituent pas que de simples allégations ou hypothèses. Vu la preuve présentée, il conclut que les gestes effectués dans le travail de débroussailleur pouvaient exiger des manœuvres requérant une certaine intensité pour les poignets. En outre, les outils utilisés engendraient également des vibrations.
[61] Ainsi, le tribunal estime que l’employeur a prouvé que les emplois antérieurs exercés par le travailleur à titre de débroussailleur étaient, du moins en partie, de nature à contribuer à la maladie professionnelle reconnue.
- Pomerleau inc., 2013 QCCLP 6406 (CanLII)
Un 4e extrait d’un jugement :
[15] L’employeur estime que le travailleur a effectué chez d’autres employeurs un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle, et ce, tout au long de sa carrière. Il soutient que l’affidavit du travailleur démontre que celui-ci effectuait sensiblement les mêmes tâches, les mêmes mouvements et les mêmes méthodes de travail sur des matériaux certainement identiques et de même poids, et ce, avec les mêmes outils que chez l’employeur Uni?Verre Rouyn-Noranda inc. L’employeur considère que les facteurs de risque qui étaient présents chez l’employeur Uni?Verre Rouyn?Noranda inc. l’ont aussi été chez les autres employeurs antérieurs pour qui le travailleur aurait effectué le même travail. L’employeur émet l’hypothèse que si le travailleur avait travaillé 1 000 heures par années pendant 40 ans pour des employeurs pour lesquels il aurait effectué les mêmes tâches que chez l’employeur Uni?Verre Rouyn-Noranda inc., il aurait droit à un partage de 17 % car il a travaillé près de 9 051,4 heures pour cet employeur.
[16] Le tribunal estime que l’employeur n’a pas démontré par une preuve prépondérante que le travailleur a occupé d’autres emplois où il a contracté, par le fait ou à l’occasion de son travail, une maladie professionnelle reliée directement aux risques particuliers de ce travail, soit une épicondylite et une épitrochléite bilatérales et une tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche.
[17] Or, les affirmations du travailleur dans son affidavit sont insuffisantes, vagues et imprécises pour conclure que sa maladie professionnelle diagnostiquée est reliée directement aux risques particuliers des différents emplois qu’il a occupés. Ainsi, il n’y a pas de preuve prépondérante que les tâches spécifiques des autres métiers exercés par le travailleur pouvaient être des facteurs de risque importants pour les lésions musculo-squelettiques retenues.
[18] En l’espèce, le tribunal estime que le seul emploi du travailleur pour lequel une preuve de risque particulier a été démontrée est celui de monteur mécanicien vitrier considérant notamment l’opinion médicale de médecin de la CSST reliant sa maladie professionnelle aux tâches qu’il a accomplies dans le cadre de ce travail.
[19] De plus, d’une part, le tribunal estime que seules les heures indiquées au registre de la Commission de la construction du Québec doivent être retenues, car ce registre permet un minimum de fiabilité pour les heures travaillées pour l’emploi de monteur mécanicien vitrier. D’autre part, l’affidavit du travailleur est encore une fois insuffisant, vague et imprécis pour conclure qu’il aurait travaillé un nombre supérieur d’heures à ce qui apparait à ce registre. Le tribunal retient que le travailleur a effectué un total de 10 764,40 heures comme monteur mécanicien vitrier selon les heures indiquées pour ce corps d’emploi au registre de la Commission de la construction du Québec et, de ce total, 9 051,40 heures l’ont été pour l’employeur Uni-Verre Rouyn-Noranda inc.
- Uni-Verre Rouyn-Noranda inc., 2013 QCCLP 6308 (CanLII)
Un 5e extrait d’un jugement :
[33] L’employeur allègue que le travailleur a occupé la tâche de découpeur chez la partie intéressée qui s’exerçait sur une chaîne de montage, ce qui impliquait la manipulation d’outils vibratoires pour 95 % du temps de travail. Sur cet aspect, le tribunal considère que la preuve offerte par l’employeur a peu de valeur probante. Le tribunal ne peut déterminer la source des informations de l’employeur, ni si cette information est corroborée par le travailleur, cela n’apparaît pas au dossier. La CSST n’a pas non plus procédé à une analyse de cet emploi et de l’importance du danger qu’il pouvait représenter.
[34] De toute évidence, l’employeur n’a pas une connaissance personnelle des tâches exercées par le travailleur chez l’employeur précédent. En l’absence d’indications quant aux sources de l’employeur ou de corroboration de la part du travailleur, le tribunal ne peut considérer que cette preuve est prépondérante pour établir une distinction quant à l’importance du danger chez les deux employeurs.
- Composite VCI inc et Camoplast inc, 2013 QCCLP 7162 (CanLII)
Un 6e extrait d’un jugement :
[33] En fait, outre l’historique des employeurs de la RRQ, l’argumentation de l’employeur repose sur des allégations non démontrées de manière prépondérante.
[34] Le tribunal rappelle que le fardeau de preuve de l’employeur quant à l’application de l’article 328 de la loi requiert de démontrer que les emplois antérieurs du travailleur étaient de nature à contribuer à sa maladie professionnelle.
[35] Pour faire cette démonstration, l’employeur ne doit pas seulement se baser sur un type d’emploi générique. Il doit démontrer que les tâches réalisées de manière concrète par le travailleur chez les autres employeurs sont de nature à engendrer la maladie diagnostiquée[5].
[36] La preuve ne doit pas seulement se baser sur un type d’emploi, mais doit démontrer les gestes requis qui, en pratique chez les autres employeurs, seraient de nature à engendrer la maladie diagnostiquée. L’employeur doit aussi démontrer parmi le nombre d’heures travaillées, la proportion de ces heures consacrées à effectuer des mouvements de nature à causer la lésion diagnostiquée. En d’autres termes, il revient à l’employeur de prouver que les emplois antérieurs du travailleur étaient de nature à contribuer à sa maladie professionnelle.
[37] Le tribunal considère que l’employeur n’a pas fait cette preuve.
- Groupe SP Rénovations inc., 2014 QCCLP 2563 (CanLII)
. Voir la mise en garde en haut de page - Ce n'est pas une liste exhaustive - Mise à jour : 14 septembre 2015
Un extrait d’un jugement :
[50] La période de temps se mesure en fonction du temps d’exercice du travail de nature à engendrer la maladie, alors que l’importance du danger que présente ce travail doit être évaluée en fonction des facteurs de risque associés au développement de la maladie en question et au degré d’exposition du travailleur à de tels risques dans le cadre de son travail.
[51] Sur ce dernier aspect, il faut qu’une preuve prépondérante soit présentée permettant d’établir en quoi l’exposition chez un employeur comporte moins de risques que chez d’autres employeurs identifiés. Et ceci, non pas dans une optique de remettre en cause l’admissibilité de la maladie, mais bien de procéder à une juste répartition du coût des prestations de cette maladie entre les différents employeurs chez qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer la maladie[2].
[52] À défaut d’une preuve prépondérante permettant d’évaluer adéquatement l’importance du danger, le tribunal n’a d’autre choix que de s’en remettre au seul critère de la durée de l’exposition[3].
- Entretien Paramex inc., 2011 QCCLP 5251 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[33] La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’effectivement l’article 328 permet de tenir compte de l’importance du danger d’un employeur à l’autre.
[34] Cependant, cette possibilité offerte à l’article 328 de la loi est rarement appliquée dans les faits à défaut de données fiables disponibles au dossier.
- Thermofin, 2011 QCCLP 6575 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[28] L’employeur soutient cependant que l’imputation du coût de la lésion professionnelle devrait au surplus être réduite en application du critère de l’importance du danger que présentait le travail de charpentier-menuisier effectué chez d’autres employeurs.
[29] L’employeur soutient, en effet, qu’il appert de la déclaration solennelle du travailleur que chez certains autres employeurs, les tâches étaient moins variées et la charge de travail beaucoup plus importante que chez lui.
[30] Sur cette question, l’employeur s’appuie d’abord sur la déclaration du travailleur voulant que chez Construction Tola Dupuis inc., « la cadence exigée, les heures imposées ainsi que les outils utilisés créaient une surcharge de travail ».
[31] Le tribunal ne peut retenir ce commentaire du travailleur à titre de preuve d’un risque accru vécu chez cet employeur. Il s’agit en effet d’un témoignage d’opinion émis par un témoin de faits, le travailleur. Au surplus, ce témoignage d’opinion n’est par ailleurs appuyé par aucune donnée factuelle attestant d’une quelconque cadence ou de l’ampleur du nombre d’heures « imposées » qui permettrait au tribunal de conclure à la preuve d’une surcharge de travail. Dans le même ordre d’idée, rien dans la documentation au dossier ne permet au tribunal de conclure que les outils utilisés chez cet employeur puissent être à l’origine d’une surcharge de travail.
[32] L’employeur invoque également le fait que le travailleur affirme dans sa déclaration solennelle que, chez Céleb Construction Itée, ses tâches étaient moins variées et plus exigeantes, parce qu’elles consistaient à faire du coffrage et du décoffrage, à casser et à couper du béton et que pour ce faire, il utilisait « pendant la grande majorité de ses heures de travail un marteau piqueur ».
[33] Le tribunal retient cependant que cette description du travail effectué chez Céleb Construction ltée, apparaissant à la déclaration solennelle du travailleur, diffère de celle faite dans le document « Emplois passés et tâches respectives » soumis à la CSST à l’époque de sa réclamation.
[34] Dans ce document, le travailleur y décrit en effet des tâches plus variées que celles décrites dans sa déclaration solennelle. Le travailleur explique en effet qu’il casse et coupe du béton, qu’il fait du coffrage, ce qui implique de creuser, de mettre en place, de percer, de faire des ancrages et de démolir, et qu’il fait des systèmes intérieurs.
[35] Le tribunal constate au surplus que, selon la description d’emploi soumise à la CSST, le travailleur utilise une variété d’outils contrairement à ce qu’il affirme dans sa déclaration solennelle. Outre le marteau piqueur à air ou électrique, le travailleur explique en effet qu’il utilise des drill à percussion, des perceuses à béton, des scies rotatives et des meules. Le tribunal remarque incidemment que dans la description soumise à la CSST, les outils utilisés chez Céleb Construction ltée sont les mêmes que ceux utilisés chez Construction Michel Stratis inc., à l’exception des marteaux piqueurs à air ou électrique.
[36] Le tribunal retient par conséquent qu’il existe des divergences importantes entre la déclaration solennelle du travailleur et la description d’emploi soumises à la CSST concernant tant la description des tâches que les outils utilisés chez Céleb Construction ltée et chez Construction Michel Stratis inc. En l’absence d’explications permettant de réconcilier ou de comprendre ces divergences, le tribunal estime que l’employeur n’a pas démontré, par une preuve prépondérante, que le travailleur était exposé à un danger plus important chez d’autres employeurs.
[37] Dans ces circonstances, l’employeur n’a pas démontré qu’il a droit à une réduction supplémentaire du pourcentage d’imputation fondé sur l’importance du danger auquel un travailleur est exposé, comme le prévoit le second article de l’article 328 de la loi.
- Constructions Michel Stratis inc., 2014 QCCLP 2871 (CanLII)
- L’employeur doit établir obligatoirement les deux critères, un seul n’est pas suffisant :
(1) une preuve de la durée du travail occupé chez chacun des employeurs;
(2) une preuve de l’importance du danger sur chacun d’entre eux :
- En l’absence de la preuve sur l’importance du danger, le tribunal ne peut pas s’en remettre au seul critère de la durée de l’exposition, l’article 328 (2) Latmp ne s’applique pas.
Un extrait d’un jugement :
[20] La preuve s’avère non pas prépondérante, mais nettement insuffisante au soutien de l’allégation de l’employeur voulant que le danger auquel le travailleur a été exposé dans l’exercice de son métier d’électricien au fil des ans était de nature à engendrer sa surdité professionnelle au sens de l’article 328 de la loi. Ce dernier exige la démonstration de l’importance du danger que présentait le travail exécuté chez chacun des employeurs, en plus de la durée du travail occupé chez chacun d’entre eux. Une telle démonstration est d’autant plus impérative que la loi ne prévoit pas de présomption de danger rattachée à l’exercice d’un emploi[2]. La soussignée souscrit à ce courant jurisprudentiel que réitérait d’ailleurs, tout récemment, la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Marché St?Joseph et Alimentation Jean-Pierre Gariépy inc.[3].
[21] À défaut de preuve prépondérante démontrant l’importance du danger auquel le travailleur a été exposé dans le cadre du travail d’électricien chez tous les employeurs où il a exercé ce métier, les conditions nécessaires à l’application du deuxième alinéa de l’article 328 de la loi ne sont pas rencontrées.
- Groupe Pro-Fab inc., 2015 QCCLP 4142 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[40] Selon une certaine jurisprudence, en l’absence de preuve sur l’importance du danger que présentait le travail chez chacun des employeurs[6], le tribunal doit s’en remettre au seul critère de la durée de l’exposition.
[41] Le tribunal considère que s’il devait retenir cette approche cela aurait pour effet de dispenser les employeurs de faire la preuve de l’un des critères exigés au deuxième alinéa de l’article 328 soit celui de l’importance du danger que présentait le travail de boucher exercé chez chacun des employeurs du travailleur et d’écarter ce critère de manière à retenir le seul critère de la durée proportionnelle du travail chez chacun des employeurs.
[42] Ainsi, comme dans l’affaire Mines Richmont inc. (Div. Beaufor)[7], c’est sur la base des informations contenues au dossier que le tribunal doit disposer des contestations dont il est saisi.
[43] Au soutien de son argumentation, maître Samson, représentante de Marché St-Joseph, invoque l’affaire Super Marché Laplante inc.[8] dans laquelle la Commission des lésions professionnelles considéra que le travailleur, qui a occupé un emploi de boucher chez plusieurs employeurs pendant 27 années au cours desquelles il avait effectué des mouvements à répétition des poignets et des coudes, avait exercé un travail d’égale importance chez chacun de ses employeurs. Dans les circonstances, la Commission des lésions professionnelles décida que le partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la maladie professionnelle devait être établi proportionnellement à la durée du travail pour chacun des employeurs du travailleur.
[44] Selon la jurisprudence[9], la preuve du travail de nature à engendrer une maladie professionnelle exige une preuve détaillée démontrant que les gestes effectués et les facteurs de risques de développer la maladie chez les autres employeurs sont aussi de nature à engendrer la maladie professionnelle. La preuve d’un titre d’emploi n’est pas suffisante en soit. Le simple dépôt du curriculum vitae du travailleur est aussi insuffisant en soi pour établir que les emplois exercés chez d’autres employeurs étaient de nature à engendrer la maladie professionnelle.
[45] Dans l’affaire Les Spécialités Prodal (1975) ltée[10], la Commission des lésions professionnelles décida que le dépôt du curriculum vitae du travailleur ne suffisait pas pour faire la preuve de la nature des tâches exercées chez les employeurs où il avait exercé le métier de boucher compte tenu que durant sa vie active sur le marché du travail entre 1979 et 2004, le travailleur avait exercé d’autres tâches notamment lorsqu’il était copropriétaire d’une épicerie et à gérer des employés, fait des commandes, vérifier des prix. Bref, le travailleur avait fait d’autres tâches que celles d’un boucher.
[…]
[56] La preuve au dossier ne démontre pas quel était l’environnement de travail ni les conditions de travail chez chacun de ces employeurs ainsi que les autres employeurs depuis 2004. La preuve au dossier ne permet pas de savoir si le travailleur travaillait au comptoir pour servir la clientèle ou encore dans un réfrigérateur, s’il portait un gant protecteur ou non, s’il avait de l’aide ou pas, s’il travaillait seul ou avec des collègues.
[…]
[59] Dans l’affaire Provigo Distribution inc.[11], la Commission des lésions professionnelles était saisie d’une demande de partage du coût de l’imputation d’une maladie professionnelle soit un syndrome du canal carpien bilatéral d’un travailleur qui exerçait le métier de boucher chez plusieurs employeurs. Comme l’a énoncée la Commission des lésions professionnelles dans cette affaire, l’article 328 de la loi exige la démonstration de l’importance du danger que présentait le travail exécuté chez chacun des employeurs, autrement cela aurait pour effet de dispenser les employeurs de faire cette preuve. À cet effet, la Commission des lésions professionnelles s’exprime de la manière suivante.
[34] Si le législateur avait dit que la preuve de l’exercice d’emplois similaires et comparables suffisait pour mener à un partage de coûts en proportion du temps travaillé, il n’aurait pas parlé de « l’importance du danger » du travail chez chaque employeur.
[35] La jurisprudence invoquée par l’employeur pour obtenir un partage de coûts paraît permettre aux employeurs de ne pas avoir à présenter quelque preuve que ce soit de « l’importance du danger » chez les différents employeurs. Cette jurisprudence semble reconnaître que la similarité dans les emplois est suffisante et implique qu’il y a la même importance du danger.
[36] Le soussigné ne partage pas cette façon de voir. De par les termes mêmes de l’article 328 de la loi, il faut qu’il y ait preuve que chez chaque employeur il y ait danger de maladie professionnelle à cause de la façon d’exercer le travail. Lorsque le législateur parle de partage quand il y a « importance du danger » il ne faut pas dispenser de prouver ce danger. Si le législateur avait voulu faire dépendre le partage de coûts de la seule similitude des emplois occupés chez différents employeurs, il n’aurait pas parlé de risques et de dangers et se serait limité à ne parler que de proportion suivant le temps passé chez chacun. Le législateur n’a pas parlé pour rien dire quand il a parlé d’existence de risques chez les employeurs antérieurs.
[37] La loi ne prévoit pas de présomption de danger rattachée à l’exercice d’un emploi, il y a obligation de faire la preuve de l’existence d’un danger.
[64] Le tribunal retient que le travailleur a occupé un tel travail de boucher depuis l’âge de 15 ans, soit pendant plus de 38 ans. Toutefois, afin de bénéficier de l’application du partage du coût des prestations reliées à une maladie professionnelle, l’article 328 de la loi exige la preuve de l’importance du danger que présentait ce travail de boucher chez chacun de ces employeurs en plus de la preuve de la durée de ce travail occupé chez chacun de ces employeurs.
[65] Bien que la preuve démontre que le travailleur a exercé le métier de boucher soit « un tel métier » depuis l’âge de 15 ans, elle n’établit pas de manière prépondérante l’importance du danger que présentait ce travail chez chacun des employeurs par rapport à la maladie professionnelle du travailleur, à savoir un syndrome du canal carpien bilatéral.
[66] Ce faisant, le tribunal considère que la preuve est nettement incomplète et insuffisante pour retenir l’allégation des employeurs voulant que le danger auquel le travailleur a été exposé dans le cadre de l’exercice de son métier de boucher chez tous les employeurs où il a exercé ce métier, était d’égale importance.
[67] Après examen et analyse de l’ensemble de la preuve, la Commission des lésions professionnelles conclut que les employeurs n’ont pas assumé le fardeau de preuve exigé par le deuxième alinéa l’article 328 de la loi.
- Marché St-Joseph et Alimentation Jean-Pierre Gariépy inc., 2015 QCCLP 3833 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[26] Certes, lorsqu’il y a absence d’une preuve prépondérante permettant d’évaluer adéquatement l’importance du danger, on ne peut s’en remettre qu’à la durée de l’exposition[3].
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 1289 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[36] Puisque la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la preuve ne contient pas de données fiables pour déterminer l’importance de danger d’un employeur à l’autre, dès lors, la règle de la proportionnalité par rapport au temps travaillé chez chacun des employeurs demeure la façon la plus équitable de procéder au partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur.
- Thermofin, 2011 QCCLP 6575 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[27] En l’absence de preuve contraire, on peut présumer qu’en présence d’un même travail, effectué chez plusieurs employeurs, le danger de développer une maladie professionnelle est d’une égale importance chez l’un et l’autre des employeurs et qu’il ne reste qu’à considérer la durée du travail effectué chez chacun d’eux[8].
- Installations électriques LH ltée, 2014 QCCLP 4735 (CanLII)
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Un extrait d’un jugement :
[30] Le tribunal est d’avis que dans les décisions précédentes, la Commission des lésions professionnelles s’est méprise sur l’interprétation à donner à l’expression : « période de latence ». En médecine, la période de latence désigne « la période sans symptômes cliniques entre l'exposition d'un tissu biologique à un agent pathogène et la réponse du tissu ».
- CHSLD Centre-Ville St-Charles-Borromée, 2012 QCCLP 462 (CanLII)
Absence de preuve :
Un extrait d’un jugement :
[46] En ce qui concerne le deuxième argument plaidé, soit que l’emploi occupé chez l’employeur ne peut avoir contribué à la maladie professionnelle puisqu’il se situe à la limite de la période de latence qui est, dans le cas de l’amiantose, de 20 à 40 ans, le tribunal rejette cet argument pour le même motif, soit l’absence totale de preuve à cet égard.
[47] Ainsi, pour prouver que la période de latence de l’amiantose est de 20 à 40 ans, la représentante ne soumet aucune preuve d’expert, ni aucune littérature ou opinion médicale.
[48] Elle s’appuie simplement sur les trois mêmes décisions précitées concernant le même employeur, ainsi que sur une autre décision plus récente qui fait référence à huit autres décisions[11], pour un total de 12 décisions.
[49] Or, la durée de cette période de latence ne fait pas partie de la connaissance d’office de la Commission des lésions professionnelles. Une partie ne peut donc s’exempter de fournir une preuve médicale, en se référant à la preuve faite dans des dossiers concernant d’autres travailleurs. C’est la raison pour laquelle une preuve a été soumise à la Commission des lésions professionnelles à l’égard de cette période de latence, dans chacune des décisions invoquées par la représentante.
[50] Encore une fois, l’employeur ne saurait pallier l’absence de preuve en fournissant des décisions qui font état d’extraits de la documentation médicale qui avait alors été soumise à la Commission des lésions professionnelles. Plaider n’équivaut pas à prouver [12].
[51] Au surplus, contrairement aux prétentions de la représentante, il ne semble pas certain qu’il soit acquis, dans la littérature médicale, que la période de latence pour l’amiantose soit de 20 à 40 ans, ni que notre jurisprudence soit unanime quant à la seule imputation des employeurs pour lesquels un travailleur a travaillé pendant cette période de latence [13].
- Arno Électrique ltée, 2012 QCCLP 6001 (CanLII)
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Un extrait d’un jugement :
[17] Le 6 mars 2014, la CSST refuse d’accorder un partage de l’imputation à l’employeur. Dans ses notes d’analyse, la CSST fait état d’une orientation qui prévoit que l’imputation est effectuée en fonction de l’apparition des symptômes reliés à la maladie professionnelle objectivée par un suivi médical. L’employeur demande la révision administrative de cette décision, laquelle est conformée le 26 mai 2014, d’où l’objet du présent litige.
[…]
[22] Le tribunal est d’avis que la méthode d’analyse utilisée par la CSST et ses conditions d’application ne sont pas conformes au texte de l’article 328 de la loi.
[23] En effet, l’article 328 de la loi précise clairement que la CSST impute le coût des prestations à tous les employeurs pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle, et ce, proportionnellement à la durée de ce travail pour chacun de ces employeurs et selon l’importance du danger que présente ce travail pour chacun d’eux.[2]
[24] Dans son analyse, la CSST doit tenir compte de toute l’expérience de travail de la travailleuse en tant que plâtrière pour toute la période durant laquelle elle a exercé ce travail réputé et admis par la CSST comme étant de nature à engendrer sa maladie.
[25] La CSST applique sa politique d’orientation en vertu de laquelle elle impute l’ensemble des coûts de la maladie professionnelle due à des mouvements répétitifs chez l’employeur chez qui la symptomatologie s’est développée et pour laquelle un diagnostic a été objectivé.
[26] Or, la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles est claire que le tribunal n’est nullement lié aux politiques de la CSST. En outre, cette politique est contraire à l’article 328 de la loi[3].
[27] Le tribunal est d’avis que l’article 328 de la loi ne fait pas référence à la date de l’apparition de la symptomatologie comme étant le début de la période qui doit être retenue pour la répartition des coûts dans un dossier de maladie professionnelle et de l’octroi de l’imputation en découlant.
[…]
[29] Le présent tribunal réitère, conformément à sa jurisprudence constante sur cette question[4], que c’est l’ensemble de l’expérience professionnelle de la travailleuse qui doit servir de base de calcul pour déterminer la proportion devant être imputée à chaque employeur chez lequel la travailleuse a exercé l’emploi à l’origine de sa maladie professionnelle et dans des conditions similaires, le tout en fonction de la durée de ce travail chez chacun de ses employeurs.
- Marois & Fils, 2015 QCCLP 3538 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[50] Cependant, elle invoque une politique interne pour refuser d’appliquer le deuxième alinéa de l’article 328 de la loi. Avec respect, la Commission des lésions professionnelles estime qu’une politique interne ne peut primer sur le texte de la loi. Or, la loi est claire. Elle prévoit que l’exercice du travail à l’origine de la maladie professionnelle chez d’autres employeurs permet, à certaines conditions, un partage des coûts entre ces employeurs. Cette disposition législative oblige donc la CSST à se pencher sur le travail exercé par le travailleur victime d’une maladie professionnelle et sur la participation du travail accompli chez d’autres employeurs dans l’apparition de cette maladie. Cette analyse n’est pas optionnelle ou discrétionnaire et elle ne peut être écartée par une politique interne. Bien entendu, dans le cadre de cette analyse, la CSST peut en arriver à la conclusion que seul le travail fait chez le dernier employeur est de nature à engendrer la maladie diagnostiquée. Mais l’analyse doit être faite ce qui n’est manifestement pas le cas dans le présent dossier.
- Ailes de la Mode, C.L.P. 179338-71-0202, 16 juillet 2002
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Un extrait d’un jugement :
[37] En effet, dans l’affaire Entreprises Michel Duchesneau[9], la Commission des lésions professionnelles indique que la simple preuve d’emploi occupé antérieurement, dont le titre est identique ou similaire, est insuffisante puisque, en vertu de l’article 328 de la loi, il doit être établi, de façon prépondérante, que le travail réellement exercé chez chacun des employeurs en était un de nature à engendrer la maladie professionnelle en cause :
[20] Il y a donc lieu d’identifier les employeurs chez qui le travailleur a exercé des tâches de nature à engendrer une tendinite du poignet droit. Cette preuve doit être concrète et non seulement théorique ou approximative.
[21] La preuve ne doit pas seulement se baser sur un type d’emploi générique. Elle doit plutôt démontrer les gestes requis qui, en pratique, chez les autres employeurs, seraient de nature à engendrer la maladie diagnostiquée3.
[22] L’employeur doit démontrer, parmi le nombre d’heures travaillées, la proportion de ces heures consacrées à effectuer des mouvements de nature à causer la lésion diagnostiquée4.
[23] En d’autres termes, il revient à l’employeur de prouver que les emplois antérieurs du travailleur étaient de nature à contribuer à sa maladie professionnelle5.
[24] L’employeur doit donc faire cette démonstration au moyen d’une preuve concrète des tâches exercées chez les autres employeurs et de simples allégations ou hypothèses ne sont pas suffisantes6.
[25] La simple preuve d’un titre d’emploi similaire ne suffit pas mais encore faut-il que la preuve démontre que les gestes requis pour effectuer les tâches chez les autres employeurs sont également de nature à engendrer la maladie diagnostiquée.
[26] Or, la preuve est totalement absente à cet effet. L’employeur et le travailleur décrivent les tâches effectuées par le travailleur chez l’employeur en cause. Cependant, aucune description de tâches n’existe au dossier concernant les employeurs antérieurs.
___________
3 W. Laframboise ltée, CLP 233609-71-0405, 25 janvier 2005, C. Racine; voir aussi Corne d’abondance Ancienne-Lorette, 121647-32-9908, 25 octobre 1999, M.-A. Jobidon;
4 Entretien Industriel Etchemin inc. et CSST, CLP 127818-03B-9912, 5 juillet 2000, M. Cusson révision rejetée 18 janvier 2001, G. Tardif.
5 Produits forestiers LMC inc. et CSST, CLP 89526-01-9708, 19 juin 1998, R. Ouellet
6 Thetford armature inc. et Moteurs électriques Gosselin inc., 185894-05-0206, 6 décembre 2002, M. Allard
- Soucy Belgen inc., 2015 QCCLP 708 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[17] En ce qui concerne l’argument concernant l’insuffisance de l’analyse faite par la CSST, le tribunal note que cette dernière a transmis à l’employeur le formulaire de réclamation rempli par le travailleur, le 25 janvier 2011, invitant l’employeur à lui faire part de toute donnée inexacte. L’employeur n’a pas donné suite.
[18] Or, dans ce formulaire, le travailleur avait inscrit le nom de chacun de ses employeurs, la période de temps à l’emploi de chacun et, sous le titre description des tâches, la seule mention « électricien en construction ».
[19] La représentante de l’employeur argue qu’il revient à la CSST de vérifier à quels dangers était exposé le travailleur ou de demander plus de détails sur les tâches réellement exercées, afin de se conformer à l’article 328 de la loi.
[20] Avec respect, le tribunal ne partage pas cette position. […]
[…]
[31] Ainsi, il est courant que la CSST n’ait pas suffisamment d’information concernant l’importance du danger chez les employeurs : elle s’en remet alors au seul critère à sa disposition, la durée du travail chez l’employeur. Il en est de même pour la Commission des lésions professionnelles [4].
[…]
[33] En l’espèce, l’employeur doit donc démontrer que le travailleur n’a pas exercé, alors qu’il était à son emploi, un travail de nature à engendrer la maladie professionnelle dont il est atteint, soit une amiantose.
[34] Or, la représentante de l’employeur prétend démontrer que le travailleur n’a pu être exposé à de l’amiante chez l’employeur, en soumettant trois décisions concernant le même employeur, par lesquelles il a été désimputé dans le cas de travailleurs, porteurs eux aussi d’amiantose et exerçant le même métier que le travailleur, soit électricien[6].
[35] Elle demande que les données fournies par ces décisions soient appliquées en l’espèce, l’employeur se trouvant dans l’impossibilité de fournir quelque preuve que ce soit concernant l’exposition du travailleur, sa période d’emploi datant d’il y a trop longtemps.
[36] Le tribunal ne peut acquiescer à cette façon de procéder, laquelle consiste à fournir de la preuve par l’intermédiaire de décisions. Ainsi, à moins que les faits qu’on veut démontrer soient des faits dont le tribunal a connaissance d’office ou qui sont à la connaissance du public en général, ce genre de preuve, qui n’en n’est pas vraiment une, n’a guère de valeur probante.
[37] Quant à l’impossibilité de présenter une preuve factuelle invoquée par la représentante, le tribunal constate que, dans ces trois décisions, l’employeur a établi, par preuve prépondérante, la nature des travaux effectués par l’électricien concerné, et ce, pour des périodes de travail datant d’encore plus loin dans le temps. L’employeur a donc, dans chaque cas, démontré que le travailleur n’avait pas été exposé à de l’amiante pendant son emploi. Il ne semble donc pas impossible de présenter ce genre de preuve, contrairement à ce que prétend la représentante de l’employeur.
[…]
[40] De plus, la représentante affirme également que les tâches d’électricien sont toutes identiques puisqu’il s’agit du même métier, sans en faire la preuve.
[41] Pourtant, les décisions qu’elle a elle-même déposées font état de tâches différentes pour chacun des électriciens concernés. Ainsi, dans la première décision, le travailleur effectuait le tirage de câbles électriques dans une aluminerie en construction[8]; dans la deuxième, le travailleur installait des équipement dans un nouvel établissement où il n’y avait aucune présence d’amiante [9]; et dans la troisième décision, le travailleur était affecté à trois projets de grande envergure alors que le détail des tâches qu’il a alors effectuées pour chacun de ces projets, a été fourni au tribunal par l’employeur [10].
[42] Bref, la représentante de l’employeur voudrait que le tribunal infère de ces trois décisions que le travailleur, en l’espèce, n’a pas été exposé à de l’amiante, alors qu’elle ne fournit aucun détail sur les tâches effectuées, les endroits où elles ont été effectuées et l’absence d’amiante à ces endroits.
[43] D’abord, dans chacune des décisions sur lesquelles elle s’appuie, l’employeur a fourni une preuve précise, documentaire et testimoniale, permettant au tribunal de conclure en l’absence d’amiante dans l’emploi occupé par le travailleur concerné.
[44] Ensuite, et motif plus important, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’employeur ne peut pallier l’absence totale de preuve par la preuve faite dans d’autres instances puisque cette preuve concerne d’autres travailleurs, fussent-ils électriciens et atteints eux aussi d’une maladie professionnelle due à l’amiante. Dans les circonstances, la preuve inférée de la jurisprudence ne peut avoir de valeur probante.
[45] En l’absence totale de preuve, l’argument concernant l’absence d’exposition à l’amiante est donc aussi rejeté.
- Arno Électrique ltée, 2012 QCCLP 6001 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[23] L’employeur doit démontrer, par une preuve prépondérante, ce qu’il allègue soit, dans le présent cas, que le travail exercé par le travailleur n’était pas de nature à engendrer la maladie. La Commission des lésions professionnelles n’a pas à aviser un employeur que sa preuve est insuffisante.
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 419 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[18] À la lecture des décisions déposées par l’employeur et de celles consultées par la Commission des lésions professionnelles, force est de constater que: l’employeur dépose un affidavit qui, dans la très grande majorité des cas, est en tout point semblable à celui déposé dans la présente affaire.
[19] La Commission des lésions professionnelles ne pouvant interroger le travailleur, est d’avis qu’il n’y a pas lieu d’accorder une grande force probante à une telle preuve car elle ne peut apprécier la portée réelle de ce que le travailleur déclare dans l’affidavit.
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 419 (CanLII)
Un 2e extrait d’un jugement :
[24] CONSIDÉRANT que dans la décision Giroux & Lessard ltée[3], la Commission des lésions professionnelles considère qu’un affidavit présente peu de valeur probante lorsqu’il contient des contradictions par rapport à des déclarations antérieures du travailleur :
[14] Comme preuve au soutien de ses prétentions, l’employeur dépose un affidavit signé du travailleur.
[15] Toutefois, le tribunal ne peut retenir cet affidavit comme ayant quelque force probante que ce soit.
[16] En effet, cette déclaration contient des contradictions face à d’autres déclarations faites par le travailleur.
- Construction Thorco inc., 2015 QCCLP 3764 (CanLII)
Un 3e extrait d’un jugement :
[41] La soussignée estime que l’étonnante similitude des faits mise en preuve par affidavits dans diverses causes impliquant l’employeur ne peut relever de la simple coïncidence et soulève de sérieux questionnements quant à la valeur probante à accorder à une telle preuve.
[42] D’ailleurs, très récemment la Commission des lésions professionnelles[14] s’est prononcée sur la valeur probante d’un affidavit fort similaire à celui déposé en l’instance. Elle conclut que l’affidavit semble, de toute évidence, avoir été préparé par les représentants des employeurs et qu’il ne s’agissait pas d’un témoignage franc, direct et spontané du travailleur. Plus particulièrement, elle écrit : […]
[43] La soussignée abonde dans le même sens.
[44] L’affidavit du travailleur en l’instance, qui réfère en annexe aux fiches signalétiques des protecteurs auditifs utilisés, a vraisemblablement été préparé par les représentants de l’employeur.
[45] Certaines affirmations contenues dans cet affidavit, qui vaut témoignage, sont ni plus ni moins un calque d’affirmations se retrouvant dans des affidavits produits dans d’autres dossiers de la Commission des lésions professionnelles impliquant le même employeur dans le cadre de mêmes litiges.
[46] Considérant l’ensemble de ces éléments, la Commission des lésions professionnelles conclut qu’il ne s’agit pas d’un témoignage franc, direct et spontané de la part du travailleur, mais plutôt d’un témoignage partiel et dirigé dans le but précis de permettre à l’employeur d’obtenir gain de cause. Ainsi, le tribunal accorde très peu de valeur probante à cette preuve.
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 213 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[36] Puisque la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la preuve ne contient pas de données fiables pour déterminer l’importance de danger d’un employeur à l’autre, dès lors, la règle de la proportionnalité par rapport au temps travaillé chez chacun des employeurs demeure la façon la plus équitable de procéder au partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur.
- Thermofin, 2011 QCCLP 6575 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[47] L’employeur n’ayant pas en main toute l’information qui lui permettrait d’étayer sa demande, la CSST n’ayant pas demandé la liste des employeurs précédents, il convient de retourner le dossier à la CSST afin que les démarches prévues par la loi puissent être complétées. De plus, une éventuelle décision, qui imputerait le coût des prestations à d’autres employeurs, affecterait leur droit et ils doivent avoir l’opportunité d’en demander la révision s’ils ont des motifs de contestation à faire valoir. C’est le deuxième motif pour lequel le Tribunal considère qu’il doit retourner le dossier à la CSST afin qu’elle complète son analyse en tenant compte des critères exposés à la présente décision et qu’elle rende les décisions appropriées.
[48] En cette matière, le soussigné partage les motifs exprimés par son collègue dans l’affaire Système intérieur JPR, précitée, quant aux modalités du retour du dossier à la CSST.
[30] L’employeur a indiqué qu’il souhaitait démontrer que la travailleuse avait exercé le même travail de plâtrière ou tireuse de joints chez d’autres employeurs. Il pourra alors déposer au dossier les documents usuels émanant d’organismes administratifs, telles la Régie des rentes et la Commission de la construction. Mais rappelons que c’est d’abord le mandat de la CSST de rechercher les faits pertinents à l’imputation du coût des prestations.
[…]
[32] La Commission des lésions professionnelles rappelle, une fois de plus, que ce n’est pas uniquement l’emploi exercé au moment de l’apparition des douleurs qui doit être pris en compte dans l’analyse requise par l’article 328 de la loi. Cet article exige de déterminer si le travailleur a exercé un tel travail pour un5 ou pour plus d’un employeur6. Pour cela, la CSST doit rechercher la réponse à cette question par une investigation pertinente. Dans la mesure où il y a plus d’un employeur, le partage s’effectue proportionnellement en tenant compte de la durée d’exposition chez chacun des employeurs et à l’importance du danger. Le tribunal est donc d’avis qu’il y a lieu de retourner le dossier à la CSST pour qu’elle reprenne l’analyse de l’imputation des coûts.
5 Article 328 1er alinéa.
6 Article 328 2e alinéa.
[49] Pour ces motifs, le dossier du travailleur est retourné à la CSST afin que les démarches soient complétées et qu’une décision soit rendue sur la requête de l’employeur.
- Commission scolaire de Montréal, 2015 QCCLP 2935 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[23] La CSST semble avoir appliqué l'article 328 de la loi sans une analyse approfondie des sites où le travailleur a œuvré pendant 30 ans. Selon l'employeur, la CSST aurait plutôt dû s’enquérir, par tous les moyens légaux qu’elle juge les meilleurs, de la réalité de la situation. Il ne faut pas oublier que la Loi sur la justice administrative[5] prévoit que « Les procédures menant à une décision individuelle prise à l'égard d'un administré par l'Administration gouvernementale, en application des normes prescrites par la loi, sont conduites dans le respect du devoir d'agir équitablement ».
[24] La CSST devait en effet vérifier si le travail effectué chez chacun des employeurs identifiés par le travailleur était également de nature à engendrer la maladie pour laquelle il réclame et, dans l’affirmative, elle doit analyser la durée de ce travail et le niveau de danger retrouvé chez chacun des employeurs. Aux termes de cette analyse, la CSST peut alors en arriver à la conclusion que seul le travail fait chez le dernier employeur est de nature à engendrer la maladie professionnelle et, dès lors, refuser la demande de partage du coût[6]. Une telle analyse n’a pas été faite dans le présent dossier. L’eût-elle été, la décision de la CSST aurait pu être différente. N’imputer que le dernier employeur va à l’encontre de l'article 328 de la loi et de l’obligation faite à la CSST de rendre ses décisions suivant l’équité, d’après le mérite réel et la justice du cas[7].
- Services environnementaux Delsan-AIM inc., 2014 QCCLP 3216 (CanLII)
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Élément à considérer - exemple :
- Démontrer que le niveau d’exposition « susceptible de causer une atteinte neurosensorielle » dans l’entreprise n’a pas pu causer la lésion.
- Des mesures du bruit dans l’entreprise des endroits où le travailleur a travaillé, des sources de bruit environnantes, du temps d’exposition, du niveau de bruit auquel il a été soumis, la date précises...
- Le degré et le niveau de bruit réel dans les lieux de travail, l’équipement, les outils.
- Examiner si le travailleur présentait déjà des problèmes d’audition avant de travailler pour l’employeur.
(…)
Élément de preuve insuffisant – exemple :
- Le respect de la norme réglementaire n’est pas suffisant, il faut absolument démontrer que le niveau d’exposition « susceptible de causer une atteinte neurosensorielle » dans l’entreprise n’a pas pu causer la lésion.
- Les autres travailleurs de l’entreprise n’ont pas rapporté de problèmes de surdité.
- Le dépôt seulement de jugements dans lesquelles une telle preuve de bruit a été déposée et qui a permis à l’employeur d’avoir gain de cause.
- Un employeur qui demande de procéder sur dossier, sans audience.
- La simple affirmation de l’employeur, selon laquelle le travailleur était moins ou peu exposé au bruit puisqu’il portait un équipement de protection individuelle.
(…)
Protection auditif - exemple :
- L’allégation du port obligatoire de protecteurs auditifs et la fiche signalétique des équipements de protection ne sont pas suffisants, il faut démontrer son efficacité par rapport au niveau de bruit réel dans les lieux de travail et la façon particulière, ceux auxquels étaient soumis le travailleur.
- La preuve doit permettre de situer dans le temps et le lieu, de manière précise, les circonstances d’exposition au bruit, de même que la période durant laquelle le travailleur a effectivement porté ses protections auditives, ainsi que de leur efficacité, preuve qui n’a pas été présentée au tribunal. De plus, il n’est pas possible d’établir le degré d’exposition au bruit ni le niveau d’exposition.
- La façon du travailleur de les porter et la durée d’utilisation par jour.
- La simple affirmation de l’employeur, selon laquelle le travailleur était moins ou peu exposé au bruit puisqu’il portait un équipement de protection individuelle, pas suffisant.
(…)
Cabine de protection :
- la nature, le type et le modèle de l’équipement.
- La durée d’utilisation par jour.
- Le travailleur laissait la porte ouverte ou fermée.
(…)
Élément de preuve – exemple :
- L’audiogramme
- La fiche signalétique des équipements de protection.
- Les activités personnelles du travailleur (ex : motocyclette, la chasse au fusil, le sciage de bois avec une tronçonneuse, de l’écoute de la musique dans un lecteur mp3, bref des activités avec des bruits excessifs).
- Des mesures sonométriques des endroits les plus bruyants de l’usine, de préférence sur des périodes de plusieurs années.
- Le témoignage du travailleur, un affidavit (un serment) n’est pas suffisant.
- Politique de l’entreprise qui obligent les employés qui entrent et travaillent dans l’usine du port obligatoire des protections auditives;
- Les affiches signalétiques présentes à l’entrée de l’usine et sur un mur de l’usine indiquant obligation de porter des protections auditives.
- Une formation individuelle sur le port de protections auditives en plus d’une rencontre de sensibilisation annuelle;
(…)
Emploi antérieur :
- Le type d’emploi occupé.
- Le type d’équipement ou des outils (similaire ou différent, sa fiche technique, le niveau de bruit, le modèle).
- Le type de protection.
- La méthode de travail.
- L’environnement où s’effectuaient ses tâches.
- La proportion des heures où il était exposé aux bruits.
- La feuille de temps.
(…)
. Règlement sur la santé et la sécurité du travail
Un extrait d’un jugement :
[37] La Commission des lésions professionnelles s’est déjà prononcée[3] en ces termes dans un dossier semblable à la présente affaire :
[35] C’est à juste titre que la procureure de Chemins de fer nationaux du Canada rappelle que selon la jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles, il est admis qu’une surdité d’origine professionnelle ne peut s’aggraver en l’absence d’exposition au bruit en milieu de travail3.
[36] Ainsi, si une aggravation de la surdité d’origine professionnelle ne peut être reconnue que s’il y a eu exposition à des bruits de nature à engendrer la maladie, il faut conclure que seuls les employeurs chez qui l’aggravation s’est développée doivent être imputés du coût de la réclamation pour l’aggravation de la surdité professionnelle, et ce, conformément à l’article 328 de la Loi.
[37] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’aggravation de la surdité professionnelle, quant à l’imputation du coût des prestations y reliées, doit s’analyser d’une manière différente de d’autres types de lésion professionnelle. Certains types de lésion professionnelle peuvent, de par leur nature, être aggravés même en dehors de tout contexte de travail. Prenons l’exemple de la hernie discale, reconnue à titre de lésion professionnelle et pour laquelle le travailleur ou la travailleuse subit une aggravation en dehors de tout contexte de travail. La preuve peut alors permettre à la CSST de relier directement cette aggravation à la lésion initialement reconnue. L'employeur chez qui la lésion initiale est survenue, se verra imputer les coûts reliés à l’aggravation en vertu du principe général de l’article 326 de la Loi.
[38] Cette logique ne s’applique pas au cas d’aggravation d’une surdité professionnelle où l’exposition au bruit en milieu de travail est nécessaire à sa reconnaissance. [sic]
[Nos soulignements]
___________________
3 Supra, note 2.
[38] En application des principes établis par la jurisprudence auxquels la soussignée adhère, le tribunal retient que l’employeur a déjà été imputé de sa quote-part des prestations reliées à la surdité professionnelle au moment de la reconnaissance initiale de la surdité professionnelle.
[39] Il appert de la preuve que la surdité du travailleur s’est détériorée après 2005, période durant laquelle il était à l’emploi d’autres employeurs pour lesquels il a été démontré qu’il était exposé à des bruits susceptibles de causer la maladie puisque la CSST a reconnu l’existence d’une rechute, récidive ou aggravation à titre de lésion professionnelle.
[40] La preuve prépondérante permet toutefois de conclure que l’aggravation de la surdité notée depuis l’évaluation de 2005 ne peut provenir d’une exposition au bruit alors que le travailleur était à l’emploi de l’employeur puisqu’il n’y travaillait plus depuis le mois de décembre 1993.
[41] Le tribunal retient au surplus que la quote-part de l’employeur dans la surdité professionnelle a déjà été établie dans le cadre de la première décision d’imputation.
[42] Ceci étant, partant du principe que dans le cas d’une aggravation de surdité professionnelle, seuls les employeurs chez qui cette aggravation s’est développée doivent être imputés du coût de la réclamation, le tribunal conclut que la preuve prépondérante démontre que l’employeur n’est pas impliqué dans l’aggravation qui a été reconnue à compter du 26 juin 2012 et qu’il n’y a pas lieu, en conséquence, de l’imputer de quelque coût que ce soit.
- Chemins de fer nationaux du Canada, 2015 QCCLP 3736 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[32] […]. Par ailleurs, il est connu que la surdité neurosensorielle ne progresse pas lorsque l’exposition aux bruits excessifs cesse[2]. […]
- GDS Division Pointe-à-la-Croix, 2015 QCCLP 1283 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[19] L’historique des employeurs à la Régie de rentes du Québeccontenue au dossier du tribunal révèle que le travailleur a travaillé pour Scapa Canada inc. de 1974 à 1999, soit pour une période de 25ans.
[20] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’emploi exercé chez l’employeur Citerne Almac inc. n’a pas contribué au développement de sa maladie professionnelle de surdité.
[21] D’abord, il retient que l’importance et la durée de son exposition à des bruits continus et d’impacts pendant une période de huit heures par jour pendant 25 ansconstitue une exposition importante en terme d’intensité et de durée d’exposition et que cette exposition est susceptible à elle seule d’occasionnerla surdité professionnelle diagnostiquée chez le travailleur.
[22] Il constate de plus que l’emploi de magasinier exercé pour Citerne Almac inc., puis de journalier àl’approvisionnement pendant une période d’un an fait en sorte que le travailleur, s’il a été exposé aux bruits de perceuses et de polisseuses, n’a été exposé que pendant une courte période d’un an, pendant une courte période de temps par jour puisque son travail l’amenait à travailler principalement dans le magasin de pièces.
[23] Le tribunal retient à cet égard que l’emploi de tisserand chez Scapa Canada inc. est de loin celui où le travailleur a été le plus exposé à un bruit continu et à des bruitsd’impacts importants tant en intensité qu’en durée.
[24] Finalement, le tribunal retient le témoignage du travailleur à l’effet qu’il présentait déjà des problèmes d’audition avant de travailler pour l’employeur Citerne Almac inc.
[25] La Commission des lésions professionnelles est par conséquent d’avis que l’employeur Citerne Almac inc. ne doit pas êtreimputé du cout des prestations reliées à la surdité professionnelle de monsieur Yves Boucher du 22 décembre 2011.
- Citerne Almac inc., 2013 QCCLP 6554 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[32] […]. Par ailleurs, il est connu que la surdité neurosensorielle ne progresse paslorsque l’exposition aux bruits excessifs cesse[2]. […]
- GDS Division Pointe-à-la-Croix, 2015 QCCLP 1283 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[45] L’employeur prétend d’autre part qu’il ne peut être tenu de démontrer les niveaux de bruit auxquels était soumis le travailleur chez les autres employeurs pour lesquels il a exercé un travail, ni d’établir une comparaison des niveaux de bruit entre ceux prévalant chez ces employeurs et ceux provenant de l’entreprise en cause dans le présent dossier. En effet, l’employeur soutient qu’exiger une telle démonstration de sa part constituerait un fardeau de preuve trop exigeant et dépasserait celui requis pour faire droit à sa requête.
[46] Sur cette question, le tribunal souligne que dans la mesure où le présent employeur estime qu’il ne doit être tenu responsable d’aucune imputation, eu égard à la lésion professionnelle du travailleur, il peut être approprié de savoir si ce même travailleur a été exposé à des bruits excessifs ou élevés chez d’autres employeurs que celui en cause dans le présent débat. D’ailleurs, la CSST a fait cet exercice relativement à l’exposition au bruit chez les autres employeurs dans le cadre de sa décision d’imputation. Il s’agit là de l’application du second alinéa de l’article 328 de la loi qui prévoit que la CSST impute le coût des prestations à tous les employeurs pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle proportionnellement à la durée de ce travail pour chacun de ces employeurs et à l’importance du danger que présentait ce travail chez chacun de ces employeurs.
[…]
[50] Le juge administratif Martin[10] tient également ce raisonnement et s’exprime ainsi :
[36] Dans l’affaire Mécanique CNC 2002 inc.9, le tribunal souligne lors de son analyse de cette disposition qu’il doit se pencher sur le travail exercé par un travailleur victime d’une maladie professionnelle et sur la possible participation du travail accompli chez d’autres employeurs dans le développement de cette maladie. Le tribunal ajoute qu’en présence d’un même travail effectué chez deux employeurs, le danger de développer une maladie professionnelle est d’une égale importance chez l’un et l’autre des employeurs. Le tribunal doit alors considérer la durée du travail effectué chez chacun d’eux afin de statuer sur le pourcentage d’imputation des coûts.
[37] Dans l’affaire Entretien Paramex inc.10, le tribunal est d’avis qu’à défaut d’une preuve prépondérante lui permettant d’évaluer adéquatement l’importance du danger, il n’a d’autre choix que de s’en remettre au seul critère de la durée de l’exposition.
[38] Or dans le présent dossier, le tribunal est d’avis qu’il ne dispose pas d’une preuve prépondérante quant à l’importance du danger vécu par le travailleur dans le cadre de ses emplois entre 1966 et 2010.
________
9 C.L.P. 322547-02-0707, 15 mars 2008, C.-A. Ducharme
10 2011 QCCLP 5251 (CanLII); au même effet Ganotec Mécanique inc. et Ganotec inc., C.L.P. 407918?31?1004 et 407955-31-1004, 17 février 2011, S. Sénéchal
[51] Le procureur de l’employeur a déposé des décisions requête traitant de questions visant l’imputation en matière de surdité professionnelle à l’appui de sa requête. À ce titre, le soussigné souligne que ces décisions se distinguent du cas en présence pour diverses raisons.
[52] Dans le dossier Autobus Thomas inc.[11], la Commission des lésions professionnelles conclut que l’employeur en cause ne doit être imputé d’aucun coût au motif que la surdité du travailleur ne peut avoir été engendrée par le travail chez l’employeur, l’exposition moyenne au bruit étant inférieure à la norme de 90 dBA et le travailleur étant très peu exposé à des niveaux de bruit élevés. En outre, la preuve a démontré que le travail exercé chez d’autres employeurs pouvait être responsable de la maladie professionnelle. La preuve factuelle est sensiblement différente que dans le cas en litige au présent dossier alors qu’il n’a pas été établi que la faible exposition au bruit alléguée par l’employeur était identique pendant les nombreuses années où le travailleur a exercé son métier de mécanicien et d’autre part, dans le cas à l’étude, l’employeur n’a pas soumis de preuve quant aux niveaux sonores ou la dangerosité de l’exposition au bruit chez les autres employeurs visés par la maladie professionnelle du travailleur.
[…]
[54] L’employeur dépose également une décision rendue en 1998[13] qui traite principalement de l’admissibilité d’une maladie professionnelle en matière de surdité, bien que l’employeur avait aussi contesté une décision de la CSST portant sur la question de l’imputation. Encore ici, l’analyse de la preuve et la motivation de la décision de la Commission des lésions professionnelles reposent essentiellement sur la nature de la preuve requise concernant l’admissibilité de la lésion professionnelle. De plus, cette affaire est particulière dans la mesure où le travailleur en cause n’est pas partie à l’audience. Le soussigné rappelle que chaque dossier constitue un cas d’espèce et que les faits retrouvés à un dossier spécifique ne peuvent se substituer à un autre cas, particulièrement quand les faits allégués sont différents et que le dispositif d’une décision vise l’admissibilité d’une réclamation et non les questions relatives à l’imputation pour un employeur pour en faire valoir.
- Autobus du Village inc., 2013 QCCLP 308 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[16] Le 22 février 2013, l’employeur transmet une argumentation écrite à l’attention du tribunal alléguant qu’aucun coût en lien avec la maladie professionnelle du travailleur ne doit lui être imputé.
[17] Il ajoute que le travail de camionneur n’est pas sujet à engendrer une surdité professionnelle et dépose au soutien de cette affirmation une étude de bruit réalisée par la firme Décibel consultants inc. mandatée par l’entreprise Transport Kingsway inc. en janvier 2005.
[18] L’employeur allègue que Transport Kingsway inc. est une division de Transforce au même type que Transport TFI, 1, S.E.C. et qu’ils « utilisent le même type de camion ». Partant de là, il plaide que les conclusions de l’étude soumise devraient lui être applicables alors que celles-ci démontrent que les travailleurs sont exposés à des niveaux de bruit variant entre 67 et 86 dBA.
[19] De plus, l’employeur soutient que le travailleur travaillait en deçà de 16 heures par jour et que selon les niveaux de bruit retenus dans l’étude soumise, il lui était possible de travailler jusqu’à 16 heures par jour sans être exposé à un danger pour son audition.
[20] Au rapport de la firme Décibel Consultants inc., la méthodologie utilisée est décrite. Il s’agit en fait d’une étude de bruit effectuée directement sur deux travailleurs équipés de dosimètres intégrateurs, soit un appareil portatif installé à la ceinture.
[21] Les mesures sonores ont été obtenues entre le 22 novembre et le 15 décembre 2004 à la compagnie Transport Kingsway inc. située à Saint-Laurent.
[22] Une mesure a été prise pour chaque modèle de camion à l’intérieur de l’habitacle pendant que celui-ci circulait. Cinq modèles de camion ont été testés.
[23] En conclusion, les expositions sonores journalières des conducteurs pour la compagnie Transport Kingsway inc. ont été inférieures aux temps limites d’exposition du Règlement sur la santé et la sécurité du travail[2].
[24] L’employeur soumet d’ailleurs une décision rendue par la Commission des lésions professionnelles[3] et demande d’appliquer les principes qui y sont énoncés. La soussignée croit utile de reproduire le passage suivant :
[…]
[13] De l’avis de la Commission des lésions professionnelles la preuve démontre de manière prépondérante que, dans l’exercice de son emploi de camionneur pour l’employeur, le travailleur n’a pas été exposé à des bruits de nature à engendrer sa surdité.
[14] L’employeur a en effet déposé en preuve l’étude réalisée par Décibel consultant inc. en janvier 2005 pour son établissement et selon laquelle les niveaux de bruit auxquels ont été exposés ses camionneurs depuis cette époque ont été de 67 à 79 dBA pour 4 modèles de camion et de 86 dBA pour un seul modèle.
[15] Le Règlement sur la santé et la sécurité du travail2 autorise une dose de 87,1 dBA pour un temps d’exposition de 12 heures.
[16] En l’espèce, le travailleur conduisait son camion au plus 11 heures par jour dans l’exercice de son emploi pour l’employeur.
[17] Son exposition au bruit étant inférieure à la limite de 87,1 dBA fixée pour 12 heures et ce, à l’égard de tous les modèles de camion de l’employeur, et de beaucoup inférieure à cette limite pour 4 des 5 modèles de camion, la Commission des lésions professionnelles en vient à la conclusion que le travail du travailleur chez l’employeur n’était pas de nature à engendrer sa maladie professionnelle.
[18] Dès lors, aucun coût des prestations de la surdité professionnelle du travailleur ne doit être imputé à l’employeur. Il ne s’agit pas ici de remettre en cause l’origine professionnelle de la surdité du travailleur mais bien de déterminer qui doit assumer les coûts reliés à cette maladie professionnelle.
( Notes omises)
[31] C’est ce que l’employeur invoque en l’instance. Il plaide que le travail effectué dans son établissement n’est pas de nature à causer ou contribuer à la maladie professionnelle de surdité du travailleur.
[32] De l’avis du tribunal, l’employeur ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve de démonter que le travail exercé par le travailleur à son emploi n’est pas de nature à engendrer sa maladie professionnelle.
[33] Dans un premier temps, une distinction s’impose entre une argumentation produite par une partie ou son représentant et la preuve contenue au dossier. Comme le font valoir certaines décisions[5], les faits s’établissent par une preuve et non par une argumentation. Il n’est pas suffisant d’alléguer, il faut prouver[6] et le fardeau de preuve repose entièrement sur l’employeur.
[34] Or, il est allégué par l’employeur des arguments qui ne sont pas supportés par la preuve documentaire.
[35] Dans son argumentation écrite, l’employeur fait référence à une étude de bruit effectuée chez un autre employeur alléguant qu’il s’agit des mêmes véhicules que ceux conduits par le travailleur et que les conclusions de cette étude sont transposables au cas sous étude.
[36] La Commission des lésions professionnelles ne peut tenir compte de cette étude dans l’analyse du présent dossier pour les raisons suivantes.
[37] Dans un premier temps, l’étude de bruit effectuée par la firme Décibel Consultants inc. permet d’établir les conditions d’exercice du travail des travailleurs de Transport Kinsway à cette époque.
[38] L’allégation générale de l’employeur à l’effet qu’il utilise le même type de camion n’est pas suffisante afin de justifier l’application des conclusions de l’étude de la firme Décibel au cas sous étude.
[39] Le tribunal ne dispose pas d’une preuve permettant de connaître dans quelle mesure le travailleur a œuvré sur un modèle de camion plutôt qu’un autre et en quoi les données recueillies chez les employés de Transport Kinsway seraient les mêmes que chez le travailleur. Aucun parallèle fiable n’est fait par l’employeur entre les conditions de travail du travailleur et celles de chauffeurs chez Transport Kinsway.
[40] Enfin, la Commission des lésions professionnelles ne peut faire siens les motifs de la décision[7] déposée par l’employeur puisque cette décision s’appuie sur une étude sonore réalisée dans l’établissement de l’employeur dont il est question, tel qu’il est souligné au paragraphe 14 précédemment cité. Cela diffère de la preuve présentée en l’espèce où l’employeur demande d’importer une preuve qui, de l’avis de la soussignée, n’est pas applicable en l’espèce.
[41] En conclusion, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’employeur ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve nécessitant de démontrer que le travailleur n’a pas exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle dans son établissement et la décision rendue le 12 juin 2012 à la suite d’une révision administrative doit être maintenue.
- Transport TFI 1, s.e.c., 2013 QCCLP 1743 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[22] Le procureur de l’employeur dépose à l’audience une étude de mesures sonores effectuée chez l’employeur par Genivar inc., du 8 au 10 mai 2012 et du 23 au 24 mai 2012. Le mandat de Genivar inc. était le suivant :
- Obtenir une mesure générale des niveaux de bruit ponctuels (en dBA) réparti selon un quadrillage réparti selon les principales sources de bruit;
- Évaluer, conformément aux normes du Règlement sur la santé et la sécurité du travail, décret 885-200, section XV, l’exposition aux bruits pour un poste de travail sur trois journées distinctes de travail;
- Identifier les équipements de l’atelier ayant un impact sonore sur l’exposition aux bruit des travailleurs;
[sic]
[…]
[39] Dans le présent cas, la preuve relative aux niveaux sonores enregistrés au poste de mécanicien à l’atelier du garage de l’entreprise doit être évaluée dans un contexte spécifique. En effet, l’enregistrement des données sonores a eu lieu en mai 2012 alors que le travailleur en cause n’occupait plus ce poste. L’analyse effectuée à cette période ne fait pas nécessairement foi des niveaux de bruit prévalant pendant la période d’emploi du travailleur pendant sa carrière chez l’employeur de 1989 à 2011. Le tribunal ne dispose d’aucune information technique ou scientifique concernant le niveau de bruit ambiant durant cette dernière période, ni d’information voulant que les conditions de travail et les niveaux de bruit prévalant en 2012 étaient identiques à celles existant entre 1989 et 2011.
- Autobus du Village inc., 2013 QCCLP 308 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[29] Pour sa part, la notion de bruit excessif a fait l’objet d’une abondante jurisprudence ainsi résumée dans la cause Carufel et E.G. Électrique ltée[5] :
[18] Par ailleurs, selon la jurisprudence, la notion de « bruit excessif » retrouvée à l’annexe I de la loi ne correspond pas aux normes prévues par le Règlement sur la santé et la sécurité du travail, dont celle d’un niveau de bruit continu de 90 dBA pendant une durée d’exposition de huit heures par jour, parce que ces normes sont édictées dans un cadre réglementaire ayant un tout autre objet que celui visé par la loi. L’objet de la loi étant la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elles entraînent, la notion de « bruit excessif » retrouvée à son annexe I réfère plutôt à un niveau de bruit qui peut causer une atteinte neurosensorielle, de sorte qu’un niveau inférieur aux normes réglementaires peut, selon le cas, être jugé excessif.
[19] Un niveau de bruit de 85 dBA est généralement considéré comme étant le seuil au-delà duquel un bruit peut être qualifié d’excessif.
[20] Comme le précise la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Thuot et Multi-Marques Distribution inc., il importe cependant de s’en remettre à des critères objectifs d'intensité et de durée, de sorte que le travailleur doit démontrer qu’il a été exposé à un bruit que l’on peut qualifier d’« excessif » en faisant la preuve des endroits où il a travaillé, des sources de bruit environnantes, du temps d’exposition et surtout, du niveau de bruit auquel il a été soumis. Il peut aussi faire une preuve raisonnable de reconnaissance générale de milieu de travail, en autant que cette preuve soit appuyée sur des données indépendantes reconnues et non pas sur de simples allégations.
[Notes omises]
- Leclair et Clivenco inc., 2014 QCCLP 6348 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[38] Aussi, la Commission des lésions professionnelles a reconnu, à plusieurs reprises, qu’une exposition à des niveaux de bruit avoisinant 85 dBA peut constituer une exposition à un bruit excessif, cette notion laissant place à une certaine appréciation[3].
- Aérospatiale Sargent Canada inc. et Fazendeiro Jesus, 2015 QCCLP 3002 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[68] La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles a maintes fois reconnu que, si le législateur avait voulu associer la notion de bruit excessif contenue à l’annexe I aux limites maximales de niveaux sonores contenues dans le règlement, il l’aurait clairement indiqué. Elle rappelle également qu’on ne doit, en aucun cas, restreindre la définition d’une exposition à un bruit excessif à la seule exposition à un bruit qui excède la norme règlementaire.[8]
[69] À ce sujet, le soussigné partage les propos de la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Multitemp ltée et Taing[9] dont il convient de reproduire certains passages :
[48] Le tribunal considère, toutefois, que la notion de bruit excessif prévue à la section IV de l'annexe I de la loi ne fait pas exclusivement référence aux normes dont il est question dans le règlement13.
[49] Comme le rappelle la Commission des lésions professionnelles dans l'affaire Brisson et Cité de Dorval14, on ne peut importer une donnée inscrite à un règlement visant à établir des normes minimales de protection en regard de la santé et de la sécurité des travailleurs aux fins d’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à la loi.
[50] Dans le même ordre d'idées, la Commission des lésions professionnelles souligne, dans l'affaire Commission scolaire des Navigateurs et Thibault15, que l'objet du Règlement sur la qualité du milieu de travail « est de déterminer la limite maximale de bruit permise dans un établissement alors que la loi vise la réparation des lésions professionnelles et les conséquences qu'elles entraînent ». La notion de bruit excessif prévue à la section IV de l’annexe I de la loi réfère donc à un niveau d’exposition au bruit « susceptible de causer une atteinte neurosensorielle ». Ainsi, un niveau d’exposition inférieur à la norme réglementaire peut être considéré comme excessif.
[51] La soussignée retient, des principes qui se dégagent de ces affaires, que la notion de bruit excessif réfère à un niveau de bruit susceptible d'entraîner une atteinte neurosensorielle, laquelle peut être causée par un niveau de bruit inférieur à la limite maximale permise par le règlement.
_____________________
13 Sweeney et Cartonniers Laval inc., C.L.P. 172387-61-0111, 19 avril 2002, G. Morin ; Brisson et Cité de Dorval, précitée, note 12 ; Vinconneau et Général Motors du Canada ltée, précitée, note 12.
14 Précitée, note 12
15 [2003] C.L.P. 623
[70] L’utilisation par le législateur des termes « bruits excessifs » laisse place à une certaine appréciation ou discrétion qui doit être exercée tant par la CSST que par la Commission des lésions professionnelles[10].
[71] Ainsi, le tribunal estime que tout travail, exercé dans un environnement où le niveau de bruit est inférieur à ce que prévoit le règlement, n’est pas nécessairement sécuritaire pour tout travailleur qui y est soumis.
[72] Dans l’affaire Audet et Hydro-Québec[11], la Commission des lésions professionnelles affirme ce qui suit :
[70] […] la norme réglementaire québécoise édictée à des fins préventives ne doit pas constituer un absolu et, ainsi, être appliquée sans nuance dans un contexte de réparation indemnisation, mais doit plutôt être considérée à titre indicatif, en juxtaposition avec d’autres facteurs pouvant influer sur le niveau d’exposition au bruit. La Commission des lésions professionnelles considère que la notion de bruit excessif réfère à un niveau de bruit suffisant pour entraîner une atteinte auditive ce qui, il va sans dire, rend nécessaire une appréciation rigoureuse des faits relatifs à l’exposition au bruit.
[73] Le soussigné souscrit à cette jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles et rappelle que les normes prévues au règlement peuvent servir d’indicateur, mais ne lient pas le tribunal dans l’appréciation du caractère excessif du bruit[12].
[74] Il a été souvent mentionné dans la jurisprudence qu’un bruit excessif est en fait un bruit susceptible de causer une atteinte neurosensorielle.
[75] Dans le cas d’espèce, le seul élément de preuve de l’employeur est le document de Kenworth sur le niveau de bruit de ses camions. Or, le tribunal estime que l’employeur aurait pu fournir des mesures de bruit réalisées dans son environnement de travail.
- Normandin Transit inc., 2013 QCCLP 4309 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[33] La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’effectivement l’article 328 permet de tenir compte de l’importance du danger d’un employeur à l’autre.
[34] Cependant, cette possibilité offerte à l’article 328 de la loi est rarement appliquée dans les faits à défaut de données fiables disponibles au dossier.
[35] Dans le présent dossier, la Commission des lésions professionnelles ignore quelles étaient les conditions de travail dans lesquelles le travailleur a évolué lorsqu’il a travaillé chez Imprimerie Transcontinentale Prestige inc. La publication déposée en preuve par l’employeur, concernant le domaine de l’imprimerie, ne peut permettre à la Commission des lésions professionnelles d’en tirer la conclusion que le travail effectué par le travailleur chez Imprimerie Transcontinentale Prestige inc. était nécessairement beaucoup plus dangereux que le niveau de bruit auquel il a été exposé chez Thermofin.
[36] Puisque la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la preuve ne contient pas de données fiables pour déterminer l’importance de danger d’un employeur à l’autre, dès lors, la règle de la proportionnalité par rapport au temps travaillé chez chacun des employeurs demeure la façon la plus équitable de procéder au partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur.
- Thermofin, 2011 QCCLP 6575 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[38] Reste le critère de l’importance du danger présenté par le travail chez chacun des employeurs.
[39] Le tribunal retient du libellé de la réclamation du travailleur et de son témoignage à l’audience que le bruit généré par la machinerie utilisée lors du forage dépasse tous les autres bruits qu’il a pu rencontrer dans sa vie, à peu d’exceptions près. Encore là, le tribunal ne bénéficie d’aucun chiffre précis découlant d’une étude de bruit ou autre, permettant de comparer les décibels présents dans le cadre du travail de foreur en comparaison à ceux qui ont cours dans le travail de manœuvre.
[40] Encore une fois, le tribunal doit trancher puisqu’il a la conviction qu’il y a un facteur de risque plus important chez les employeurs ayant utilisé le travailleur comme foreur que chez l’employeur, mais encore une fois, aucun chiffre précis ne permet au tribunal de trancher avec précision.
[41] L’article 351 prévoit ce qui suit :
351. La Commission rend ses décisions suivant l'équité, d'après le mérite réel et la justice du cas.
Elle peut, par tous les moyens légaux qu'elle juge les meilleurs, s'enquérir des matières qui lui sont attribuées.
__________
1985, c. 6, a. 351; 1997, c. 27, a. 13.
[42] En tenant compte du fait que le niveau de bruit inhérent à l’emploi de foreur était plus important que dans le cadre de celui de manœuvre, étant donné que le travailleur était exposé beaucoup plus d’heures à titre de foreur qu’à titre de manœuvre chez l’employeur, mais considérant qu’il arrivait que le niveau de bruit chez l’employeur équivalait à celui que comportait le poste de foreur, le tribunal estime juste et équitable de réduire le pourcentage d’imputation à 5 %.
- Construction LFG inc., 2014 QCCLP 4870 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[15] Le principal argument de l’employeur est que le port de bouchons auriculaires « réduit l’exposition au bruit de 26 à 33 décibels » et que le port de cet équipement « se traduit par l’absence d’exposition à un risque de nature à occasionner un problème de surdité » et par la réduction significative du niveau d’exposition au bruit. Des décisions de la Commission des lésions professionnelles reconnaissant ce fait sont déposées[3].
[16] Soulignons que la Commission des lésions professionnelles, dans d’autres affaires impliquant le présent employeur[4], n’a pas retenu cet argument.
[17] Plus particulièrement, dans une autre affaire impliquant le présent employeur[5], la Commission des lésions professionnelles se penche sur l’efficacité des protecteurs auditifs fournis et conclut que les fiches techniques ne représentent pas la réduction réelle de l’exposition au bruit.
[18] À la lecture des décisions déposées par l’employeur et de celles consultées par la Commission des lésions professionnelles, force est de constater que: l’employeur dépose un affidavit qui, dans la très grande majorité des cas, est en tout point semblable à celui déposé dans la présente affaire.
[19] La Commission des lésions professionnelles ne pouvant interroger le travailleur, est d’avis qu’il n’y a pas lieu d’accorder une grande force probante à une telle preuve car elle ne peut apprécier la portée réelle de ce que le travailleur déclare dans l’affidavit.
[20] La preuve de l’efficacité réelle des protecteurs auditifs que le travailleur a portés n’a pas été faite dans la présente affaire. Le dépôt des fiches techniques de ces protecteurs ne suffit pas à démontrer jusqu’à quel point il y a réduction du bruit.
[21] Il n’est pas non plus suffisant de déposer des décisions dans lesquelles une telle preuve a été déposée et qui a permis à l’employeur d’avoir gain de cause. Rappelons que la Commission des lésions professionnelles, saisie sensiblement de la même preuve dans d’autres affaires, ne retient pas les prétentions de l’employeur.
[22] Un employeur qui demande de procéder sur dossier, sans audience, prend le risque que le tribunal estime que la preuve est insuffisante pour lui permettre de conclure dans le sens recherché.
[23] L’employeur doit démontrer, par une preuve prépondérante, ce qu’il allègue soit, dans le présent cas, que le travail exercé par le travailleur n’était pas de nature à engendrer la maladie. La Commission des lésions professionnelles n’a pas à aviser un employeur que sa preuve est insuffisante.
[24] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’employeur n’a pas démontré, par une preuve prépondérante, que le travailleur n’a pas, chez lui, occupé un emploi de nature à engendrer sa maladie.
[25] Subsidiairement, le représentant de l’employeur soumet que la CSST n’a pas évalué correctement le pourcentage qui doit lui être imputé puisqu’elle n’a pas tenu compte de l’importance du danger du travail exercé par le travailleur et qu’elle a commis une erreur dans le calcul du pourcentage.
[26] La Commission des lésions professionnelles, pour les mêmes motifs que ceux précédemment énumérés, est d’avis que l’employeur n’a pas démontré, de façon prépondérante, que le travailleur était exposé à un bruit moindre lorsqu’il a travaillé chez lui en comparaison avec les emplois exercés chez les autres employeurs, la preuve sur ce point étant nettement insuffisante.
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 419 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[35] En ce qui a trait à l’employeur, Les Moteurs électriques Gosselin inc. il n’a pas été en mesure de faire la preuve des niveaux de bruits auxquels le travailleur a été exposé puisqu’il n’existe aucune mesure à cet égard. Le simple fait que le travailleur exerce son travail à une trentaine de pieds de ses collègues n’est pas suffisant en soi pour conclure à l’absence de risque de développer une surdité professionnelle.
- Poutrelles Modernes ltée, 2015 QCCLP 804 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[18] Le représentant de l’employeur dépose une argumentation écrite au tribunal par laquelle il confirme que le travailleur a occupé un emploi en 2012 pour Transelec inc, à titre de conducteur d’engins lourds. Il prétend toutefois qu’il n’a pas été exposé à des bruits excessifs dans le cadre de cet emploi, qu’il portait des protecteurs auditifs et que le travail effectué n’a aucunement participé au développement de la surdité professionnelle du travailleur. Au soutien de ses prétentions, il dépose comme unique preuve un affidavit signé par le travailleur et assermenté le 28 août 2014. L’essentiel de ce document est rédigé ainsi :
1. J’ai été à l’emploi de la compagnie Transelec / Common inc. du mois de juillet 2012 au mois de décembre 2012, et ce, à titre d’opérateur de machineries lourdes.
2. Lors de mon emploi chez Transelec / Common, je n’ai pas été exposé à des bruits excessifs.
3. De plus, j’ai porté des protecteurs auditifs tout au long de ce contrat de travail.
4. Le travail que j’ai effectué pour la compagnie Transelec / Common inc. n’a pas participé d’aucune façon au développement de ma surdité.
5. Tous les faits allégués dans le présent affidavit sont vrais.
[19] Le tribunal estime que cette preuve est insuffisante et imprécise pour démontrer de façon prépondérante que Transelec inc. ne doit être imputé d’aucun coût en lien avec la maladie professionnelle du travailleur.
[20] En fait, cette preuve est même contradictoire, puisqu’elle contredit totalement ce que le travailleur a lui-même indiqué à l’annexe de sa réclamation alors qu’il identifie précisément Transelec inc. comme étant l’un des employeurs chez qui il a été exposé au bruit. Comment expliquer ce revirement? Dans quel contexte est réalisé cet affidavit? Sur quoi le travailleur se fonde-t-il pour affirmer qu’il n’a pas été exposé à des bruits excessifs? Quelle est pour lui la signification de cette expression? Comment peut-il affirmer que son travail chez cet employeur n’a pas participé au développement de sa surdité? D’ailleurs, telle n’est pas la question, mais bien de déterminer s’il a effectué un travail de nature à engendrer sa maladie.
[21] Cet affidavit est loin d’être suffisamment détaillé. En effet, il ne précise pas le travail effectué, sur quel engin, de quel modèle, dans quelle proportion de ses heures le travailleur a opéré tel ou tel engin, s’il travaillait parfois avec les fenêtres ouvertes, si chacune de ces machineries était munie d’une cabine fermée.
[22] De fait, le tribunal ne retient pas ce document comme étant prépondérant et souligne qu'il suscite beaucoup plus de questions auxquelles il n’y a pas de réponse qu'il ne permet de prouver quoi que ce soit.
[23] Par ailleurs, il est étonnant de constater qu’auprès de la révision administrative de la CSST, cet employeur déclare que le manufacturier fournisseur de la machinerie, sans préciser laquelle, garantit que la cabine où prend place le travailleur est isolée du bruit et que ce dernier n’est pas obligé de porter de protections auditives. Or, une telle preuve n’est pas offerte, et ce, pour aucun des différents engins lourds opérés par le travailleur. D’ailleurs, le tribunal souligne qu’aucune fiche technique n’est déposée, ce qui aurait potentiellement permis de retrouver des renseignements sur le niveau de bruit de chacune de ces machines.
[24] Malgré cette allégation de « cabine isolée du bruit », il est par ailleurs fort souligné que le travailleur portait des protecteurs auditifs. Toutefois, la nature, le type et le modèle de cet équipement ne sont nullement précisés, ni la façon du travailleur de les porter et la durée d’utilisation par jour. D’ailleurs, la fiche technique de ces protecteurs n’est pas déposée, l’efficacité de cet équipement est donc questionnable.
[25] Ainsi, le tribunal constate qu’il ne dispose pas d’une preuve prépondérante établissant le niveau de bruit généré par les machineries opérées par le travailleur ni la diminution de bruit alléguée par le port des protecteurs auditifs ou l’isolation de la cabine. En outre, il est impossible de distinguer l’exposition au bruit chez Transelec inc. de l’exposition chez les autres employeurs alors que le travailleur indique avoir, chez chacun d’entre eux, porté des protecteurs auditifs.
[26] Pour ces motifs, le tribunal considère que Transelec inc. n’a pas démontré de façon prépondérante que les tâches effectuées chez lui par le travailleur ne sont pas de nature à engendrer la maladie professionnelle acceptée.
[27] Comme l’analyse de la preuve présentée ne permet pas au tribunal de conclure à une importance du danger moindre chez cet employeur, le calcul du partage de l’imputation doit se faire comme l’a réalisé la CSST, soit proportionnellement à la durée de temps travaillé pour chaque employeur[3]. Puisqu’il n’est retrouvé aucune erreur dans le calcul, tel qu’il appert du tableau de partage, le dossier financier de Transelec inc. demeure imputé de 3,53 % du coût des prestations relatif à la surdité professionnelle dont est porteur le travailleur.
- Transelec inc., 2015 QCCLP 446 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[21] Au soutien de sa requête, l’employeur dépose un affidavit assermenté du travailleur. Voici ce qu’en retient le tribunal :
• Le travailleur a exercé pendant 40 ans chez plusieurs employeurs différents le métier de grutier et de mécanicien de machinerie lourde pour un total de 60 085,10 heures;
• Tableau à l’appui, le travailleur déclare avoir travaillé 9123,70 heures chez l’employeur Kiewit. Le même tableau avec les mêmes chiffres est reproduit pour l’employeur Parsons. Le représentant des employeurs déclare à ses représentations écrites qu’une erreur s’est glissée à l’affidavit du travailleur. Chez l’employeur Parsons, on devrait plutôt lire 4829,60 heures comme l’indique la CCQ;
• Selon le travailleur, les employeurs Kiewit et Parsons fournissaient toujours des protecteurs auditifs sous forme de bouchons ou coquilles. Il ajoute avoir toujours utilisé de manière efficace et adéquate ces protecteurs. Enfin, il déclare que les protecteurs diminuaient de façon significative le bruit ambiant et que le bruit qu’il « percevait » chez les employeurs en l’instance était « significativement moins élevé » que chez les autres employeurs.
[22] Ce que ne dit pas le travailleur, c’est le type d’emploi qu’il occupait précisément chez les employeurs au présent dossier ni le type d’équipement utilisé. Il ne dit pas non plus la différence entre le type de protection utilisé chez les employeurs au dossier par rapport à ceux utilisés chez les autres employeurs. Enfin, il ne dit pas si chez les employeurs en l’instance il portait seulement les protecteurs « dans les moments les plus bruyants » comme le rapporte la docteure Gauthier.
[23] L’employeur a décidé de procéder par écrit et de déposer un affidavit pour valoir de témoignage pour le travailleur. C’est son choix. Par ailleurs, cet affidavit a, de toute évidence, été préparé par les représentants de l’employeur puisque la même information et les mêmes tableaux qu’à l’argumentation s’y retrouvent. De plus, le travailleur n’a pas porté une grande attention à son contenu puisqu’il ne constate pas l’erreur flagrante aux heures qu’il affirme avoir exécutées pour l’employeur Parsons. Il ne s’agit donc pas d’un témoignage spontané, franc et direct.
[24] L’information contenue à l’affidavit est également parcellaire. Le travailleur déclare simplement que l’information contenue à l’affidavit est vraie. Il ne déclare aucunement qu’il s’agit d’un juste reflet de sa réalité par rapport à son exposition au bruit depuis 1971, le seul élément qui intéresse pourtant le tribunal. Pour l’ensemble de ces motifs, le tribunal accorde peu de force probante au témoignage du travailleur contenu à son affidavit.
[25] À l’appui de leurs requêtes, en plus de l’affidavit du travailleur, les employeurs déposent plusieurs documents :
• Le manuel du programme de sécurité et le programme de prévention sur le chantier où travaillait spécifiquement le travailleur. Ces documents sont peu pertinents dans la mesure où le travailleur reconnaît avoir porté ce protecteur auditif au travail;
• La description des différents appareils de protections offerts avec des protections affichées variant de 24 à 33 dB. Cette liste est peu pertinente sans évaluation de la protection réelle offerte chez le travailleur selon la morphologie de ses oreilles. Il y a également une différence entre le niveau de protection théorique affiché et le niveau de protection réel[4].
• Une étude sur l’exposition au bruit des grutiers effectuée par la Cité de la Santé de Laval en 1989. Les résultats de l’étude varient de 70 à 100 dBA pour une exposition de 8 heures. La variation s’explique par la dimension de la grue, la présence d’une cabine isolée ou non et la motricité (à tour, sur roues ou sur chenilles). Or, cette étude est peu pertinente dans la mesure où, selon le tableau de la CCQ, le travailleur a exercé le métier de mécanicien de machinerie lourde chez les employeurs 1995 à 2012, pas celui de grutier. Selon le même tableau CCQ, le travailleur n’aurait exercé le métier de grutier que de 1974 à 1977. De plus, rien n’indique le type de grue qu’aurait opéré le travailleur, ni si cet équipement a évolué depuis la confection de l’étude en 1989.
[26] De façon globale, le tribunal ne voit aucune distinction entre le bruit auquel aurait été exposé le travailleur depuis 1971 par rapport à celui présent depuis 2007 chez les employeurs au présent dossier. Le seul fait d’affirmer que les protecteurs diminuaient de façon significative le bruit ambiant et de façon significativement plus efficace est insuffisant. Il s’agit d’une affirmation du travailleur hautement suggestive qui décrit une réalité partielle et dirigée, donc sans valeur probante.
[27] Le tribunal rappelle également que le travailleur souffre ici d’une surdité professionnelle. Ce fait n’est pas contesté. Il est donc tout à fait prévisible que le travailleur constate subjectivement une amélioration de l’efficacité des protecteurs auditifs en raison justement de la progression de sa surdité. Les protecteurs auditifs utilisés dans les années 2000 lui sembleront plus efficaces que ceux utilisés dans les années 1980 en raison justement de la progression de sa surdité causée par l’exposition au bruit au travail.
[28] La preuve présentée par les employeurs ne permet donc pas d’établir, par prépondérance, que l’exposition au danger était différente chez eux. En l’absence d’une telle preuve, la règle de la proportionnalité au temps travaillé chez chacun des employeurs sans égard au danger, comme la fait la CSST dans ses décisions en litige, est la façon la plus équitable de procéder au partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur[5].
- Grue PG-Kiewit, 2014 QCCLP 6733 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[…]
[17] Contrairement à ce que soutient l’employeur dans son argumentation, la preuve au présent dossier n’est pas de nature à démontrer que le travailleur a exercé un emploi de nature à engendrer sa maladie professionnelle chez d’autres employeurs. La liste des employeurs précédents qui œuvrent également dans le secteur de l’installation électrique ne fait foi ni de l’environnement de travail ni des conditions de travail prévalant chez chacun d’entre eux à l’époque.
[18] Le tribunal ne peut ainsi apprécier, même de façon approximative, la durée et les niveaux de bruit auxquels le travailleur a été exposé dans l’exercice de ses différents emplois antérieurs. Les conditions de travail prévalant à l’époque peuvent d’autant moins être présumées que les travaux d’électricité étaient effectués non pas dans le cadre de la construction de maisons préusinées, mais plutôt de la construction en général incluant la construction et l’entretien de lignes électriques et de communication.
[19] Dès lors, bien que le travailleur ait mentionné à l’audiologiste avoir travaillé dans le bruit depuis l’âge de 16 ans, une telle mention ne saurait en soi établir de manière prépondérante l’importance du danger que présentait le travail alors accompli chez chacun des employeurs par rapport à la maladie professionnelle qu’il a subie à compter du 7 novembre 2013, à savoir une surdité professionnelle. L’importance du danger est d’autant moins démontrée que le travailleur ne fait aucunement état d’une telle exposition au bruit dans l’annexe jointe à sa réclamation à la CSST. Aucun autre emploi que celui exercé chez l’employeur au dossier depuis 2000 n’est invoqué à cette occasion.
- Groupe Pro-Fab inc., 2015 QCCLP 4142 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[…]
[28] En effet, l’employeur fonde ses arguments essentiellement sur les affirmations du travailleur, selon lesquelles il a été exposé à des bruits excessifs alors qu’il œuvrait pour les entreprises Fellipinas Cement Corporation, Gizan Cement et Miron.
[29] Or, le tribunal estime que les affirmations du travailleur sont trop générales pour constituer une preuve probante du niveau réel du bruit auquel il était exposé dans ces autres emplois. Il n'a pu être interrogé à cet égard et le tribunal ignore si les conditions de travail étaient comparables à celles pratiquées chez l’employeur. La preuve ne révèle pas s’il portait des protecteurs auditifs, quels outils il utilisait, la méthode de travail, l’environnement où s’effectuaient ses tâches, la proportion des heures où il était exposé aux bruits, etc. En outre, le travailleur n’a pas œuvré seulement à titre de soudeur et le tribunal ignore les conditions de travail quant aux autres types d’emploi, comme celui de concierge.
[30] De même, le tribunal ignore ce que signifie, pour le travailleur, un degré élevé de bruit. Dans ce contexte, il apparaît difficile d'accorder une grande valeur probante à son affirmation, voulant que le niveau de bruit auquel il était exposé chez les employeurs avant son arrivée au Canada et chez Miron, fût aussi élevé ou même davantage que chez les employeurs qui ont été considérés par la CSST dans le partage de l’imputation des coûts.
[31] Bien que le tribunal convienne qu’il soit difficile d’obtenir des informations au sujet de conditions de travail dans les entreprises situées en dehors du pays, le travailleur aurait pu donner certainement plus de précisions.
[32] Dans ce contexte, le tribunal conclut que l’employeur ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve.
- Équipement Moore ltée, 2014 QCCLP 2020 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[35] Il est vrai qu’à sa simple lecture, la description de tâches de journalier et celle d’aide-préposé à l’aqueduc et d’égout et d’apprenti préposé ne semblent pas comporter les mêmes facteurs de risques que l’emploi d’opérateur de machinerie lourde que le travailleur a occupé pour la majeure partie de sa vie professionnelle.
[36] Cependant, le tribunal constate, à la lecture de l’affidavit signé par le travailleur le 21 mai 2014, qu’il ne fait aucunement mention d’une exposition moins importante au bruit chez l’employeur que dans ses autres tâches.
[37] De plus, le tribunal ne dispose d’aucune étude de bruit effectuée chez l’employeur lui permettant d’appuyer ses prétentions selon lesquelles le niveau d’exposition au bruit était moins élevé que chez les autres employeurs.
[38] Ainsi, en l’absence de témoignage de la part du travailleur portant spécifiquement sur l’importance du danger et l’absence de preuve d’exposition au bruit moindre chez l’employeur, le tribunal considère que ce dernier n’a pas satisfait à son fardeau de la preuve puisqu’il n’a pas fourni une preuve prépondérante des risques moins importants. Il ne lui suffit pas de l’affirmer, encore doit-il le démontrer. Le tribunal ne peut donc faire droit à sa prétention en vue de moduler le pourcentage d’imputation des coûts en fonction de l’importance du danger. D’autant plus que le tribunal retient de l’affidavit du travailleur qu’il affirme porter de l’équipement de protection individuelle pour le protéger de l’exposition au bruit depuis 2009. Il en découle qu’il doit donc y avoir un certain degré d’exposition au bruit pour justifier une telle mesure de sécurité. Cet argument de l’employeur n’est donc pas retenu dans le cadre de l’établissement du pourcentage de l’imputation des coûts auquel il a droit.
[39] Il en va de même à l’égard de la prétention de l’employeur selon laquelle le tribunal devrait retrancher quatre années sur la période où le travailleur a œuvré chez lui puisqu’il portait un équipement de protection individuelle et, selon l’expression de l’employeur, n’était plus exposé au bruit.
[40] Il ne suffit pas pour l’employeur d’affirmer que l’équipement de protection individuelle élimine toute exposition au bruit, encore faut-il qu’il le démontre à l’aide d’une preuve prépondérante.
[41] Or, le tribunal ne dispose d’aucune précision quant au type d’équipement de protection individuelle dont bénéficiait le travailleur, pas plus qu’il ne dispose de données relativement au bruit ou à l’environnement de travail où il œuvrait.
[42] Par conséquent, la simple affirmation de l’employeur, selon laquelle le travailleur était moins ou peu exposé au bruit puisqu’il portait un équipement de protection individuelle, ne convainc pas le tribunal, à défaut de preuve prépondérante en ce sens.
- Thetford Mines (Ville de), 2014 QCCLP 3987 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[36] Bien que ces données aient conduit l’analyste de l’entreprise Genivar inc. à conclure que les niveaux sonores du poste de mécanicien respectaient la norme de 90 dBA sur une période de travail de huit heures, car le mécanicien n’était soumis à des niveaux de bruit élevés que de façon ponctuelle durant son quart de travail, le tribunal estime que certaines nuances importantes doivent être apportées à l’interprétation de la norme de 90 dBA appliquée pour conclure à l’absence de bruit excessif dans l’environnement de travail.
[37] Le soussigné fait siens les propos exprimés dans plusieurs décisions de la Commission des lésions professionnelles à cet égard. Dans une affaire relativement récente, le juge administratif J.A. Tremblay émettait les commentaires suivants dans une cause semblable à celle à l’étude[5] :
[46] La Commission des lésions professionnelles a eu à se prononcer sur la question de l’application du Règlement sur la santé et la sécurité du travail qui a une disposition équivalente à l’article 2.10.7.1 du code de sécurité pour les travaux de construction dans un cas de partage d’imputation pour une surdité professionnelle dans l’affaire Fondations Geodex inc.6 Le tribunal écrivait :
__________
6 C.L.P. 446185-61-1108, 2012-02-11, M. Cuddihy.
[27] Or, la soussignée considère qu’il est inapproprié d’appliquer la norme réglementaire ou d’autres guides qui prévoient une limite de bruit continu maximale permise dans un établissement pour déterminer si un travail est de nature à engendrer une surdité professionnelle. L’objet de ces normes est d’imposer aux employeurs des règles de conduite afin de minimiser les possibilités d’atteinte auditive chez la plupart des travailleurs sans pour autant prétendre qu’il s’agit d’une limite qui peut protéger tous les travailleurs.
[28] C’est ainsi que la soussignée considère qu’il y a plutôt lieu de référer aux dispositions de la loi relativement à l’admissibilité d’une réclamation pour surdité professionnelle pour déterminer ce qu’il faut entendre par la notion d’un travail susceptible d’engendrer une surdité professionnelle. À cet égard, l’annexe 1 à laquelle fait référence l’article 29 de la loi énumère les maladies qui sont considérées par le législateur comme étant caractéristiques de certaines activités professionnelles. Ainsi, une atteinte auditive causée par le bruit chez un travailleur qui exerce un travail impliquant une exposition à un bruit excessif est présumée être une surdité professionnelle. C’est ainsi qu’il y a lieu de déterminer ce qu’il faut entendre par un travail susceptible d’engendrer une surdité professionnelle en fonction d’un travail impliquant une exposition à « un bruit excessif » au sens de la loi.
[29] La loi ne définit pas ce qui doit être considéré comme un bruit excessif. Elle ne réfère pas aux dispositions du Règlement sur la Santé et la Sécurité du travail7. Or, de l’avis de la Commission des lésions professionnelles, ledit Règlement ne doit pas être appliqué à cet égard, car son objet est d’imposer aux employeurs des normes de conduite, ce qui est différent du but réparateur de la loi. La Commission d’appel en matière de lésions professionnelles a déjà retenu dans l’affaire Rondeau et Bow Plastiques ltée8 qu’une atteinte auditive peut survenir à la suite d’une exposition à un bruit continu de 80 dB(A). D’ailleurs, NIOSH9 a révisé ces standards et, dans un document publié en juin 1998, elle recommande de réduire la limite d’exposition au bruit de 90 dB(A) à 85 dB(A) tout en soulignant que cette mesure, alors qu’elle diminue le risque de causer une atteinte auditive, ne protège pas tous les travailleurs : […]
[le soulignement est du présent tribunal]
__________
8 CALP 29574-62-9106, 16 décembre 1992, J. L’Heureux.
9 UNITED STATES, DEPARTMENT OF HEALTH AND HUMAN SERVICES, PUBLIC HEALTH SERVICE, CENTERS FOR DISEASE CONTROL AND PREVENTION, Criteria of a Recommended Standard: Occupational Noise Exposure, coll. « NIOSH Publication », Cincinnati, National Institute for Occupational Safety and Health, 1998, 105 p. http://www.cdc.gov.niosh/docs/98-126
- Autobus du Village inc., 2013 QCCLP 308 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[27] De plus, les normes règlementaires ne peuvent être retenues pour établir que le travailleur n’a pas pu développer une surdité d’origine professionnelle si ces normes sont respectées. En effet, le but de celles-ci est de déterminer une limite légale au niveau de bruit auquel un travailleur peut être exposé et de prévoir des sanctions dans le cas de non-respect. Ces dispositions règlementaires visent la protection des travailleurs et la prévention des lésions alors qu’en l’espèce, une lésion est survenue. Dans ce cas, la loi, qui prévoit la réparation des conséquences d’une lésion reliée au travail, détermine que c’est l’employeur, par le biais des dispositions portant sur le financement du régime, qui doit en supporter le coût.
[28] Au surplus, le tribunal a maintes fois décidé que, malgré que la norme règlementaire soit respectée, un travailleur peut tout de même être reconnu porteur d’une surdité d’origine professionnelle s’il est exposé à un bruit excessif, soit un bruit de nature à causer la surdité[5].
[29] Ainsi, dans la mesure qu’un travailleur peut développer une surdité professionnelle par exposition à un bruit excessif alors qu’il est exposé à un niveau de bruit en deçà de la norme règlementaire, en contrepartie, le coût des prestations reliées à cette lésion doit être imputé à l’employeur, ou aux employeurs chez qui le travailleur a exercé les tâches l’exposant à ce niveau de bruit.
- Ganotec inc., 2013 QCCLP 2547 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[13] L'employeur prétend qu’il ne doit supporter aucun coût relatif à la lésion professionnelle puisque le port de protecteurs auditifs est obligatoire sur ses chantiers et qu’il les fournit gratuitement. De plus, ses contremaîtres ont la responsabilité de s’assurer que les travailleurs portent l’équipement de protection personnel requis, tel que décrit à sa politique « Rôles et responsabilités ».
[14] Également, des agents de prévention sont affectés aux chantiers et ont pour mandat de s’assurer du port de tous les équipements de protection. D’ailleurs, des avis disciplinaires sont régulièrement remis aux travailleurs qui ne se conforment pas aux directives de l’employeur en ce qui concerne le port d’équipement de protection auditive. Toutefois, le dossier du travailleur ne contient aucune mention en ce sens.
[15] L'employeur soutient également que les bouchons auriculaires en mousse qu’il fournit réduisent l’exposition au bruit de 26 à 33 décibels, selon les fiches techniques de ceux-ci, lesquelles ont été déposées en preuve.
[16] De plus, lorsqu’un travailleur n’est pas confortable avec les bouchons auriculaires, ou que ceux-ci ne fournissent pas une protection adéquate, il fournit également une coquille protectrice qui offre une réduction du bruit ambiant variant entre 24 et 33 décibels, selon le modèle.
[17] Le travailleur signe, le 21 janvier 2013, un affidavit dans lequel il est mentionné qu’il a toujours utilisé les protecteurs auditifs fournis par l’employeur de manière efficace et adéquate et que ceux-ci réduisaient le niveau du bruit ambiant. Il écrit également que le niveau de bruit chez cet employeur était moins élevé que chez les autres employeurs.
[18] Finalement, l’employeur soutient que le temps de travail normal du travailleur est d’une durée de huit heures par jour. En soustrayant les pauses dont il bénéficiait ainsi que les rencontres quotidiennes d’analyse sécuritaire des tâches, la revue du permis de travail avant chaque tâche et les rencontres hebdomadaires en santé et sécurité au travail, le temps réel de travail quotidien du travailleur était d’environ cinq heures par jour. Or, l’employeur prétend que selon le Code de Sécurité pour les travaux de construction[1] (le règlement) le travailleur peut être exposé à un niveau de bruit allant jusqu’à 91 décibels pour une période de sept heures et à un niveau de 92 décibels pour une période de six heures par jour. Ainsi, en tenant compte de la réduction du niveau d’exposition au bruit de 24 à 33 décibels apportée par les équipements de protection, l’exposition du travailleur au bruit chez l'employeur était nécessairement en dessous de la norme règlementaire prévue au règlement.
[19] En conséquence, l’employeur estime qu’il serait inéquitable et contraire à l’objectif visé par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[2] (la loi) qu’un employeur qui se conforme à ses obligations légales et fournit par tous les moyens possibles une protection à ses travailleurs, puisse être imputé des coûts reliés à une maladie professionnelle qu’il n'a pu contribuer à engendrer.
[…]
[23] En l'espèce, l’employeur soutient qu’il ne doit supporter aucun coût puisque le travailleur n'a pas exercé, alors qu’il était à son emploi, un travail qui pouvait l’exposer au risque de développer une surdité d’origine professionnelle en raison des équipements de protection qu’il devait obligatoirement porter.
[24] De plus, à l’appui de ses prétentions, l'employeur a déposé plusieurs décisions qui retiennent que le port de protecteur auditif adéquat réduit le niveau d’exposition au bruit et se traduit par l’absence d’exposition à un risque de nature à occasionner un problème de surdité[3].
[25] Or, pour les motifs qui suivent, le tribunal ne peut retenir les prétentions de l’employeur.
[26] En effet, dans un premier temps, aucune preuve du niveau de bruit ambiant chez l’employeur, auquel était exposé le travailleur, n’a été apportée. En effet, bien que l'employeur ait déposé la fiche signalétique des équipements de protection qu’il fournit et que selon ces fiches, il y a une réduction qui se situe entre 24 et 33 décibels, il n’a pas démontré le niveau de bruit réel dans les lieux de travail, ni, de façon particulière, ceux auxquels étaient soumis le travailleur. Or, comme le tribunal le soulignait avec justesse dans une décision récente[4], « l’obligation de porter des protecteurs auditifs implique nécessairement que le niveau de bruit auquel sont exposés les travailleurs est important. »
[27] De plus, les normes règlementaires ne peuvent être retenues pour établir que le travailleur n’a pas pu développer une surdité d’origine professionnelle si ces normes sont respectées. En effet, le but de celles-ci est de déterminer une limite légale au niveau de bruit auquel un travailleur peut être exposé et de prévoir des sanctions dans le cas de non-respect. Ces dispositions règlementaires visent la protection des travailleurs et la prévention des lésions alors qu’en l’espèce, une lésion est survenue. Dans ce cas, la loi, qui prévoit la réparation des conséquences d’une lésion reliée au travail, détermine que c’est l’employeur, par le biais des dispositions portant sur le financement du régime, qui doit en supporter le coût.
[28] Au surplus, le tribunal a maintes fois décidé que, malgré que la norme règlementaire soit respectée, un travailleur peut tout de même être reconnu porteur d’une surdité d’origine professionnelle s’il est exposé à un bruit excessif, soit un bruit de nature à causer la surdité[5].
[29] Ainsi, dans la mesure qu’un travailleur peut développer une surdité professionnelle par exposition à un bruit excessif alors qu’il est exposé à un niveau de bruit en deçà de la norme règlementaire, en contrepartie, le coût des prestations reliées à cette lésion doit être imputé à l’employeur, ou aux employeurs chez qui le travailleur a exercé les tâches l’exposant à ce niveau de bruit.
[30] Quant au fait que l’employeur prend des moyens pour s’assurer que ses travailleurs portent des équipements de protection auditive, le tribunal ne peut conclure que, par le fait même, il ne peut automatiquement être tenu responsable d’une surdité dont souffrirait un travailleur. En effet, même si le port d’équipement de protection auditive réduit l’exposition au bruit, il ne l’annihile pas.
[31] En l’espèce, le travailleur a commencé à réaliser qu’il avait certains problèmes auditifs en 2002, alors qu’il n’était pas au service de l’employeur. Cependant, ce n’est qu’en 2010 qu’une surdité neurosensorielle est diagnostiquée. Il occupe alors un emploi chez l’employeur depuis six ans. Or, le travail chez cet employeur se fait dans un milieu suffisamment bruyant puisque le port de protecteurs auditifs y est obligatoire.
[32] Dans ces circonstances, il est impossible de conclure que le travail chez l'employeur n'a pas contribué à augmenter l’atteinte auditive qui pouvait être en développement chez le travailleur.
[33] L’employeur a déposé plusieurs décisions concluant que le port de protection auditive se traduit par l’absence d’exposition à un risque de nature à occasionner un problème de surdité en raison de la réduction significative du niveau de l’exposition au bruit[6]. Ces décisions reflètent un courant jurisprudentiel du tribunal.
[34] Cependant, il existe un autre courant, exposé dans l’affaire Montupet ltée[7]. Le tribunal s’y exprime ainsi :
[27] Le tribunal n’est pas sans savoir que le courant jurisprudentiel qualifié de « majoritaire » auquel réfère le représentant de l’employeur a quelque peu été tempéré et que la jurisprudence récente5 est plutôt controversée quant à l’impact du port des protecteurs auditifs sur l’exposition au bruit dans un contexte d’imputation. À ce sujet, la Commission des lésions professionnelles s’exprime ainsi dans l’affaire Ganotec inc.6 :
[19] La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles au sujet de l’efficacité des protecteurs auditifs en milieu de travail est controversée. Dans Kamtech Services inc.2, le tribunal mentionne ce qui suit :
[33] En l’espèce, le risque retenu est l’exposition à des bruits excessifs ce qui ne veut pas dire un niveau de bruit qui dépasse la norme réglementaire, mais bien un niveau de bruit susceptible de causer une atteinte neurosensorielle.
[34] En soit, le recours à un équipement de protection auditive n’est pas la garantie qu’un travailleur n’est pas exposé à un risque. Encore faut-il établir que cet équipement était adéquat étant donné les risques particuliers auxquels le travailleur était exposé. Le tribunal convient que le port de protecteurs auditifs peut réduire le niveau de l’exposition. Mais, il ne réduit pas à néant le risque de surdité professionnelle, du moins le tribunal n’en a pas la preuve.
[35] De surcroît, il est révélateur de constater que dans la documentation issue du manufacturier, déposée par Kamtech, on indique que l’indice de réduction du bruit ne peut servir à calculer les niveaux de protection offerte par les protecteurs d’oreilles dans un milieu donné.
[…]
[37] La preuve que ces parties déposent en argumentation quant à la fourniture d’un équipement de protection n’est pas suffisante pour établir de manière prépondérante que le travail accompli par le travailleur pour elles éliminait tous les risques propres à engendrer la maladie professionnelle reconnue par la Commission des lésions professionnelles.
_______________________
2 C.L.P. 400864-63-1001, 13 septembre 2010, M. Juteau.
[nos soulignements]
[28] Plus récemment, dans l’affaire Kamtec Service inc. et Ganotec inc.7 la Commission des lésions professionnelles écrit, relativement au courant jurisprudentiel auquel réfère l’employeur en l’instance :
[37] Bien que ces employeurs aient adopté des politiques en matière de santé et de sécurité du travail qui visent à prévenir l’exposition de leurs travailleurs à des niveaux de bruit importants, cela n’exclut pas pour autant que, malgré la protection fournie, un travailleur puisse contracter une surdité professionnelle.
[38] Avec respect, le tribunal n'entend pas suivre l'approche retenue dans les décisions déposées par la représentante de l'employeur, voulant que la preuve du port d'une protection auditive permette de conclure à l'absence de risques de nature à causer une surdité professionnelle.
[39] L'obligation de porter des protecteurs auditifs implique nécessairement que le niveau de bruit auquel sont exposés les travailleurs est important.
[40] Or, on peut s'interroger sur la réduction effective du niveau de bruit auquel un travailleur est exposé lorsqu'il porte des protecteurs auditifs.
[41] Selon ce qui est annoncé par les fabricants dans les fiches techniques des protecteurs auditifs fournis par les employeurs, la réduction du niveau de bruit des bouchons auriculaires en mousse est de 26 à 33 décibels, selon le modèle, et celle des coquilles protectrices est de 24 à 33 décibels, selon le modèle.
[42] Toutefois, on ne sait pas si ces résultats ont été obtenus sur des chantiers ou en laboratoire. De plus, comme l'indique la fiche technique des bouchons en mousse M 1100 utilisés chez Kamtech, l'indice de réduction du bruit est de 29 décibels « (Lorsque les bouchons sont utilisés conformément aux directives) ». Ces directives sont les suivantes :
[…]
[43] On recommande de plus de vérifier régulièrement l'ajustement pendant tout le port des bouchons d'oreille parce que s'ils « se délogent, ils ne peuvent plus offrir de protection contre le bruit ».
[44] L'efficacité des protecteurs auditifs dépend donc en grande partie de leur installation.
[…]
[46] Si l'obligation de porter des protecteurs auditifs permet de réduire le niveau de bruit auquel est exposé le travailleur, la réduction effective peut toutefois varier d'un travailleur à l'autre pour différentes raisons telles que leur installation, la morphologie du conduit auditif extérieur11, l'obligation de les enlever pour parler à un collègue12.
[nos soulignements]
[29] Dans l’affaire Isolation Trifluvienne inc.8, la Commission des lésions professionnelles, siégeant en révision, formule les commentaires suivants quant à l’appréciation du fardeau de preuve par le premier juge administratif dans le cadre d’une demande sous l’article 328 de la loi :
[20] Le tribunal rejette les arguments de l’employeur pour les raisons suivantes.
[21] Le raisonnement du premier juge administratif est clair et les motifs pour refuser de revoir la proportion du coût des prestations de la maladie professionnelle qui doit être imputée à l’employeur sont convaincants. Il ne remet aucunement en question le fait que le travailleur a porté, pendant cinq ans, des protecteurs auditifs. Bien au contraire, il tient ce fait pour acquis comme il l’écrit au paragraphe 27 de la décision :
[27]Le tribunal retient de la preuve (notamment du rapport du Dr Larouche du 16 avril 2006) que le travailleur a porté des protecteurs auditifs, soit des bouchons auriculaires en mousse, au cours de ses cinq dernières années de travail.
[22] Par contre, pour conclure à l’absence d’exposition à un risque de nature à engendrer une surdité professionnelle et donner ouverture à un partage en vertu de l’article 328 de la loi, il fallait démontrer que les protecteurs auditifs ont, dans les faits, empêché le travailleur d’être exposé à un niveau de bruit nocif.
[23] Sur cette question, le premier juge administratif constate l’absence totale de preuve. Ainsi, pour le premier juge administratif, la preuve est muette sur un fait qui est essentiel à ce qu’il fallait démontrer. La fiche technique des protecteurs auditifs établit un indice de réduction de bruit qui demeure théorique. L’efficacité réelle d’une telle protection dépend, comme la fiche technique l’indique, du port adéquat de la protection auditive. En l’absence d’une telle preuve, le premier juge administratif retient, à juste titre, que l’employeur ne pouvait s’appuyer sur un extrait d’une décision du tribunal pour tirer cette conclusion.
[24] Le fardeau de preuve exigé est juste et conforme aux critères établis par l’article 328 de la loi pour partager l’imputation du coût des prestations dans le cas d’une maladie professionnelle.
[nos soulignements]
[30] La soussignée constate donc, à la lumière de cette récente jurisprudence, qu’on ne peut inférer automatiquement du port de protecteurs auditifs, la preuve d’une réduction significative d’exposition à un niveau de bruit nocif de nature à soustraire un travailleur de tout danger à contracter une surdité professionnelle. Ce fait doit être prouvé de manière prépondérante, eu égard à la preuve administrée dans chaque cas.
_____________
5 Isolation Trifluvienne inc., C.L.P. 382299-04-0906, 22 octobre 2010, M. Beaudoin, rejetant une requête en révision de la décision rendue le 12 janvier 2010, J.A. Tremblay; Ganotec inc. & al, C.L.P. 344338-04-0804, 7 mars 2011, J.-A. Tremblay, requête en révision rejetée, 2012 QCCLP 2486 (CanLII); Ganotec inc., 2012 QCCLP 5478 (CanLII); Ganotec inc. 2012 QCCLP 2810 (CanLII); Kamtec Service inc. et Ganotec inc., 2012 QCCLP 5564 (CanLII).
6 Précitée, note 5.
7 Précitée, note 5.
8 Précitée, note 5.
[35] La soussignée souscrit à cette école et estime que l’employeur doit prouver de façon prépondérante que le travailleur n’était pas exposé à un bruit de nature à causer sa surdité alors qu’il était à son service. La seule allégation du port de protecteurs auditifs par le travailleur, ainsi que le dépôt de la fiche signalétique de ceux-ci indiquant qu’ils réduisent le niveau de bruit de 24 à 33 décibels, ne sont pas suffisants pour établir que le travailleur n’était pas exposé à un bruit de nature à causer sa surdité, en l’absence de toutes données sur le bruit réel auquel le travailleur était exposé chez l’employeur.
[36] Finalement, l’affidavit déposé par l’employeur, où le travailleur déclare avoir été adéquatement protégé contre le bruit chez l’employeur, n’est pas suffisant pour écarter l’imputation du dossier de l’employeur.
[37] De même, l’allégation du travailleur selon laquelle le niveau de bruit chez l’employeur était significativement moins élevé que chez les autres employeurs ne peut être retenue. En effet, il ne s’agit pas d’une donnée objective et de plus, le fait que le bruit chez l’employeur était moins important que chez des employeurs précédents ne permet pas de conclure que le bruit auquel le travailleur était tout de même exposé, n’était pas suffisant pour causer une surdité.
[38] Il y a donc lieu de rejeter la requête de l’employeur.
- Ganotec inc., 2013 QCCLP 2547 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[15] Le principal argument de l’employeur est que le port de bouchons auriculaires « réduit l’exposition au bruit de 26 à 33 décibels » et que le port de cet équipement « se traduit par l’absence d’exposition à un risque de nature à occasionner un problème de surdité » et par la réduction significative du niveau d’exposition au bruit. Des décisions de la Commission des lésions professionnelles reconnaissant ce fait sont déposées[3].
[16] Soulignons que la Commission des lésions professionnelles, dans d’autres affaires impliquant le présent employeur[4], n’a pas retenu cet argument.
[17] Plus particulièrement, dans une autre affaire impliquant le présent employeur[5], la Commission des lésions professionnelles se penche sur l’efficacité des protecteurs auditifs fournis et conclut que les fiches techniques ne représentent pas la réduction réelle de l’exposition au bruit.
[…]
[20] La preuve de l’efficacité réelle des protecteurs auditifs que le travailleur a portés n’a pas été faite dans la présente affaire. Le dépôt des fiches techniques de ces protecteurs ne suffit pas à démontrer jusqu’à quel point il y a réduction du bruit.
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 419 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[34] Ce qui émane de l’ensemble de ces documents, c’est que la machinerie utilisée par le travailleur chez la requérante « comportait des cabines isolées », dont le niveau sonore théorique variait de 70 dB(A) (ou de 74 dB(A) si l’on se fie aux données du document de présentation de Caterpillar pour le modèle IT28G) à 91,6 dB(A) en fonction du modèle.
[35] Sur ce, il est utile de souligner que dans le document de présentation du chargeur sur roues de marque Caterpillar, modèle IT28G, il est spécifié que le niveau de bruit de 74 dB(A) correspond au bruit ambiant dans la cabine, pourvu que celle-ci soit adéquatement installée et maintenue en bon état (« properly installed and maintained »), avec portes et fenêtres fermées (« tested with doors and windows closed »). Autrement, selon ce qui est inscrit au document intitulé « EEC Sound Homologation Summary », le niveau de bruit à l’extérieur de la cabine de cet équipement atteint 105,7 dB(A), ce qui représente de toute évidence un bruit excessif.
[36] Or, la preuve présentée ne permet pas de déterminer si le travailleur opérait ce modèle de chargeur sur roues en ayant constamment les portes et fenêtres fermées. Cette remarque est pertinente, d’autant plus que le document de présentation sur le modèle IT28G dresse une liste des équipements optionnels, parmi lesquels il est fait mention d’un climatiseur (« Air conditioner »).
- Croix, 2015 QCCLP 1283 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[24] Malgré cette allégation de « cabine isolée du bruit », il est par ailleurs fort souligné que le travailleur portait des protecteurs auditifs. Toutefois, la nature, le type et le modèle de cet équipement ne sont nullement précisés, ni la façon du travailleur de les porter et la durée d’utilisation par jour. D’ailleurs, la fiche technique de ces protecteurs n’est pas déposée, l’efficacité de cet équipement est donc questionnable.
[25] Ainsi, le tribunal constate qu’il ne dispose pas d’une preuve prépondérante établissant le niveau de bruit généré par les machineries opérées par le travailleur ni la diminution de bruit alléguée par le port des protecteurs auditifs ou l’isolation de la cabine. En outre, il est impossible de distinguer l’exposition au bruit chez Transelec inc. de l’exposition chez les autres employeurs alors que le travailleur indique avoir, chez chacun d’entre eux, porté des protecteurs auditifs.
- Transelec inc., 2015 QCCLP 446 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[26] De façon globale, le tribunal ne voit aucune distinction entre le bruit auquel aurait été exposé le travailleur depuis 1971 par rapport à celui présent depuis 2007 chez les employeurs au présent dossier. Le seul fait d’affirmer que les protecteurs diminuaient de façon significative le bruit ambiant et de façon significativement plus efficace est insuffisant. Il s’agit d’une affirmation du travailleur hautement suggestive qui décrit une réalité partielle et dirigée, donc sans valeur probante.
[27] Le tribunal rappelle également que le travailleur souffre ici d’une surdité professionnelle. Ce fait n’est pas contesté. Il est donc tout à fait prévisible que le travailleur constate subjectivement une amélioration de l’efficacité des protecteurs auditifs en raison justement de la progression de sa surdité. Les protecteurs auditifs utilisés dans les années 2000 lui sembleront plus efficaces que ceux utilisés dans les années 1980 en raison justement de la progression de sa surdité causée par l’exposition au bruit au travail.
[28] La preuve présentée par les employeurs ne permet donc pas d’établir, par prépondérance, que l’exposition au danger était différente chez eux. En l’absence d’une telle preuve, la règle de la proportionnalité au temps travaillé chez chacun des employeurs sans égard au danger, comme la fait la CSST dans ses décisions en litige, est la façon la plus équitable de procéder au partage de l’imputation du coût des prestations reliées à la réclamation du travailleur[5].
- Grue PG-Kiewit, 2014 QCCLP 6733 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[38] […] . D’autant plus que le tribunal retient de l’affidavit du travailleur qu’il affirme porter de l’équipement de protection individuelle pour le protéger de l’exposition au bruit depuis 2009. Il en découle qu’il doit donc y avoir un certain degré d’exposition au bruit pour justifier une telle mesure de sécurité. Cet argument de l’employeur n’est donc pas retenu dans le cadre de l’établissement du pourcentage de l’imputation des coûts auquel il a droit.
[39] Il en va de même à l’égard de la prétention de l’employeur selon laquelle le tribunal devrait retrancher quatre années sur la période où le travailleur a œuvré chez lui puisqu’il portait un équipement de protection individuelle et, selon l’expression de l’employeur, n’était plus exposé au bruit.
[40] Il ne suffit pas pour l’employeur d’affirmer que l’équipement de protection individuelle élimine toute exposition au bruit, encore faut-il qu’il le démontre à l’aide d’une preuve prépondérante.
[41] Or, le tribunal ne dispose d’aucune précision quant au type d’équipement de protection individuelle dont bénéficiait le travailleur, pas plus qu’il ne dispose de données relativement au bruit ou à l’environnement de travail où il œuvrait.
[42] Par conséquent, la simple affirmation de l’employeur, selon laquelle le travailleur était moins ou peu exposé au bruit puisqu’il portait un équipement de protection individuelle, ne convainc pas le tribunal, à défaut de preuve prépondérante en ce sens.
- Thetford Mines (Ville de), 2014 QCCLP 3987 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[38] Dans cette affaire, l’employeur soutenait que le travailleur était protégé de toute exposition au bruit en raison du port de protecteurs auditifs. Bien qu’il s’agisse d’une situation factuelle différente de la présente, le tribunal y voit certaines analogies. La Commission des lésions professionnelles a conclu dans cette affaire qu’il ne suffisait pas pour l’employeur d’affirmer que l’équipement de protection individuelle élimine toute exposition au bruit, alors encore fallait-il qu’il en fasse la preuve de manière prépondérante. Le tribunal s’exprime en ces termes :
[40] Il ne suffit pas pour l’employeur d’affirmer que l’équipement de protection individuelle élimine toute exposition au bruit, encore faut-il qu’il le démontre à l’aide d’une preuve prépondérante.
[41] Or, le tribunal ne dispose d’aucune précision quant au type d’équipement de protection individuelle dont bénéficiait le travailleur, pas plus qu’il ne dispose de données relativement au bruit ou à l’environnement de travail où il œuvrait.
[42] Par conséquent, la simple affirmation de l’employeur, selon laquelle le travailleur était moins ou peu exposé au bruit puisqu’il portait un équipement de protection individuelle, ne convainc pas le tribunal, à défaut de preuve prépondérante en ce sens.
[nos soulignements]
[39] Transposant ces principes à la présente affaire, le tribunal constate que monsieur Bouchard affirme que le travailleur, dans le cadre de ses activités syndicales, n’était pas exposé à des bruits excessifs. Néanmoins, le tribunal ne dispose d’aucune donnée concrète permettant d’évaluer le niveau d’exposition du travailleur ou encore la proportion dans laquelle il effectuait ses activités syndicales dans un bureau avec une porte close par rapport à celles où il devait se déplacer dans l’usine.
[40] Par conséquent, le tribunal conclut qu’il ne peut faire droit à la demande de l’employeur de retrancher les 380 jours d’activités syndicales auxquelles s’est adonné le travailleur de l’exposition au bruit chez l’employeur, ce dernier n’ayant pas fourni une preuve prépondérante permettant de démontrer qu’il était peu ou pas exposé à des bruits excessifs dans le cadre de ces activités.
[41] Vu ce qui précède, le tribunal conclut que la durée d’exposition au bruit chez l’employeur est de 2 465 jours sur un nombre total d’heures d’expositions de 5 105 jours ce qui correspond à un pourcentage d’imputation de 48,3 % du coût des prestations reliées à la surdité professionnelle dont souffre le travailleur.
- Ébénisterie Beaubois ltée, 2015 QCCLP 3102 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[41] L’employeur soutient par ailleurs que le travail exercé par le travailleur en cause n’a pu contribuer de quelque façon à sa maladie professionnelle en raison du port d’appareils auditifs, ce qui a pour effet de réduire sensiblement les niveaux de bruit auxquels les mécaniciens peuvent être exposés. À cet égard, le tribunal constate du témoignage du directeur de l’entreprise et de la lecture du dossier de la CSST que le port d’appareils auditifs a cours chez l’employeur depuis 2005. Or, qu’en est-il de ce type de protection durant la période d’emploi du travailleur comprise entre 1989 et 2005? Aucune preuve n’a été soumise à cet égard. Aucune preuve n’a non plus été produite quant à la nature et l’efficacité des appareils disponibles depuis 2005. Il ne suffit pas d’indiquer que des protecteurs auditifs sont disponibles dans l’entreprise pour en conclure que le niveau de bruit ambiant est faible ou qu’il ne peut expliquer le développement d’une surdité professionnelle. Encore faut-il que le tribunal soit en mesure d’apprécier l’apport d’une telle mesure protectrice à la lumière de données scientifiques et techniques objectives. La Commission des lésions professionnelles s’est prononcée à plusieurs occasions sur cette question et a décrit les critères d’appréciation nécessaires en vue de qualifier le port de protecteurs auditifs de mesure atténuante efficace en matière d’exposition à des niveaux de bruit élevés.
[42] Dans l’affaire Excavation Gérard Pouliot inc.[6], le tribunal émet les commentaires suivants :
[32] Pour ce qui est de l’utilisation des équipements individuels de protection, la preuve révèle que ceux?ci sont fournis par l’employeur et que le travailleur les a portés. D’autre part, suivant les dépliants du fournisseur et les bons de commande déposés par l’employeur, la preuve démontre que la coquille fournie par l’employeur réduit l’exposition au bruit de 30 décibels (dB).
[33] Cependant, la preuve ne révèle pas les niveaux de bruit existants chez l’employeur de telle sorte que même si les protecteurs auditifs ont permis une protection auditive au travailleur, le tribunal ne sait pas à quel niveau de bruit le travailleur a réellement été exposé une fois les protecteurs auditifs utilisés.
[34] À ce sujet, il est exact que la Commission des lésions professionnelles a reconnu à plusieurs reprises dans le passé7, que le port de protecteurs auditifs protégeait le travailleur d’une exposition à des bruits excessifs. Toutefois, une certaine controverse existe à ce sujet. En effet, dans une décision8 plus récente, cette question a été longuement abordée par le tribunal. Il en ressort qu’il est loin d’être acquis que les protecteurs auditifs offrent une protection complète.
__________
7 Ganotec inc. et Muga Fab inc., C.L.P. 351940-05-0806, 10 novembre 2008, M. Allard; Ganotec inc. et Couture, C.L.P. 334702-31-0712, 1er août 2008, M. Beaudoin; Ganotec inc. et Lévesque, C.L.P. 329222-31-0710, 28 mars 2008, P. Simard; Ganotec inc. et Richer, C.L.P. 300993-71-0610, 13 mars 2007, P. Perron; Ganotec inc. et Paradis, C.L.P. 290333-71-0605, 12 janvier 2007, S. Arcand; Ganotec inc. et Messier, C.L.P. 286904-71-0604, 30 août 2006, F. Juteau; Ganotec inc. et AD Ross Québec ltée et als, C.L.P. 240098-09-0407, 9 décembre 2004, Y. Vigneault; Ganotec inc. et Kamtech Services inc., C.L.P. 346526-05-0804, 25 août 2008, M. Allard; Ganotec inc., C.L.P. 333106-62-0711, 23 mai 2008, H. Marchand; Kamtech Services inc., C.L.P. 329299-31-0710, 28 mars 2008, P. Simard; Ganotec inc., C.L.P. 347601-31-0805, 6 mai 2009, Monique Lamarre.
8 Ganotec inc. et al., 2011 QCCLP 1663 (CanLII); Voir aussi : Kamtech services inc. et al., C.L.P. 400864?63-1001, 13 septembre 2010, M. Juteau
[43] Dans l’affaire Ganotec inc. et Kamtech Services inc[7]., la juge administrative Langlois indique :
[32] Par ailleurs, le travailleur estime, selon son affidavit, qu’il a été protégé adéquatement contre une exposition au bruit de nature à occasionner un problème de surdité alors qu’il travaillait pour Ganotec inc. et Kamtech Services inc. Son affirmation n’est fondée sur aucune preuve. Le travailleur ne dit pas qu’avec les protecteurs auditifs les bruits étaient atténués de façon significative, ou qu’il entendait peu les bruits, ou que les bruits entendus étaient de faible intensité. Il ne qualifie pas ce qu’il entendait avec les protecteurs auditifs. Le tribunal est d’avis que le fait que le travailleur estime être protégé adéquatement sans autre information n’est pas suffisant pour établir de façon probante que, chez ces employeurs, le travailleur n’était pas exposé au danger de développer la surdité professionnelle ou que le danger était moindre que chez les autres employeurs pour lesquels il a œuvré au cours de sa carrière.
[44] Le tribunal considère que dans la cause en litige, le port de protecteurs auditifs allégué par l’employeur ne constitue pas une preuve suffisante permettant de conclure à l’absence de bruit excessif ou élevé pour le travailleur en cause, vu l’absence de preuve concernant la nature et les caractéristiques techniques de ces appareils. L’argument de l’employeur à cet égard ne peut être retenu considérant par ailleurs l’absence de preuve concernant e port de tels appareils entre 1989 et 2005.
- Autobus du Village inc., 2013 QCCLP 308 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[12] Le soussigné peut être en accord avec cette affirmation lorsqu’il y a une démonstration concluante du port de protections auditives, preuve qui permet de situer dans le temps et le lieu, de manière précise, les circonstances d’exposition au bruit, de même que la période durant laquelle le travailleur a effectivement porté ses protections auditives, ainsi que de leur efficacité, preuve qui n’a pas été présentée au tribunal. De plus, il n’est pas possible d’établir le degré d’exposition au bruit ni le niveau d’exposition. La seule mention qu’à l’annexe de la réclamation du travailleur, celui-ci a indiqué avoir porté des équipements de protection auditive, n’est pas suffisante pour infirmer la décision de la révision administrative sur cette question.
- Construction Énergie Renouvelable (CER) inc., 2015 QCCLP 2695 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[…]
[18] Dans sa décision à la suite d’une révision administrative, la CSST indique que le travailleur a occupé un poste de journalier chez l’employeur de 1990 à 1999. Dans le cadre de cet emploi, il a eu à effectuer des travaux de construction d’abris et des travaux de menuiserie, à effectuer des travaux dans l’entrepôt, à transporter du matériel à l’aide de chariot élévateur et à réparer de petits outils électriques. Le travailleur a été exposé aux bruits produits par des chariots élévateurs et par les outils requis pour effectuer les travaux de menuiserie et de construction. Par conséquent, l’employeur demeure imputé d’une partie du coût des prestations.
[19] La Commission des lésions professionnelles a entendu le témoignage de monsieur Michel Rocheleau, directeur des équipements chez l’employeur. De 1990 à 1999, monsieur Rocheleau était directeur de gestion du matériel. Tout le travail qui se faisait à l’atelier ou à l’entrepôt relevait de sa gestion. Il a ainsi une connaissance personnelle de toutes les tâches qu’a dû effectuer le travailleur à l’entrepôt de l’employeur de 1990 à 1999.
[20] Monsieur Rocheleau témoigne que l’essentiel des tâches du travailleur consistait à la réception de matériaux qui devaient être rangés dans l’entrepôt. Par la suite, ces matériaux étaient apportés par le travailleur afin qu’ils soient expédiés vers les sites des chantiers de construction de l’employeur.
[21] L’entrepôt en question mesurait tout au plus 80 pieds par 100 pieds. Seules les pièces de matériaux qui nécessitaient une protection des intempéries étaient placées à l’intérieur de cet entrepôt. Toutes les autres pièces restaient à l’extérieur. En aucun temps il n’y avait la présence de bruit dans cet entrepôt où le travailleur y œuvrait seul ou avec un collègue.
[22] Monsieur Rocheleau témoigne que le travailleur était habile en menuiserie. Alors, à l’occasion, une fois ou deux fois par année, et pas toutes les années, l’employeur lui demandait de construire un abri en contre-plaqué destiné à recevoir les travailleurs des chantiers de construction pour le dîner. Cet abri mesurait de 8 pieds par 12 pieds ou 8 pieds par 16 pieds; ce travail de menuiserie ne nécessitait que deux jours pour sa construction.
[23] Monsieur Rocheleau témoigne qu’effectivement le travailleur faisait la réparation et l’entretien de petits outils électriques. Seuls les petits entretiens étaient faits par le travailleur et n’étaient aucunement une source de bruit.
[24] L’employeur possédait un chariot élévateur qui amenait les matériaux jusqu’à la porte de l’entrepôt où travaillait le travailleur. Cependant, le chariot élévateur n’entrait pas et ne pouvait pas entrer dans l’entrepôt en raison de sa dimension. Le travailleur n’a jamais lui-même conduit le chariot élévateur. Occasionnellement, il a pu diriger l’opérateur du chariot élévateur pour les manœuvres. Cette tâche occasionnelle ne générait pas de bruit pouvant constituer une source de danger de développer une surdité. L’employeur ne possédait qu’un seul chariot élévateur qui était utilisé exclusivement à l’extérieur pour transporter des palettes de matériaux.
[25] Monsieur Rocheleau témoigne qu’à l’entrepôt, l’employeur n’a jamais proposé de fournir des protecteurs auditifs pour la simple raison qu’il n’y avait aucune source de bruit nocif. Monsieur Rocheleau précise que l’atelier, géré par l’employeur, était entièrement et complètement séparé de l’entrepôt.
[…]
[27] La procureure de l’employeur souligne que selon les notes évolutives contenues au dossier du travailleur, aucun représentant de la CSST n’a contacté le travailleur afin de lui faire préciser la nature des tâches qu’il a exercées chez l’employeur.
[28] La procureure de l’employeur est d’avis que la CSST n’avait aucun élément de preuve lui permettant de conclure à la présence de bruit de nature à engendrer une surdité dans les tâches qu’il a effectuées chez l’employeur. La procureure de l’employeur soumet que ce dernier ne conteste pas le fait que le travailleur soit atteint d’une surdité d’origine professionnelle. Cependant, la preuve démontre qu’il n’y avait aucun risque chez l’employeur de développer une telle maladie et par conséquent, en application de l’article 328 de la loi, l’employeur ne doit être imputé d’aucun coût relatif à la réclamation du travailleur.
[29] La Commission des lésions professionnelles partage l’avis de la procureure de l’employeur. Effectivement, en vertu de l’article 328 de la loi, la CSST doit d’abord déterminer si le travail exercé chez les employeurs identifiés par le travailleur comporte un risque de développer la maladie professionnelle, ici une surdité. Parmi les employeurs qui sont retenus, elle doit déterminer la quote-part d’imputation qui revient à chacun d’eux en tenant compte de la durée du travail et du niveau de danger. C’est en ce sens que s’exprimait la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal[2] :
[40] Cet article implique une double analyse de la part de la CSST : d’une part, elle doit déterminer si le travail exercé chez chacun des employeurs identifiés par le travailleur est de nature à engendrer la maladie pour laquelle il réclame; d’autre part, lorsque plusieurs employeurs sont impliqués, elle doit analyser la durée du travail de nature à engendrer la maladie et le niveau de danger retrouvé chez chacun des employeurs.
[41] Or, dans ce dossier, la CSST n’a considéré que la durée du travail chez chacun des employeurs sans même s’interroger sur la présence et l’importance du danger retrouvé chez ces derniers.
[…]
[44] Il ne s’agit pas ici de remettre en cause l’origine professionnelle de la surdité du travailleur mais bien de déterminer qui doit assumer les coûts reliés à cette surdité selon les prescriptions édictées à l’article 328 de la loi.
[45] Dans ce dossier, comme le travailleur n’a pas été exposé à un niveau de bruit de nature à engendrer sa surdité dans les différents emplois occupés chez l’employeur, ce dernier n’a pas à assumer le coût des prestations reliées à la surdité professionnelle du travailleur et la Commission des lésions professionnelles modifie, en conséquence, la décision rendue par la révision administrative.
[30] De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, dans la présente cause, la preuve prépondérante établit que dans l’emploi exercé par le travailleur chez l’employeur, il n’y avait aucune tâche, ni aucun environnement de nature à engendrer sa maladie professionnelle, soit une surdité. Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’employeur ne doit être imputé d’aucun coût relié à la réclamation du travailleur.
- Transelec/Common inc., 2013 QCCLP 5058 (CanLII)
. Voir la mise en garde en haut de page - Ce n'est pas une liste exhaustive - Mise à jour : 14 septembre 2015
Élément à considérer - exemple :
- La date du diagnostic ou de la consultation d’un pneumologue.
- La période latence.
- Le protocole établi par l’employeur lorsque de l’amiante est découverte.
- Le registre des tâches de l’employeur versus l’exposition à l’amiante.
- Les éléments d’isolation, des équipements ou établissements utilisés ou confrontés par l’entreprise contiennent ou non de l’amiante.
- Les mesures de décontaminations prises par l’employeur pour effectuer le nettoyage.
- La réglementation en vigueur au moment où le travailleur était à l’emploi de l’entreprise (aucune, sommaire, stricte) (utilisation ou non de l’amiante dans le produit).
- La date de prohibition dans l’industrie.
- Les connaissances scientifiques quant aux risques pour la santé de l’exposition à l’amiante pendant cette période, à partir de quelle époque les connaissances scientifiques ont établi la prévalence d’un risque significatif pour la santé des travailleurs
- L’air ambiant respectait les normes.
- La formation du travailleur quant aux dangers reliés à l’exposition à l’amiante et sur le port d’une protection adéquate
- Les emplois antérieurs : le nombre d’années, sa durée, son niveau à l’exposition de l’amiante.
- Le témoignage du travailleur à l’audience, l’affidavit (serment) n’est pas suffisant.
(…)
Absence d’exposition à l’amiante :
- L’exposition à l’amiante du travailleur était totalement étrangère aux activités de l’employeur.
- Les tâches effectuées, aucune exposition à l’amiante.
- Les endroits où les tâches ont été effectuées et l’absence d’amiante à ces endroits.
- Ce n’est pas une entreprise où il y a manipulation d’amiante et exposition à un tel produit.
- L’entreprise n’œuvre pas dans une industrie où l’amiante est présent en général.
- L’entreprise ne possède pas les certifications pour travailler avec de l’amiante
- L’entreprise fait appel à la sous-traitance lorsque l’amiante est présente.
- Les autres quarts de métier n’ont pas manipulé de l’amiante à côté du travailleur.
(…)
Information supplémentaire :
- AGENCE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX DE MONTRÉAL, Chronique PPM – Prévention en pratique médicale : « L’amiante : nouvelles réalités », [En ligne] < https://publications.santemontreal.qc.ca/uploads/tx_asssmpublications/1481-3734-JUIN2003.pdf > (Page consultée le 31 janvier 2008).
- CENTRE CANADIEN D’HYGIÈNE ET DE SÈCURITÊ DU TRAVAIL, Amiante— Les effets sur la santé, CC1-IST, 2012; L. DE GUIRE, P. LAJOIE et INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC, Fibres d’amiante dans l’air intérieur et extérieur et épidémiologie des maladies reliées à l’exposition à l’amiante résumé et recommandations des rapports, Québec, INSPQ, 2003, 11 p.
- COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL DU QUÉBEC, Amiante, on se protège! : aide-mémoire sur les dangers d’exposition à l’amiante et sur les mesures de prévention, [Montréal], CSST, 1999, [En ligne], < http://www.csst.qc.ca/NR/rdonlyres/DE239279-81B2-437B-BCBC-BC3A2B659E99/305/dc_500_240_1.pdf > (Date de consultation inconnue).
- Épidémiologie des maladies reliées à l’exposition à l’amiante au Québec
[En ligne], http://www.inspq.qc.ca./pdf/publications/222-ÉpidémiologieExpositionAmiante.pdf
- L. DE GUIRE, P. LAJOIE et INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC, Fibres d’amiante dans l’air intérieur et extérieur et épidémiologie des maladies reliées à l’exposition à l’amiante.
-- SANTÉ CANADA, Document d’information sur les effets sur la santé de l’amiante chrysotile et des autres fibres d’amiante qui accompagne le document de consultation intitulé « Ajout de l’amiante chrysotile à la procédure PIC de la Convention de Rotterdam », [s.I.], Santé Canada, 2004, 10 p.
Un extrait d’un jugement :
[63] Pour Isolation Éclair inc. et Isolation Alerte inc., le tribunal a reçu une preuve prépondérante à l’effet que le travailleur n’a pas été exposé à l’amiante lors de l’exercice de son emploi chez ces employeurs. Chez le premier, celui-ci n’œuvre pas dans une industrie où l’amiante est présent en général, qu’il n’a pas les certifications pour travailler avec de l’amiante et qui fait appel à la sous-traitance lorsque c’est le cas. En ce qui concerne Isolation Alerte inc., monsieur Carbonneau a indiqué avoir obtenu les certifications nécessaires pour la décontamination lorsqu’il y a présence d’amiante, que tous ses travailleurs ont été formés à cet effet et sur le port de la protection adéquate, et que de toute façon, le travailleur n’a pas été sur des chantiers où il a été en contact avec l’amiante.
- Isolation Alerte inc., 2013 QCCLP 3549 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[43] D’abord, dans chacune des décisions sur lesquelles elle s’appuie, l’employeur a fourni une preuve précise, documentaire et testimoniale, permettant au tribunal de conclure en l’absence d’amiante dans l’emploi occupé par le travailleur concerné.
- Arno Électrique ltée, 2012 QCCLP 6001 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[24] Au surplus, lorsqu’on est en présence d’une maladie professionnelle pulmonaire reliée à l’exposition du travailleur à l’amiante, l’analyse effectuée par la CSST se doit, de l’avis du tribunal, d’être beaucoup plus rigoureuse puisqu’il est loin d’être évident que celui-ci a été exposé à des fibres d’amiante dans l’ensemble des emplois qu’il a occupés. De plus, il faut nécessairement tenir compte du fait que le travail, où un risque d’exposition à l’amiante est présent, est beaucoup plus réglementé et surveillé depuis quelques décennies qu’il pouvait l’être il y a 30, 40 ou 50 ans.
- Entretien Paramex inc., 2012 QCCLP 2682 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[23] La Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il est, dans les circonstances du présent dossier, injuste et inéquitable d’imputer au dossier de l’employeur le coût des prestations reliées à la maladie professionnelle du travailleur, et ce, pour les motifs ci-après énoncés.
[24] D’abord, le travailleur a été à l’emploi de l’employeur de 1948 à 1991. La période d’exposition à l’amiante représente 1 % de son temps de travail pour l’employeur.
[25] Ensuite, l’employeur n’exploite pas une mine, mais bien une entreprise de télécommunication. Il ne s’agit pas d’une entreprise où il y a manipulation d’amiante et exposition à un tel produit.
[26] C’est durant quelques mois, alors qu’il travaillait pour deux clients de l’employeur, que le travailleur a été exposé à l’amiante, soit dans deux mines entre 1958 et 1962.
[27] Le risque auquel le travailleur a été exposé est donc totalement étranger à l’activité de l’employeur.
[28] Mais, ce qui est d’autant plus déterminant en l’espèce, c’est l’impossibilité pour l’employeur, à la période d’exposition en cause, d’agir sur le risque. À cette époque, le risque d’exposition à l’amiante causant une maladie pulmonaire professionnelle était inconnu pour un installateur technique en télécommunication. L’employeur ne pouvait éliminer un risque qui n’était pas scientifiquement connu.
[29] Le représentant de l’employeur a déposé à l’audience un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec publié en septembre 2003, intitulé Épidémiologie des maladies reliées à l’exposition à l’amiante au Québec.
[30] Ce rapport explique que le mésothéliome de la plèvre causé par l’exposition à l’amiante a été étudié dans les années ‘60 chez les mineurs.
[31] Or, le travailleur, qui a été exposé avant 1960, n’a jamais été mineur dans une mine d’amiante.
[32] Les risques n’étaient pas connus en 1958 ou en 1962 pour un travailleur occupant un poste d’installateur technique en télécommunication selon le rapport précité.
[33] L’employeur soumet que les études qui s’apparentent au cas du travailleur en l’espèce sont celles concernant les travailleurs de la construction et les premières études datent de 1981.
[34] De plus, les études sur la population en général des régions minières, toujours selon le rapport précité, datent de la fin des années ‘70. Nous sommes toujours à l’extérieur de la période d’exposition du travailleur.
[35] Au surplus, ce même rapport nous apprend que les études concernant les travailleurs québécois et les maladies reliées à l’exposition à l’amiante ont été effectuées à compter de 1980.
[36] L’employeur ne pouvait donc, en 1958, 1959 et 1962, éliminer ou contrôler le risque, à savoir l’exposition à l’amiante, car ce risque n’était pas connu à l’époque. Il serait injuste de faire supporter à l’employeur les conséquences d’un risque qui était scientifiquement inconnu à l’époque d’exposition du travailleur en cause. D’autant plus, que ce risque inconnu était présent, non pas chez l’employeur, mais chez des clients de ce dernier, et ce, en début de carrière du travailleur et pour une période qui ne représente que 1 % du travail pour l’employeur.
- Bell Canada, 2008 QCCLP 4108 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[19] Dans le présent dossier, l’employeur soumet qu’il a droit à un transfert de l’imputation du coût des prestations, conformément au dernier alinéa de cet article, puisque cette imputation a pour effet de l’obérer injustement.
[20] Dans sa demande de transfert d’imputation du 10 juillet 2009, le procureur de l’employeur invoque les éléments suivants pour soutenir que celui-ci serait injustement obéré dans ce dossier :
Considérant le délai de latence de l’amiantose (environ 30 ans), monsieur Fréchette fut exposé à l’amiante à une époque où ce matériau était largement utilisé, voire même recommandé, pour l’isolation de tuyauterie et des matériaux de construction. Les risques associés à la manipulation et l’utilisation de l’amiante étaient alors inconnus.
Qui plus est, la manipulation et l’utilisation de l’amiante sont étrangères à l’activité d’enseignement universitaire de notre cliente.
[…]
De façon similaire, le tabagisme permet un partage de coûts à titre de phénomène de société à l’encontre duquel un employeur peut difficilement se prémunir. (…)
[21] Le présent tribunal comprend donc que l’employeur invoque les trois motifs suivants pour prétendre être obéré injustement :
• Le travailleur a été exposé à l’amiante à une époque où elle était largement utilisée et que les risques associés à sa manipulation étaient alors inconnus;
• L’utilisation de l’amiante est étrangère à l’activité d’enseignement universitaire de l’employeur;
• Le tabagisme du travailleur.
[22] La Commission des lésions professionnelles analysera donc la preuve afin de répondre aux diverses prétentions de l’employeur.
[23] Premièrement, en ce qui concerne la prétention que l’employeur serait obéré injustement parce que le travailleur a été exposé à l’amiante à une époque où ce matériau était fréquemment utilisé à titre d’isolant et que les risques pour la santé associés à son utilisation étaient alors inconnus, le présent tribunal estime qu’il ne peut conclure dans le sens souhaité par l’employeur.
[24] Au soutien de ses prétentions, le procureur de l’employeur soumet quatre décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles[2].
[25] En ce qui concerne la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Lab Société en commandite B.C. et Provençal[3], le présent tribunal constate que cette décision ne vient pas appuyer la prétention de l’employeur voulant qu’un employeur soit obéré injustement du fait que les dangers de l’amiante n’étaient pas connus à une certaine époque. En effet, dans cette décision, le tribunal accorde un partage de l’imputation du coût des prestations reliées au cancer pulmonaire dont est atteint le travailleur en raison du tabagisme de celui-ci. En effet, la Commission des lésions professionnelles considère que le tabagisme a joué un rôle dans le développement du cancer pulmonaire et estime que, dans les circonstances, l’employeur doit supporter seulement 40 % du coût des prestations reliées à la maladie professionnelle dont est atteint le travailleur.
[26] Dans l’affaire Nortel Networks[4], la Commission des lésions professionnelles mentionne ceci quant à la prétention de l’employeur :
[23] Suivant la preuve, le travailleur fut exposé à la poussière d’amiante pendant une période de 37 ans, soit de 1955 à 1992, lorsque les autorités gouvernementales sont intervenues à l’usine pour insister sur le retrait des produits d’amiante.
[24] La Commission des lésions professionnelles doit reconnaître que l’utilisation de l’amiante dans l’usine, pendant des décennies, s’est faite sans connaissance, de la part de l’employeur, des dangers potentiels pour la santé de ses travailleurs. Ce n’est qu’après des études effectuées par la communauté médicale (voir l’annexe) et les démarches entamées par les autorités compétentes, que la décision fut prise d’enlever l’amiante de l’usine. Mais après presque 40 ans d’exposition, il était trop tard pour le travailleur. Les dommages étaient déjà fait, avec des conséquences connues, malheureuses et néfastes pour son état de santé. [...]
[25] Il s’agit d’un phénomène de société, à savoir des dangers inconnus auparavant, l’employeur était tout à fait ignorant des dangers et ainsi sans possession de la connaissance requise pour prendre des moyens et des mesures nécessaires pour éviter les dangers à la source. Il serait donc d’obérer injustement l’employeur de lui faire supporter les coûts importants de ce phénomène de société et de ses conséquences reconnues.
[27] Le présent tribunal note cependant que d’autres facteurs ont été considérés par la Commission des lésions professionnelles afin de conclure que l’employeur serait obéré injustement. Il y a donc lieu de reproduire également l’extrait suivant de cette décision :
[27] L’impossibilité pour l’employeur d’offrir une assignation temporaire au travailleur, ou bien un travail qui respecte ses limitations fonctionnelles, constitue donc, de notre avis, une autre raison permettant de conclure que l’employeur est obéré injustement du coût des prestations de la réclamation.
[28] Au surplus, dans son rapport d’expertise pour l’employeur, rédigée le 21 février 2005, le docteur Renzi, pneumologue, joint de la littérature médicale (voir annexe) qui permet d’établir une contribution importante du tabagisme du travailleur à l’apparition d’opacités irrégulières parenchymateuses ainsi que des lésions pleurales, et aussi que la fumée de cigarettes « augmente la pénétration d’amiante dans les voies aériennes et aussi diminue l’élimination de l’amiante du poumon favorisant une rétention accélérée des fibres d’amiante dans les voies aériennes ». [29] Le tabagisme personnel du travailleur constitue donc un phénomène de société important qui a contribué à l’apparition de sa maladie pulmonaire professionnelle, de sorte qu’il s’agit là d’un autre motif permettant de conclure que l’employeur est obéré injustement.
[30] Pour l’ensemble de ces considérations, la Commission des lésions professionnelles se doit de conclure que l’employeur est obéré injustement du coût des prestations relatif à la maladie pulmonaire professionnelle dont le travailleur est atteint. Dans ces circonstances, il nous semble juste et équitable que l’ensemble du coût des prestations soit imputé aux employeurs de toutes les unités.
[28] Dans l’affaire Bell Canada[5], la Commission des lésions professionnelles a décidé que l’employeur serait obéré injustement parce que l’exposition à l’amiante du travailleur remontait à une période comprise entre 1958 et 1962, soit une période où les risques reliés à l’exposition à l’amiante n’étaient pas scientifiquement connus. De plus, elle retient également comme pertinent que l’exposition du travailleur à l’amiante a eu lieu lorsqu’il a procédé à des installations dans deux mines d’amiante et qu’il s’agit donc d’un risque qui est totalement étranger aux activités de l’employeur. La Commission des lésions professionnelles s’exprime ainsi : […]
[29] Enfin, en ce qui concerne la décision rendue par le tribunal dans l’affaire Centre Universitaire Santé McGill[6], il a été décidé que l’employeur dans ce dossier ne devait pas être imputé puisque la preuve n’était pas concluante pour démontrer que la travailleuse avait pu être exposée à l’amiante dans le cadre de ses emplois de secrétaire et réceptionniste à l’Hôpital Royal Victoria. À cet égard, la Commission des lésions professionnelles mentionne :
[21] Or, comme l’a soutenu l’employeur dans son argumentation, avec jurisprudence à l’appui : la preuve que la travailleuse « a exercé un travail de nature à engendrer [sa] maladie », dans son hôpital comme secrétaire ou réceptionniste, n’a pas été faite.
[…]
[28] Ceci étant dit, reconnaître l’existence d’une maladie est une chose et en imputer les coûts à un ou des employeurs en est une autre. Avant d’imputer l’employeur du coût des prestations reliées à la maladie, il faut, et c’est là la considération capitale de l’article 328 de la loi, nous l’avons dit, prouver que la travailleuse « a exercé un travail de nature à engendre cette maladie ».
[29] La preuve étant à l’effet que la travailleuse a travaillé chez l’employeur, un centre hospitalier, de 1980 à 1997 comme secrétaire, commis ou réceptionniste, rien ne permet, comme l’affirme l’employeur, d’y voir là une quelconque preuve que la travailleuse a exercé un travail de nature à engendrer un cancer impliquant une exposition à la fibre d’amiante. L’hôpital étant au contraire un endroit où l’on soigne cette maladie plutôt qu’un endroit où on la contracte.
[30] La possibilité que, comme le mentionne le Comité spécial des présidents, la travailleuse ait « pu être exposée à la fibre d’amiante lors des travaux de rénovation » à l’hôpital où elle travaillait ne demeure qu’une possibilité. Rien dans la preuve ne permet d’asseoir cette possible exposition à l’amiante, ni la durée ni le niveau ou l’importance de l’exposition, si même l’exposition avait existée. La CSST n’a fait aucune enquête et l’employeur, selon le dossier et son argumentation, a toujours soutenu qu’il n’a jamais été question d’exposition à la fibre d’amiante dans son hôpital.
[…]
[35] Compte tenu que la preuve ne permet pas de retracer, s’il y a eu exposition, le nombre d’années depuis ses débuts, ni sa durée ni son niveau, le Tribunal ne peut conclure que la preuve soit prépondérante à l’effet que la travailleuse « a exercé un travail de nature à engendrer un mésothéliome attribuable à l’amiante ». Dès lors, la CSST ne peut en imputer le coût des prestations à l’employeur.
[30] Le présent tribunal est donc d’avis que cette dernière décision ne peut nullement supporter la demande de transfert d’imputation présentée par l’employeur dans le présent dossier. En effet, l’employeur n’a jamais soutenu que le travailleur n’avait pas été exposé à la poussière d’amiante dans le cadre de son emploi. Quoi qu’il en soit, la preuve est nettement prépondérante pour conclure à une exposition du travailleur à l’amiante dans le cadre du travail qu’il a exercé pour l’employeur de 1961 à 1994.
[31] Pour revenir à la prétention principale de l’employeur, soit que le travailleur aurait été exposé à l’amiante à une époque où ce matériau était largement utilisé et que les risques pour la santé associés à une telle utilisation étaient alors inconnus, le présent tribunal ne peut conclure que la preuve est prépondérante pour soutenir une telle affirmation.
[32] En effet, il faut se rappeler que la preuve non contredite que l’on retrouve au dossier démontre que le travailleur a été exposé à la fibre d’amiante dans le cadre de son emploi pour l’employeur de 1961 à 1994. Aucune preuve n’a été produite au tribunal pour démontrer quelles étaient les connaissances scientifiques quant aux risques pour la santé de l’exposition à l’amiante pendant cette période. Le tribunal peut facilement concevoir que lesdites connaissances scientifiques étaient sûrement moins importantes en 1961 qu’en 1994. Cependant, rien dans la preuve ne vient déterminer à partir de quelle époque les connaissances scientifiques ont établi la prévalence d’un risque significatif pour la santé des travailleurs.
[33] Ceci étant dit, le présent tribunal est également d’avis que le fait de considérer qu’un employeur a fait la démonstration qu’il serait obéré injustement par le seul fait qu’il ne connaissait pas les risques associés à l’utilisation d’un produit remet grandement en cause le principe qui guide le système québécois d’indemnisation des lésions professionnelles, soit un régime sans égard à la faute.
[34] De plus, reconnaître qu’un employeur a droit à un transfert d’imputation parce qu’il ne connaissait pas les risques associés à la manipulation d’un produit viendrait sérieusement compromettre le régime de financement prévu par la loi.
[35] La Commission des lésions professionnelles doit maintenant déterminer si l’employeur a droit à un transfert de l’imputation des coûts reliés à la lésion professionnelle subie par le travailleur puisque l’utilisation de l’amiante est étrangère à l’activité d’enseignement universitaire de l’employeur.
[36] Le tribunal est également d’avis que cette prétention de l’employeur ne peut être retenue.
[37] En effet, le présent tribunal est d’avis que les activités d’un établissement universitaire ne se limitent pas à l’enseignement. Il est vrai qu’il s’agit sûrement de sa principale activité. Cependant, il y a lieu de reconnaître que le maintien en bon état des édifices où est dispensé l’enseignement fait intégralement partie des activités d’un tel établissement d’enseignement. En conséquence, on ne peut conclure que l’employeur est obéré injustement lors de la survenance d’une lésion professionnelle (accident du travail ou maladie professionnelle) à un employé responsable de l’entretien des immeubles.
[38] Il y a lieu ici de souligner que le présent dossier se distingue de celui qui était soumis à l’attention de la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Bell Canada[7]. Dans cette dernière affaire, rappelons que le tribunal a tenu compte du fait que l’exposition à l’amiante du travailleur était totalement étrangère aux activités de l’employeur puisque ladite exposition avait eu lieu lors de travaux d’installations de systèmes de télécommunications dans deux mines d’amiante et non dans des locaux de l’employeur.
[39] Il reste enfin à statuer sur la dernière prétention de l’employeur, soit qu’il aurait droit à un transfert d’imputation en raison du tabagisme du travailleur. L’employeur appuie sa prétention avec les décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles dans les affaires Lab Société en commandite B.C. et Provençal[8] et Belgen inc. et Cloutier[9].
[40] Avant tout, le présent tribunal estime que la prétention de l’employeur concernant le tabagisme du travailleur devrait être examinée en vertu des dispositions de l’article 329 (partage de l’imputation) plutôt que celles de l’article 328 (transfert de l’imputation). En effet, le tribunal estime que le tabagisme doit être assimilé à un handicap qui peut permettre un partage de l’imputation du coût des prestations.
- Université de Montréal, 2013 QCCLP 2424 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[47] Ainsi, pour prouver que la période de latence del’amiantose est de 20 à 40 ans, la représentante ne soumet aucune preuve d’expert, ni aucune littérature ou opinion médicale.
[48] Elle s’appuie simplement sur les trois mêmes décisions précitées concernant le même employeur, ainsi que sur une autre décision plus récente qui fait référence à huit autresdécisions[11], pour un total de 12 décisions.
[49] Or, la durée de cette période de latence ne fait pas partie de la connaissance d’office de laCommission des lésions professionnelles. Une partie ne peut donc s’exempter de fournir une preuve médicale, en se référant à la preuvefaite dans des dossiers concernant d’autres travailleurs. C’est la raison pour laquelle une preuve a été soumise à la Commission des lésionsprofessionnelles à l’égard de cette période de latence, dans chacune des décisions invoquées par la représentante.
[50] Encore une fois, l’employeur ne saurait pallier l’absence de preuve en fournissant des décisions qui fontétat d’extraits de la documentation médicale qui avait alors été soumise à la Commission des lésions professionnelles. Plaider n’équivaut pas à prouver [12].
[51] Au surplus, contrairement aux prétentions de la représentante, il ne semble pas certain qu’il soit acquis, dans lalittérature médicale, que la période de latence pour l’amiantose soit de 20 à 40 ans, ni que notre jurisprudence soit unanime quant à la seule imputation desemployeurs pour lesquels un travailleur a travaillé pendant cette période de latence [13].
- Arno Électrique ltée, 2012 QCCLP 6001 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[32] L’employeur a souligné que les années postérieures à la retraite du travailleur n’ont pu contribuer à l’apparition de la maladie, bien que l’amiantose se développe sur une longue période de temps. Selon ses propos, unemaladie professionnelle progresse habituellement dans une période contemporaine à la vie active du travailleur.
[33] Le tribunal ne peut pas plus faire droit à un argument fondé sur la période de latence de la maladie, puisqu’il y a absence totale de preuve à cet égard.
- Arno Électrique ltée, 2012 QCCLP 7141 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[16] La représentante de l’employeur précise que le Code de sécurité pour les travaux de construction règlemente l’utilisation de l’amiante depuis 1981[2].
[17] Elle soumet aussi que la période de latence suite à une exposition à l’amiante responsable des diagnostics d’amiantose est de 20 à 40 ans, avec une moyenne de 30 ans. Elle dépose, à cet égard, de la littérature médicale[3].
[18] La jurisprudence du tribunal est aussi à l’effet que la période de latence varie entre 20 et 40ans, pour une latence générale moyenne de 30 ans pour l’apparition d’amiantose pulmonaire[4].
[…]
[20] Dans l’affaire Ganotec inc.[6], le tribunal réitère cette position dans les termes suivants :
[37] Au surplus, sur la question de la période de latence, le tribunal est aussi d’avis qu’il est médicalement improbable quela maladie professionnelle pulmonaire du travailleur ait pu être occasionnée par son travail chez Ganotec inc. En effet, il est reconnu par le monde médical qu’il existe une longue période de latence entre la premièreexposition à l’amiante et l’apparition des symptômes d’une amiantose. Cette période de latence est d’environ 20 ans.
[38] À cet effet, le tribunal a pris connaissance d’un document d’information émanant deSanté Canada4 ainsi qu’une note d’information publiée par l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal5 à cet effet.
[39] Un rapport de l’Institut national de la santé publique du Québec6 ajoute spécifiquement, quant aux maladies reliées à l’exposition à l’amiante auQuébec, que : « L’amiante cause trois principaux effets sur la santé, le mésothéliome de la plèvre et du péritoine, le cancer pulmonaire etl’amiantose. Toutes ces maladies apparaissent après une latence qui varie entre 20 et 40 ans selon la pathologie ».
[40] D’ailleurs, cette période de latence qui caractérise l’amiantose a été reconnuepar la jurisprudence du tribunal, notamment dans Ganotec inc.7 :
[54] À la suite de la lecture de la littérature médicale,la Commission des lésions professionnelles considère qu’il est raisonnable de retenir une période de latence générale moyenne d’apparition d’amiantosepulmonaire liée à l’amiante de 30 ans.
__________________________
4 SANTÉ CANADA, Document d’information sur les effets sur la santé de l’amiante chrysotile et des autres fibresd’amiante qui accompagne le document de consultation intitulé « Ajout de l’amiante chrysotile à la procédure PIC de la Convention de Rotterdam », [s.I.], Santé Canada, 2004, 10 p.
5 AGENCE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX DE MONTRÉAL, Chronique PPM – Prévention en pratique médicale :« L’amiante : nouvelles réalités », [En ligne] <http://www.santepub-mtl.qc.ca/mdprevention/chronique/2003/13102003.html> (Page consultée le 31 janvier 2008).
6 L. DE GUIRE, P. LAJOIE et INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC, Fibres d’amiante dans l’air intérieur et extérieur et épidémiologie des maladies reliées à l’exposition àl’amiante : résumé et recommandations des rapports, Québec, INSPQ, 2003, 11 p.
7 [2010] QCCLP 3196.
[21] Le tribunal est donc d’avis que la prépondérance de preuveest à l’effet que le travailleur n’a pas exercé, chez l’employeur, un travail de nature à engendrer la maladie professionnelle dont il est atteint, à savoirl’amiantose. La preuve non contredite est à l’effet qu’il n’a pas été exposé chez l’employeur à des produits responsables d’un diagnosticd’amiantose.
- Construction Michel Gagnon ltée, 2012 QCCLP 4094 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[26] Le second argument plaidé par le représentant de l’employeur justifie toutefois d’accueillir la requête.
[27] Dans le document intitulé L’Amiante : nouvelles réalités[3], on peut y lire ce qui suit :
L’exposition à l’amiante responsable d’une amiantose, d’un mésothéliome ou d’un cancer du poumon remonte en général de 20 à 40 ans dans le passé. […]
[…]
Ne pas oublier que les premières manifestations radiologiques de l’amiantose sont rarement visibles avant 15 ans depuis l’année de la premièreexposition à l’amiante.
[28] Dans le document intitulé Fibres d’amiante dans l’air intérieur et extérieur et épidémiologie des maladies reliées à l’exposition à l’amiante - Résumé etrecommandations des rapports[4], il est écrit ce qui suit :
L’amiante cause trois principaux effets sur la santé : le mésothéliome de la plèvre et du péritoine, le cancer pulmonaire et l’amiantose.Toutes ces maladies apparaissent après une latence qui varie entre 20 et 40 ans selon la pathologie. De plus, tous les types d’amiante ont été associés auxtrois maladies.
[29] Comme en témoignent les décisions déposées par le représentantde l’employeur, il s’agit de la position qui est suivie par la jurisprudence de manière largement majoritaire, sinon unanime, depuis plusieurs années[5]. L’approche contraire a toutefois été retenue dans trois décisions[6]. Un des motifs invoqués repose sur le fait que la littérature médicale demeure silencieuse sur la contribution de l’expositionà l’amiante pendant la période de latence sur la manifestation de l’amiantose.
[30] Compte tenu de la preuve médicale déposée au dossier et de la jurisprudence sur la question, le tribunal souscrit àl’approche majoritaire. Le tribunal retient une période de latence de 20 ans, plutôt que de 40 ans, ou une moyenne de 30 ans parce qu’il semble,selon un document déposé en preuve, que les premières manifestations radiologiques de l’amiantose peuvent être visibles après 15 années d’exposition.
[31] Quoi qu’il en soit, les périodes au cours desquelles le travailleur a été employé par l’employeur, soit en 2003, 2005 et2006, se situent à l’intérieur de la période de latence de telle sorte qu’on doit retenir, selon la jurisprudence majoritaire, qu’il n’a pas exercé au coursde ces périodes un travail qui était de nature à engendrer l’amiantose qu’il a contractée.
- Ganotec inc., 2015 QCCLP 1487 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[27] Toutefois, l’employeur, s’appuyant sur plusieurs décisions rendues par le tribunal au cours des dernières années, soumet qu’il ne doit pas être imputé du coût des prestations reliées à la maladie professionnelle du travailleur puisque, selon ses prétentions, il est reconnu dans la littérature médicale que la période de latence de cette maladie est d’au moins 20 ans. Le travailleur ayant été embauché chez lui il y a moins de dix ans, l’exposition à l’amiante subie par le travailleur dans le cadre de son emploi pour son compte, n’a pu être de nature à engendrer sa maladie professionnelle diagnostiquée en 2009.
[28] Le courant jurisprudentiel sur lequel s’appuie l’employeur est bien résumé dans l’affaire Entretien Paramex inc.[3], rendue en 2011 dont le passage pertinent est le suivant :
[21] Dans le dossier, la CSST n’a pas examiné chez quel employeur le travailleur avait été exposé à l’amiante, dans le cadre de ses différents emplois à titre de tuyauteur plombier. Elle a plutôt procédé au partage d’imputation en se fiant uniquement sur l’historique des heures travaillées par le travailleur dans l’industrie pour effectuer un calcul au prorata.
[22] Dans Environnement Routier NRJ inc. et Legault & Touchette inc.4, le Tribunal a manifesté son désaccord avec une telle façon de procéder, propos auxquels adhère la soussignée:
[15] Il importe de plus de souligner qu’il n’y a pas au dossier de la CSST la moindre preuve que durant la période de temps pendant laquelle le travailleur a pu travailler chez le présent employeur, le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer chez lui la maladie professionnelle pulmonaire qui lui a été reconnue.
[16] De plus, il semble évident que la CSST a procédé à partager les responsabilités strictement en proportion du temps passé chez les différents employeurs sans avoir la moindre preuve qu’il y avait danger de maladie professionnelle pulmonaire causée par l’exposition à l’amiante chez chacun d’eux.
[17] La CSST a tout simplement déterminé des proportions de responsabilités sans avoir la moindre preuve de l’existence de danger chez les employeurs comme pourtant il est prévu à la loi.
[23] Par conséquent, de l’avis de la soussignée, il y aurait lieu d’accueillir la demande de l’employeur pour ce premier motif, à savoir que le travailleur n’a pas été exposé à l’amiante alors qu’il a travaillé uniquement 78 heures, en 1994, chez l’employeur.
[24] Mais il y a plus puisque, selon le deuxième motif soumis par l’employeur, il est médicalement impossible que la maladie professionnelle pulmonaire du travailleur ait pu être occasionnée par son travail effectué chez l’employeur; ceci à cause de la période de latence entre la première exposition à l’amiante et l’apparition des symptômes d’une amiantose qui est d’environ 20 ans, selon ce qui est reconnu dans la littérature médicale.
[25] Les documents suivants déposés par l'employeur énoncent que les maladies reliées à l’exposition à l’amiante, dont l’amiantose, apparaissent après une latence qui varie entre 20 et 40 ans selon la pathologie :
- un document d’information émanant de Santé Canada [5] (pièce E-3);
- une note d’information publiée par l’Agence de la santé et service sociaux de Montréal[6] (pièce E-4);
- un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec[7] (pièce E-5).
[26] La jurisprudence a d’ailleurs reconnu cette période de latence caractérisant l’amiantose, notamment dans les affaires Ganotec inc.[8] et Arno Électrique ltée[9] .
[27] Dans le présent cas, c’est en 1994 que le travailleur a été à l’emploi de l’employeur, pour un total de 78 heures, tandis que les premières manifestations radiologiques de sa maladie professionnelle pulmonaire sont apparues en 2005, selon le comité des maladies professionnelles pulmonaires, qui l’avait noté dans leur évaluation.
[28] Considérant cette période de latence, il apparaît dès lors que l’employeur n’a pu contribuer médicalement à la maladie professionnelle pulmonaire du travailleur, considérant la période de latence de moins de 20 ans et considérant que les premières manifestations radiologiques sont apparues en 2005.
[29] De ce qui précède, le Tribunal fait droit aux prétentions de l’employeur et accueille sa contestation.
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4. C.L.P. 278451-61-0512, 19 DÉCEMBRE 2007, M. Duranceau
5 SANTÉ CANADA, Document d'information sur les effets sur la santé de l'amiante chrysotile et des autres fibres d'amiante qui accompagne le document de consultation intitulé « Ajout de l'amiante chrysotile à la procédure PIC de la Convention de Rotterdam », [s.l.], Santé Canada, 2004, 10 p.
6 AGENCE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX DE MONTRÉAL, « L'amiante : nouvelles réalités », Chronique PPM - Prévention en pratique médicale, [En ligne], <http://www. santepub-mtl.qc.ca/mdprevention/chronique/2003/13102003.html> (Page consultée le 31 janvier 2008).
7 L. DE GUIRE, P. LAJOIE et INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC, Fibres d'amiante dans l'air intérieur et extérieur et épidémiologie des maladies reliées à l'exposition à l'amiante : résumé et recommandations des rapports, Québec, INSPQ, 2003, 11 p.
8 C.L.P. 389926-63-0909, 26 avril 2010, M. Gauthier.
9 C.L.P. 323873-04-0707, 17 décembre 2007, A. Gauthier.
[29] Avec égards, le tribunal ne peut souscrire à ce courant jurisprudentiel et particulièrement à l’affirmation voulant que toute exposition à la fibre d’amiante à l’intérieur d’une période de 20 ans ne peut contribuer à engendrer la maladie.
[30] Le tribunal est d’avis que dans les décisions précédentes, la Commission des lésions professionnelles s’est méprise sur l’interprétation à donner à l’expression : « période de latence ». En médecine, la période de latence désigne « la période sans symptômes cliniques entre l'exposition d'un tissu biologique à un agent pathogène et la réponse du tissu ».
[31] Le tribunal ne remet pas en cause le fait qu’entre la première exposition à l’amiante et la réponse du tissu ou le développement de la maladie, il peut généralement s’écouler 20 ans dans le cas d’une population exposée. Ce qu’il remet en question c’est le fait que les expositions successives à l’intérieur de cette période de 20 ans ne soient pas de nature à engendrer la maladie.
[32] Le tribunal a pris connaissance de la littérature médicale[4] déposée dans les affaires discutées par la Commission des lésions professionnelles dans la jurisprudence rapportée et aucun article n’affirme que les expositions à de la fibre d’amiante à l’intérieur de la période de 20 ans ne contribuent pas au développement de la maladie professionnelle qu’est l’amiantose. Tous ces articles réfèrent à une période de latence de 20 à 40 ans, « après la première exposition ».
[33] Dans le présent dossier, le tribunal a eu l’opportunité d’être assisté d’un assesseur médical, soit le docteur Michel Lesage. Ce dernier dispose d’une compétence particulière dans l’étude de l’amiantose. Son avis sur la littérature médicale discutée dans les précédentes décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles et sur d’autres articles scientifiques relevés par le tribunal conforte le tribunal dans sa conviction que si la période de latence pour le développement des maladies reliées à l’amiantose est de 20 à 40 ans dans les populations étudiées, les expositions successives à l’intérieur de la période de latence peuvent contribuer à réduire la période de latence et même à engendrer la maladie ou sa plus grande virulence. Il s’agit d’un effet cumulatif non négligeable dans le développement de cette maladie.
[34] Nous référons entre autres à une étude française sur la question publiée par la Haute autorité de la Santé, parue en avril 2010 où l’on mentionne :
? Plaques pleurales
Les plaques pleurales sont les plus fréquentes des pathologies liées à l’amiante. Elles sont en général asymptomatiques et, lorsque les études sont significatives, sont associées à une altération très modérée de la fonction respiratoire.
L’examen TDM thoracique est plus sensible et plus spécifique que la radiographie pulmonaire standard pour la détection des plaques pleurales. Dans les études reposant sur l’examen TDM thoracique, la prévalence de cette affection peut atteindre 50 % dans des populations fortement exposées. Dans des populations faiblement exposées, la prévalence des plaques pleurales est plus faible (entre 4,1 et 13 % selon les études).
La prévalence des plaques pleurales repérées par l’examen TDM thoracique n’est pas connue précisément dans la population générale. Les plaques pleurales apparaissent rarement moins de 15 ans après le début de l’exposition et le temps de latence est inversement proportionnel à l’importance de l’exposition. Le temps écoulé depuis le début de l’exposition à l’amiante et l’exposition cumulée sont deux variables significativement et indépendamment associées à la prévalence des plaques pleurales. Il n’existe aucun seuil démontrable de durée ou d’intensité minimale d’exposition aux fibres d’amiante pour cette pathologie. Ces données ont été confirmées récemment par la seule étude française basée sur l’examen TDM thoracique (SPP-A régional/ARDCO). Enfin, les lésions se stabilisent et ne semblent pas progresser 15 ans après leur apparition.
En dehors de l’amiante, les seules causes identifiées de plaques pleurales sont l’exposition à d’autres fibres minérales (érionite et fibres céramiques réfractaires).
[…]
2.1.2 Asbestose
L’asbestose est la fibrose pulmonaire induite par l’inhalation d’amiante. Les signes radiologiques et les lésions histologiques ne sont pas spécifiques et sont comparables à ceux d’autres pneumopathies interstitielles. Le diagnostic d’asbestose peut donc être posé lorsque sont associées la confirmation en imagerie ou par l’histologie d’anomalies compatibles avec ce diagnostic, la confirmation d’une exposition à l’amiante et l’absence de tout autre diagnostic. L’asbestose entraîne un trouble ventilatoire restrictif (avec une diminution de la capacité vitale) et altère la diffusion de l’oxyde de carbone.
La prévalence de l’asbestose dans des populations exposées étudiées par examen TDM thoracique est inférieure à 10 % dans les séries récentes. Cette prévalence est associée au temps écoulé depuis le début de l’exposition. La latence entre le début de l’exposition et les premiers signes tomodensitométriques de la maladie est de plus de 20 ans pour les niveaux d’exposition actuels, mais peut être plus courte pour des expositions intenses. Il existe également une relation dose-effet entre le niveau d’exposition cumulée à l’amiante et la fréquence et la sévérité de l’asbestose. Bien que les données disponibles ne permettent pas de confirmer l’existence d’un seuil en-deçà duquel aucun effet ne serait observé, l’asbestose est rare pour des niveaux inférieurs au seuil initialement proposé de 25 f/ml.années y compris en ayant recours à l’examen TDM thoracique. L’atteinte radiologique peut continuer à évoluer après la cessation de l’exposition, et la progression dépend des niveaux d’exposition passés.
[Notre soulignement]
[35] Au même titre qu’un cancer du poumon chez un fumeur peut se développer après une période de latence de 10 ans, il ne se trouverait personne pour prétendre que les cigarettes fumées à l’intérieur de cette période de dix ans n’ont pas contribué au développement de ce cancer ou à sa virulence. D’ailleurs, la littérature médicale fait un lien entre la réduction de la période de latence dans le cas des fumeurs exposés à la fibre d’amiante et le développement de l’amiantose :
• L’amiante (ou asbeste) : Il est connu depuis une bonne quarantaine d’années que l’exposition (principalement professionnelle chez les mineurs) à des fibres d’amiante entraîne l’apparition de cancers de la plèvre et, moins fréquemment, du péritoine. Chez les fumeurs, une synergie très nette s’observe avec l’amiante ; elle entraîne l’apparition de cancers du poumon (principalement des adénocarcinomes), après un temps de latence relativement court de 15 à 25 ans. Chez les non fumeurs, on n’observe pratiquement que des mésothéliomes, après un temps de latence qui atteint souvent 40 ans. Toutes les fibres d’amiante (blanc, bleu, brun) sont cancérigènes, quoique à des degrés divers. Le plus fortement cancérigène est l’amiante bleu, en raison de la présence de fer, qui catalyse la formation de radicaux libres.
• La généralisation de l’utilisation d’amiante (matériaux isolants, plaquettes de freins, etc) entraîne sa dispersion dans l’environnement et l’exposition de personnes non professionnellement concernées. Si les fibres peuvent être identifiées au niveau des alvéoles pulmonaires, l’exposition produit également des modifications sérologiques précoces qui permettent de prédire l’évolution vers un cancer bronchique ou un mésothéliome[5].
[36] Il est clair à la lumière de cette littérature que l’effet cumulatif des expositions est de nature à réduire la période de latence et de nature à engendrer la maladie professionnelle reliée à une exposition aux fibres d’amiante, même à l’intérieur de la période de 20 ans et le tribunal ne dispose d’aucune preuve lui permettant d’affirmer que l’exposition du travailleur entre 1999 et 2004 n’a pas contribué à « engendrer la maladie professionnelle » dont il est maintenant porteur. Le tribunal souligne que cette littérature a été communiquée à la représentante de l’employeur aux fins de commentaires avant que la présente décision ne soit rendue.
- CHSLD Centre-Ville St-Charles-Borromée, 2012 QCCLP 462 (CanLII
. Voir la mise en garde en haut de page - Ce n'est pas une liste exhaustive - Mise à jour : 14 septembre 2015
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Élément à considérer - exemple :
- Avant l’embauche, le diagnostic de syndrome du canal carpien a été posé ou le travailleur a consulté un médecin au regard de cette maladie.
- Le travailleur a passé examen par électromyogramme avant son embauche chez l’employeur.
- Le témoignage du travailleur à l’audience, l’affidavit (serment) n’est pas suffisant.
- La présence des facteurs de risques on son absence.
- Le début de l’apparition des premiers symptômes : son emploi antérieur, quelques semaines après son embauche.
(…)
Facteurs de risques – exemple :
- La déviation radiale ou cubitale répétée ou continue.
- Les mouvements répétés avec un ou plusieurs doigts.
- Les mouvements de préhension (préhension répétée avec pinces digitales, préhension avec tractions répétées ou rotation du poignet, préhension pleine main, pression avec la main, geste de cisaillement).
- La flexion ou l’abduction du membre supérieur.
- L’utilisation d’outils vibrants ou à percussion.
- Le port de gants.
- L’exposition au froid.
- La sollicitation du poignet droit durant l’utilisation des outils.
- L’exposition à une combinaison de facteurs de risque (répétitivité, force et posture) augmente le risque d’un syndrome du canal carpien.
- Les postures contraignantes des poignets et des mains.
- La tension mécanique à la base de la paume de la main et la vibration.
(…)
Emploi antérieur :
- Des variations ou non dans les tâches.
- Les outils utilisés étaient similaires ou non.
- Les gestes posés des manœuvres différentes ou non.
- Les tâches exigeaient ou non des efforts plus intenses que son travail d’aujourd’hui.
- Les pauses dans le cadre de son travail.
- Les gestes effectués exigeaient ou non des manœuvres de plus grandes amplitudes.
- L’exposition au froid.
- De l’aide ou non des autres employés.
- Travaillait seul ou avec des collègues.
- Le port de gant de protecteur ou non
(…)
Information supplémentaire :
- Ouvrage Pathologie médicale de l’appareil locomoteur.
.
Un extrait d’un jugement :
[24] Selon ce qui ressort de l’ouvrage Pathologie médicale de l’appareil locomoteur[3], ouvrage connu et reconnu en la matière dont la section pertinente est déposée en preuve par le procureur de l’employeur, les facteurs de risque d’ordre musculo-squelettique de développer un syndrome du canal carpien (outre les causes systémiques et d’origines diverses) sont plus particulièrement les suivants :
Facteurs étiologiques
Tout facteur qui provoque une augmentation de volume à l'intérieur du canal carpien peut comprimer le nerf médian. Parmi ces facteurs, le plus fréquent est la ténosynovite non spécifique des fléchisseurs des doigts, souvent liée à une activité professionnelle ou domestique (tricot, etc.)
Parmi les facteurs occupationnels qui ont été associés avec le syndrome du canal carpien, citons les mouvements forcés et répétitifs des mains, les postures contraignantes des poignets et des mains, la tension mécanique à la base de la paume de la main et la vibration.
Dans une étude portant sur 552 travailleurs actifs, Barbara Silverstein et coll.31 ont retrouvé un risque 15 fois plus élevé de syndrome du canal carpien chez les travailleurs effectuant des travaux nécessitant une force et une répétitivité élevées (plus de 4 kg et plus de 120 cycles à l'heure pendant plus de 50 % du temps) par opposition aux travailleurs effectuant des travaux ne nécessitant qu'une force et une répétitivité légères (moins de 1 kg et moins de 120 cycles à l'heure pendant moins de 50 % du temps).
Dans cette étude, la répétitivité apparaît comme un facteur de risque plus important que la force. La vibration semble aussi être un facteur de risque appréciable, mais pas les postures contraignantes.
__________
[note omise]
[notre soulignement]
[25] En outre, selon un autre article reconnu, soit Musculoskeletal Disorders and Workplace Factors[4], il est clair que le syndrome du canal carpien présente plusieurs facteurs étiologiques ne pouvant être reliés au travail, mais que, par ailleurs :
- Il existe de fortes preuves (« strong evidence ») d'une association entre l'exposition à une combinaison de facteurs de risque (par exemple, force et répétition, force et posture) et le SCC. Les preuves sont claires que l'exposition à une combinaison de facteurs de risque (répétition, force, posture) augmente le risque d'un SCC;
- Il existe des preuves (« evidence ») d'une association entre un travail hautement répétitif (highly repetitive) et le SCC, seul ou en combinaison avec d'autres facteurs de risque;
- Il existe également des preuves (« evidence ») d'une association entre le travail avec force et le SCC;
- Il existe des preuves (« evidence ») d'une association entre l'exposition aux vibrations segmentaires et le SCC.
- Bois Grandval GDS inc. et 127974 Canada inc., 2014 QCCLP 664 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[19] La jurisprudence du tribunal a déjà identifié les mouvements ou postures généralement reconnus comme étant à risque de développer un syndrome du canal carpien. Dans l’affaire Desrosiers et Laidlaw Carriers Bulk LP[4], le tribunal les résumait de la façon suivante :
[37] Les mouvements et gestes pouvant comporter un risque de provoquer ou contribuer au développement d’un syndrome du canal carpien sont les suivants : les mouvements répétitifs de la main ou du poignet (poignet en extension ou en flexion, déviation radiale ou cubitale répétée ou continue, mouvements répétés avec un ou plusieurs doigts) et les mouvements de préhension (préhension répétée avec pinces digitales, préhension avec tractions répétées ou rotation du poignet, préhension pleine main, pression avec la main, geste de cisaillement). La flexion ou l’abduction du membre supérieur, l’utilisation d’outils vibrants ou à percussion, le port de gants ou l’exposition au froid sont des facteurs additionnels de risque. L’exposition à une combinaison de facteurs de risque (répétitivité, force et posture) augmente le risque d’un syndrome du canal carpien11.
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11 Cyr et C.S. Brooks Canada inc., 230631-05-0403, 21 septembre 2004, M. Allard; Lalonde et Groupe Royal Technologie Québec inc., 248029-61-0411, 18 avril 2006, L. Nadeau
- WEC Tours Québec inc., 2014 QCCLP 4729 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[66] En l’absence du témoignage du travailleur, le tribunal n’est pas en mesure de savoir si dans sa formation ou son travail il est exposé au froid, s’il y avait des variations dans ses tâches, si les outils utilisés étaient similaires, si les gestes posés nécessitaient des manœuvres différentes, si sa formation exigeait des efforts plus intenses que son travail, s’il bénéficiait de pauses dans le cadre de son travail, si les gestes effectués exigeaient des manœuvres de plus grandes amplitudes etc etc. Ces éléments sont déterminants puisque l’importance du danger se mesure en fonction des facteurs associés au développement de la maladie et du degré d’exposition du travailleur à de tels risques.
- Acier AGF inc., 2014 QCCLP 3239 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[35] Dernier élément quant à cette question, le tribunal n’est pas en mesure d’apprécier l’importance du danger de développer un tunnel carpien en fonction de cette seule preuve. Y a-t-il, médicalement parlant, une différence notable si le travailleur manipule des outils vibratoires 50 %, 70 % ou 95 % de son temps de travail dans le développement de sa maladie professionnelle? Aucune preuve médicale ne soutient l’affirmation de l’employeur.
[36] Le tribunal, dans ce contexte, ne peut, sur la seule affirmation de l’employeur, considérer que les emplois occupés chez lui ou chez ADS présentaient un danger différent de développer la maladie, d’autant plus que la révision administrative a déjà considéré que l’emploi de perceur de panneaux était à risque de développer la maladie professionnelle du travailleur et cette décision n’a pas été contestée par l’employeur.
- Composite VCI inc et Camoplast inc, 2013 QCCLP 7162 (CanLII)
Un extrait d’un jugement :
[20] Dans la décision Entrepreneurs peintres B.S.R. inc.[5], il a été retenu que la Commission des lésions professionnelles a déjà accordé un partage du coût des prestations dues conformément à l’article 328 de la loi, pour un syndrome du canal carpien consécutif à une exposition à des facteurs de risque chez différents employeurs pendant respectivement 10, 22 et 27 ans. Ainsi, elle a indiqué que : « Au plan juridico-administratif, le principe d’une exposition à des facteurs de risque pendant un bon nombre d’années comme étant susceptible d’engendrer un syndrome du canal carpien est donc reconnu ».
[21] En l’instance, la preuve révèle que de novembre 2012 à février 2013, le travailleur a occupé un emploi d’aide-peintre et que de 2007 à la fin du mois d’octobre 2012, il a exercé un emploi d’assembleur chez Composite VCI. Chez cet employeur, ses principales tâches consistaient à sabler des pièces, épandre de la résine et effectuer la réparation de finition. Il utilisait un ou des outils vibratoires.
[22] De plus, les premiers symptômes du travailleur sont apparus à peine deux à trois semaines après le début de son embauche chez l’employeur. D’autre part, un diagnostic de syndrome du tunnel carpien gauche a été émis et refusé par la CSST, au motif qu’il n’est pas en lien avec les tâches exécutées chez l’employeur.
[23] Ainsi, en raison du genre de travail effectué par le travailleur, notamment chez d’autres employeurs pendant une période d’environ cinq ans avant de débuter chez l'employeur actuel, il y a lieu de retourner le dossier à la CSST pour lui permettre de recueillir toutes les informations nécessaires à l’analyse d’un partage de coût en vertu des critères de l’article 328 de la loi, à savoir si le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer un syndrome du tunnel carpien, et procéder à l’imputation et au partage de coût, le cas échéant.[6]
[24] L’employeur a déposé des décisions dans lesquelles la Commission des lésions professionnelles a conclu de cette façon.[7]
- WEC Tours Québec inc., 2014 QCCLP 4729 (CanLII)